Le marché commun et l’Afrique
Même s’il est parfois inconfortable d’être l’objet de débats dont la critique n’est pas absente, on peut au moins y trouver deux ordres de satisfactions : celle d’y prendre la mesure de sa propre importance, et celle de s’entendre approuver par ceux qui vous ont compris.
C’est une impression de cette nature qui s’est dégagée, pour les représentants de l’Europe des Six, des discussions auxquelles a donné lieu, en février dernier, la 3e session de la Commission Économique de l’O.N.U. pour l’Afrique. L’une des principales questions inscrites à l’ordre du jour était celle des incidences de l’intégration économique de l’Europe occidentale sur le commerce et le développement africains : cette question avait fait l’objet d’une étude préparatoire du Secrétariat, étude intéressante d’ailleurs et objective. Il est cependant assez remarquable de constater que ce rapport était presque uniquement consacré aux conséquences du Marché Commun sur l’économie africaine : en revanche, l’Association Européenne de Libre-Échange était elle-même présentée comme n’ayant à cet égard aucune répercussion imaginable. C’est donc, parmi toutes les formes d’organisation de l’Europe, au Marché Commun seul que revenait l’honneur de provoquer les critiques parfois virulentes ou les approbations non moins convaincues des représentants des divers États africains réunis à cette occasion. Pour l’Afrique assemblée, l’Europe se manifestait sous la forme du Marché Commun.
Il ne faut évidemment pas s’obnubiler sur la portée de telles manifestations d’intérêt, qu’elles soient positives ou négatives. Les préoccupations de l’Afrique sont désormais essentiellement africaines, et c’est à partir d’elle-même, non par rapport à des entités étrangères, qu’elle s’efforce actuellement de se construire. Il n’en reste pas moins qu’au moment où de nombreux pays nouvellement indépendants recherchent les appuis extérieurs qui leur sont indispensables, et où ils essaient de concilier, dans la reconversion de leurs relations économiques, une nécessité évidente de continuité avec un désir ardent de renouvellement, certains jeunes états africains sont tentés de tourner les yeux vers une jeune Europe qui est leur contemporaine, et qui présente l’originalité d’avoir prévu, dans le cadre même de sa constitution, qu’une part de sa substance serait consacrée à l’aide aux pays en voie de développement.
Il reste 92 % de l'article à lire