La Révolution algérienne
Ce livre comprend deux parties ; la première, la plus courte, est une explication des causes et un exposé de ce que l’auteur nomme « La Révolution algérienne » ; dans la seconde, sont réunis de nombreux documents, figurant comme des annexes justificatives de la thèse développée dans la première partie.
Cette thèse est clairement et vigoureusement menée. L’auteur considère que la situation actuelle de l’Algérie est due à l’implantation d’un grand colonat européen qui a empêché un développement harmonieux du peuple algérien, et agi dans le sens de ses intérêts matériels près du gouvernement français pour que celui-ci ne prenne pas la position d’arbitre entre la « nation française d’Algérie » et la nation « musulmane de France et d’Algérie ». Seul un arbitrage aurait pu empêcher la naissance et le développement de la question algérienne. Celle-ci se transforme en un dialogue « franco-français », cependant que le troisième personnage, longtemps muet, laisse paraître sa colère et la manifeste brutalement.
C’est donc bien davantage dans les faits passés que dans le présent que l’auteur cherche la justification de son opinion. La méthode est bonne ; mais elle entraîne, comme les autres, à des divergences, car le jugement que l’on porte sur des faits au moment où ils se déroulent ne peut pas ne pas être subjectif.
La synthèse et la démonstration qu’a tentées Charles-Henri Favrod ne paraîtront pas sans doute concluantes, même à ceux qui seront d’accord avec lui sur de nombreux points. Réduit à une seule explication l’exposé du problème algérien perd en exactitude ce qu’il gagne en clarté. Isolé du contexte mondial dans lequel il se pose, il n’est plus représenté que comme certaines reproductions indiquant un « détail » d’un vaste tableau ; mais le « détail » ne peut se comprendre que si l’on dispose aussi de la reproduction du tableau tout entier. Et c’est ce qui manque le plus au livre de Charles-Henri Favrod, que l’on lira cependant avec intérêt, comme un témoignage venant d’un étranger connaissant bien la France et désireux de donner une opinion nette. ♦