Outre-mer - En Afrique occidentale, la Guinée renoue avec ses voisins - Namibie et Rhodésie : évolution ou impasse ?
La réconciliation intervenue à la mi-mars entre la Guinée et ses voisins, le Sénégal et la Côte d’Ivoire, était espérée et attendue depuis longtemps. Ses effets ne se feront pas seulement sentir sur les relations entre les États de la région mais encore sur les rapports franco-africains. Bien avant l’indépendance, les interférences n’ont pas manqué entre Paris, Dakar, Conakry et Abidjan. Au fil des ans, l’écheveau n’a cessé de s’embrouiller, les choses ont commencé à s’éclaircir il y a près de trois ans, avec le règlement du contentieux franco-guinéen. Il subsistait cependant l’hypothèque du désaccord persistant entre le président Sékou Touré et les chefs d’État du Sénégal comme de la Côte d’Ivoire : la voici levée. La Guinée sort d’un isolement qui lui coûtait. Tout l’y incite : son régime qui est apparemment bien implanté aujourd’hui, son économie qui jusqu’ici étouffait alors qu’elle dispose de ressources insuffisamment exploitées, mais aussi le fait que désormais les incompatibilités qui opposaient depuis plus de vingt ans des personnalités aussi tranchées que les présidents des trois pays s’estompent devant les déchirements dont souffre le continent.
Par simplification il est d’usage de faire remonter au coup d’État manqué de 1970 le différend ayant empoisonné les relations entre la Guinée et ses voisins. En fait, les liens se sont très vite détériorés, et pour de multiples causes. Au lendemain du référendum du 28 septembre 1958, le président Houphouët-Boigny, irrité de voir son ancien lieutenant faire cavalier seul, cherche à l’isoler et à faire échouer son expérience. Dès le mois d’octobre, il demandera l’exclusion du parti guinéen du Rassemblement démocratique africain (RDA) et ne fera rien pour que Paris adopte une attitude conciliante envers Sékou Touré. La tension ira croissante jusqu’en avril 1960, date à laquelle le chef d’État guinéen se rapproche de la Côte d’Ivoire à la faveur d’une brouille dans les relations franco-ivoiriennes (Abidjan et les pays de l’Entente avaient décidé d’accéder à l’indépendance sans conditions). L’année suivante, le président Sékou Touré nomme un ambassadeur à Abidjan puis, en octobre 1962, reçoit le président Houphouët-Boigny à Conakry laquelle réserve à son hôte un accueil triomphal. Deux ans plus tard, cette solidarité se concrétise à Monrovia où les chefs d’État de Guinée, de Côte d’Ivoire, du Liberia et de Sierra Leone créent une zone de libre-échange qui, du reste, n’existera jamais que sur le papier. On n’ira pas plus loin dans la coopération. En novembre 1965 un complot est découvert en Guinée. Les autorités en imputent la responsabilité au Conseil de l’Entente et à la France. Les deux pays, Guinée et Côte d’Ivoire, en viendront même à la mobilisation générale en 1966 après la destitution de Kwame Nkrumah au Ghana. Dès lors, les incidents se répéteront, et si un rapprochement se fait jour en 1970, grâce à des échanges sportifs, il se brise finalement sur le fameux complot du 22 novembre.
Le débarquement à Conakry ce jour-là d’un commando de soldats portugais et d’opposants n’a pas brutalement détérioré que les relations entre la Guinée et la Côte d’Ivoire. Les rapports sénégalo-guinéens en ont aussitôt pâti. Pourtant, au départ tout allait au mieux entre Dakar et Conakry : le président Sékou Touré considérait d’un œil favorable la fédération mise sur pied entre le Sénégal, le Soudan (français), la Haute-Volta et le Dahomey. Très rapidement ces deux derniers pays quitteront la fédération. Des maladresses diplomatiques, commises dans les meilleures intentions, vont ensuite contrarier le chef d’État guinéen mais les liens entre Dakar et Conakry s’altéreront gravement après l’éclatement de la fédération du Mali. Les Guinéens établis au Sénégal s’organiseront en dépit des mises en garde lancées par M. Sékou Touré. Une certaine détente apparaîtra en 1969 grâce au Comité inter-États des riverains du fleuve Sénégal mais tout est remis en cause en novembre 1970. Ce n’est plus le malaise, c’est la rupture avec son lot d’invectives, sa guerre des ondes et ses répercussions politiques dans la région.
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