L’affaire Dreyfus
L’affaire Dreyfus a dominé l’histoire intérieure de la France à la fin du XIXe siècle. En son temps « elle a remué des foules, divisé les familles, séparé les amis », et la vague de passion qu’elle a soulevée déferlait encore à la veille de la Seconde Guerre mondiale.
Il est admis aujourd’hui qu’elle fut avant tout une lamentable erreur judiciaire. Mais n’a-t-elle été que cela ? Si l’on est sûr, en effet, que le capitaine Dreyfus était innocent du crime dont on l’accusait et qui le voua à la peine la plus infamante, l’on ignore encore l’origine de la pièce maîtresse de son procès : le fameux bordereau. « L’on ignorait »… devrait-on dire plutôt, puisque l’auteur de cet ouvrage nous livre la clef du mystère : une clef… il se peut en effet qu’il y en ait d’autres, mais celle-ci est d’un emploi si facile que l’on s’étonne de ne pas en avoir découvert soi-même le dessin.
Un général, vaguement prévaricateur, en tous les cas fort imprudent, manipule un agent double qui est bien évidemment une canaille. Des documents sont remis à l’attaché militaire allemand. Le service de renseignement en découvre le bordereau dans une corbeille à papier de l’ambassade, mais cette main gauche là ignore ce qu’a commis la main droite. Il faut un coupable. Ce sera Dreyfus. Cela tombe bien, il est juif et l’on a besoin d’une victime à immoler sur l’autel de l’antisémitisme. Lorsqu’on s’apercevra que l’on a fait fausse route, par lâcheté ou par mauvaise foi, l’on mentira et l’on mentira encore pour ne sauver qu’un mensonge prenant pour prétexte l’honneur de l’armée.
La révision du procès fait apparaître que le capitaine Dreyfus, malgré une étrange ressemblance d’écriture, n’a pas pu rédiger le bordereau, pas plus qu’Esterhazy d’ailleurs, dont on découvre quand même qu’il est le traître de ce répertoire. Alors qui ?
S’appuyant sur l’observation inédite de faits connus de tous et sur l’étude de documents normalement archivés. Michel de Lombares nous le dit, mais il n’est pas dans notre propos de dévoiler ici l’énigme de cette histoire policière. Michel de Lombares se défend pourtant d’avoir écrit un roman alléguant que rien n’y est imaginaire. Certes, force est de reconnaître en lisant cette thèse la précision rigoureuse de son expression et l’authenticité de ses sources, mais enfin d’une fiction romanesque, elle offre tous les rebondissements, le « suspense », le dénouement inattendu. Tout cela joint à la qualité de l’écriture fait de cette étude historique des plus sérieuses un livre passionnant. ♦