À destins rompus
« Cet ouvrage, nous dit l’auteur, est né d’une succession de rencontres avec des hommes, des villes, des temples, des paysages, des idées, des dieux ». Rencontres enivrantes mais brèves – car l’habitude les aurait banalisées – et qu’il est préférable de rompre avant qu’elles aient épuisé leur pouvoir fécondant.
Tout comme le sphinx trapu de Hattush (Turquie) exprime « l’étonnement naïf d’être surgi de la pierre », le lecteur sera sans doute surpris des découvertes que lui réserve ce livre. Il trouvera en Benoist-Méchin un guide exceptionnellement averti pour l’aider à mieux comprendre les hommes et les monuments du Moyen-Orient. Ainsi des Romains colonisateurs, piètres sculpteurs, mais architectes de génie ; des Janissaires, enfants de partout mais élite de l’armée ottomane ; d’Atatürk, que nous connaissions déjà, mais qui, ici, prend un autre aspect, plus intime, plus personnel ; de Petra (Jordanie), ville importante fondée au IXe siècle avant notre ère, perdue pendant 15 siècles et retrouvée presque par hasard ; de Palmyre (Syrie), de ses curieuses « maisons d’éternité », et de sa reine Zénobie « la plus extraordinaire peut-être de l’histoire » qui reconstitua l’Empire romain d’Orient, régnant ainsi du Nil à l’Euphrate avant de se retrouver, déchue, dans les geôles de Rome ;… et de bien d’autres.
Aucun travail historique n’étant jamais achevé, Benoist-Méchin profite de ce dernier livre pour remettre au point – j’allais dire au goût du jour – certains de ses ouvrages précédents. Mais il revient sans cesse à l’Arabie dont on le sent envoûté, à ce pays où brûlent le soleil et la fièvre d’un peuple assoiffé de Dieu.
Et puis – enfin ! il fallait y venir ! – voilà le golfe Persique et ses puits de pétrole, ses émirats, les fantastiques richesses de ces États parfois grands comme un département français.
À destins rompus peut être utilement consulté avant de partir pour ces pays du Moyen-Orient que Benoist-Méchin sait si bien raconter. Une fois de plus le conteur n’a pas failli à sa légende et le lecteur referme son livre à regret. ♦