Les archives secrètes du comte Ciano (1936-1942)
Ce volume contient les conversations que le comte Ciano eut avec les ministres, ambassadeurs et hommes politiques étrangers, les procès-verbaux d’entretiens de Mussolini avec Hitler, Chamberlain, Schuschnigg, etc., des rapports, des télégrammes. Les plus nombreux de ces documents se rapportent à la période de 1936-1939 que le Journal politique du comte Ciano, précédemment publié, n’aborde pas. C’est donc un complément d’information très important que nous avons ici. Il forme un tout organique, car les événements s’enchaînent étroitement dans cette période d’attente puis de lutte, et les documents sont habilement reliés par des notes explicatives très précises qui font apparaître tout l’intérêt du texte présenté.
C’est l’affaire d’Éthiopie, la guerre civile en Espagne, l’Anschluss, l’annexion de la Tchécoslovaquie la destruction de la Pologne, nos revers de 1940 que nous retrouvons dans ce livre ; on le lit l’esprit tendu et le cœur serré. Mais, à mesure que l’on avance dans ce conflit qui devient mondial et que l’on voit se raidir la résistance des Alliés, combien il est captivant de lire ce qui se passait de l’autre côté de la barrière. Hitler semble avoir vraiment espéré que la conquête de la Pologne pourrait avoir lieu, comme celle de la Tchécoslovaquie, sans une intervention armée de la France et de l’Angleterre. Il pensait, encore en 1939, que la France, immobile derrière la ligne Siegfried, était disposée à conclure la paix ; il ne doutait pas, après la défaite des armées françaises, que l’Angleterre serait vaincue avant que les États-Unis puissent intervenir. Mal renseigné sur la Russie, il ignorait ses progrès militaires et industriels, il avoue, au mois d’octobre 1941, que « s’il avait eu même une pâle idée de ses armements, il n’aurait pas osé agir comme il l’a fait ».
Mussolini hésite longtemps avant de lier le sort de l’Italie à celui de l’Allemagne ; il n’ose pas réagir lorsqu’Hitler, sans l’avertir, annexe l’Autriche et la Tchécoslovaquie, et, peu à peu, il se laisse entraîner par la politique hitlérienne qui mènera l’Italie au désastre. Franco, disposé à soutenir l’Allemagne et l’Italie, cherche à faire payer très cher un concours qu’il finit par refuser lorsque la victoire de l’Axe lui paraît moins certaine.
Les événements auxquels il est fait allusion ici sont connus. Rien de bien nouveau ne nous est révélé. Mais ce qui est intéressant, ce sont les sentiments des acteurs de ce drame, l’évolution d’une politique qui, depuis la fin de 1941, se révèle chaque jour plus inquiète chez Hitler et chez Mussolini.