« Quiconque veut se faire une idée claire de l’imbroglio turc aura intérêt à lire cet ouvrage » ; le préfacier Hubert Védrine nous donne d’emblée le ton en rappelant que son auteur, qui fut ambassadeur de France à Ankara entre 1991 et 1996, est un des meilleurs connaisseurs de cette Turquie, si proche et en même temps parfois si éloignée de l’Europe.

La Turquie serait donc au cœur d’un « double imbroglio », pris entre son désir d’Europe et sa réalité sociale et politique qui en fait le champ d’affrontement de profonds bouleversements sociaux, démographiques, économiques et religieux.

Au-delà du combat pour la laïcité en terre d’islam, à travers duquel l’on a coutume de lire l’affrontement entre tradition et modernité, la Turquie, limitrophe du Caucase, du Moyen-Orient, de l’Europe orientale et de l’arc de crise irako-iranien, occupe une position géostratégique clé.

Cet ouvrage vient ainsi nous rappeler que parmi les nombreux dossiers déterminants pour l’avenir de la Turquie, bon nombre ne peuvent laisser indifférents l’Europe et l’Occident : questions kurde, chypriote et arménienne, statut de l’armée et rôle des généraux, laïcité et islam turc, croissance économique, appartenance à l’Otan, liens avec Israël, proximité avec la Russie…

Le diplomate français n’hésite ainsi pas à se faire plus « prosélyte » quand il s’interroge sur ce qu’aurait à gagner l’Union européenne à laisser indéfiniment à sa porte une puissance militaire et économique en plein développement qu’est la Turquie moderne. En bref, il en vient à se poser cette question de bon sens : la Turquie et l’Europe « pacsées » depuis déjà 45 ans, par le biais de l’accord d’association signé en 1963, peuvent-elles se passer l’une de l’autre ? ♦