Les marronniers de Boulogne
Alain Malraux est un neveu d’André Malraux et le fils de son frère Roland, mort en déportation en 1945. Mais il est aussi le beau-fils de l’écrivain, puisque sa mère, devenue veuve, devait épouser son célèbre beau-frère. Par ailleurs, André Malraux avait eu pendant la guerre deux fils, Gauthier et Vincent, d’une liaison avec Josette Clotis, interrompue par la mort tragique de celle-ci en 1944. En s’installant après la guerre à Boulogne, les Malraux décidèrent d’élever ensemble, auprès d’eux, les trois garçons. Ces cinq personnes ainsi réunies formaient, à vrai dire, un groupement familial assez compliqué et d’autant moins conformiste que la personnalité du chef de famille excluait absolument toute concession aux conventions et à la façon de vivre traditionnelle des milieux bourgeois.
Alain Malraux commence par nous raconter avec beaucoup de spontanéité et un réel talent, ce que furent son enfance et son adolescence dans l’ambiance quelque peu survoltée de cette maison pas comme les autres, mais où régna cependant, du moins jusqu’à la mort tragique de Gauthier et de Vincent, une certaine forme de bonheur plus ou moins partagé.
Mais à mesure que le récit se développe, c’est au comportement de celui qu’Alain a toujours considéré comme son père, que s’attache de plus en plus l’auteur. Et vers la fin, son livre se mue en une tentative d’explication psychologique globale de la personnalité profonde d’André Malraux telle qu’elle pouvait apparaître, au crépuscule de sa vie, à quelqu’un qui avait eu une connaissance intime des quelque vingt-cinq années précédentes.
Il y a certainement là un apport essentiel, tout à fait inattendu et original par sa forme, à la connaissance de l’un des maîtres à penser les plus prestigieux du XXe siècle. ♦