La Constitution de la Ve République
Jusqu’à présent, les documents concernant l’élaboration de la Constitution de 1958 n’avaient jamais été publiés. Ni les directives du général de Gaulle à Michel Debré, ni les instructions de celui-ci à ses collaborateurs, ni les différents projets de Constitution élaborés par Michel Debré, ni les discussions en Conseil des ministres n’étaient connus. C’est dire la difficulté à laquelle on se heurtait pour étudier la Constitution de la Ve République. Jean-Louis Debré, assistant à l’Université Paris-XI (et auteur d’un gros ouvrage sur Les idées constitutionnelles du général de Gaulle) a retrouvé ces documents.
Mais si son livre est important sur le plan juridique, il ne l’est pas moins sur celui de l’histoire politique, et il met notamment en lumière le rôle fondamental joué par le général de Gaulle dans la genèse et la mise au point de cette Constitution. En effet, alors que celle de 1946 avait été d’origine parlementaire et se présentait comme le résultat d’un compromis entre les partis politiques, en 1958 le général de Gaulle, qui s’était vu octroyer le pouvoir constituant moyennant l’acceptation de certains principes et d’une obligation de ratification par référendum, veilla à interdire toute ingérence du Parlement, en tant que tel, dans le processus d’élaboration constitutionnelle. Tirant les enseignements des contradictions dans lesquelles s’était enfermée une Assemblée dominée par le multipartisme, « le général de Gaulle devient alors le défenseur intransigeant du droit pour le Gouvernement d’élaborer une nouvelle Constitution ». Ce qui l’opposa alors aux députés fut le résultat de la confrontation de deux tendances. « Celle qui émane de l’Assemblée nationale et qui se matérialise dans le régime représentatif et la conception du général de Gaulle qui souhaite à cette époque un régime parlementaire rénové dans lequel la souveraineté appartienne effectivement au peuple »… (d’où le référendum)… « et dont les dispositions permettent de rétablir l’équilibre des pouvoirs ». Les principes fondamentaux une fois affirmés, le général de Gaulle souhaitait que les dispositions constitutionnelles soient suffisamment souples pour permettre les adaptations nécessaires. Aussi bien, en fonction de la personnalité du président de la République et de celle du Premier ministre, de la composition politique des Assemblées, de la concordance entre la majorité parlementaire et la majorité présidentielle, « la Constitution établit un régime qui peut être soit plutôt présidentiel, soit plutôt parlementaire ». Ce sont les dernières lignes de cet excellent ouvrage. ♦