Défense à travers la presse
La question du désarmement vient d’être remise au premier rang des préoccupations mondiales par l’initiative française dont le but est d’éviter que la prochaine session spéciale des Nations unies sur le sujet ne se perde dans les généralités. Car plus on généralise ce problème du désarmement, plus on le dénature. Un désarmement réel n’est concevable qu’en fonction de la situation internationale et aucunement par le recours insistant à de grands principes.
Depuis qu’existe la guerre les hommes ont rêvé d’en limiter les atteintes et les risques. Les cités grecques avaient élaboré les accords de Mycènes un siècle et demi avant notre ère ; les conciles de Clermont et du Latran ont cherché à proscrire l’emploi des armes les plus meurtrières de l’époque : au lendemain de la seconde guerre mondiale les États-Unis mettent en avant le plan Baruch… À chaque fois on oubliait qu’il n’y a pas de désarmement possible sans une paix fermement assurée. À notre époque cela s’appelle la détente, ou la coexistence pacifique. Les États-Unis qui ont une conception bipolaire du monde actuel se montrent particulièrement sensibles à cet aspect des choses. Il n’est guère de mois où leurs revues ne soumettent pas à leurs lecteurs des réflexions en ce domaine. La France, pour sa part, envisage le problème dans son ensemble et voudrait y intéresser tous les États. C’est ce qui ressort des propositions énoncées par le président Giscard d’Estaing.
Défense, détente, désarmement : trois éléments qui sont étroitement interdépendants mais sur l’envergure desquels subsistent bien des divergences selon les observateurs. C’est ainsi que Military Review du mois de décembre publie une étude du lieutenant-colonel John D. Backer Jr. avec pour titre : Détente, mythe ou réalité. L’auteur ne cache pas son irritation devant les conséquences de la politique de détente. Après avoir souligné qu’il y a un déphasage entre les conceptions américaine et soviétique en la matière, après avoir insisté sur ce qu’il estime être une incompréhension de l’Occident à l’égard des visées soviétiques, il constate : « La conviction que la détente se traduit par une absence de tension, un manque de rivalité, voire une convergence des intérêts, au point que les divergences idéologiques s’effacent, n’est pas fondée et ne correspond pas à la situation réelle. Cette attitude est le fruit d’un souhait sans consistance. Car pour l’Union soviétique la détente n’est qu’une étape vers la victoire du socialisme sur le capitalisme… Il suffit d’examiner les résultats concrets de la détente pour bien voir qu’elle a apporté de grands progrès à la position stratégique de l’URSS : progrès des forces conventionnelles du Pacte de Varsovie doublé d’un recul du niveau des forces stratégiques américaines ; progrès dans l’approvisionnement économique de l’Union soviétique au détriment du contribuable américain ; progrès dans la reconnaissance de facto de l’implantation soviétique dans les pays de l’Est, sans compter les apports de la technologie occidentale au développement de l’URSS… On ne peut écarter l’idée que la détente sert avant tout les desseins soviétiques, de manière unilatérale. Les acquis sont au bénéfice du Kremlin, il faut espérer qu’à l’avenir il en ira différemment. En avons-nous la volonté ? » Il va sans dire que nous laissons à l’auteur la responsabilité de cette interprétation.
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