Politique et diplomatie - L'été des décompositions ou la misère des nations
L’été 1991 consacre en Europe la fin de la grande illusion de 1989, celle d’un passage harmonieux de l’ordre des blocs à un ordre ouvert et démocratique. En novembre 1990, la Charte de Paris pour une nouvelle Europe fixait les principes, les mécanismes d’un continent réconcilié avec lui-même.
Or, l’été 1991, c’est d’abord la Yougoslavie. Ce laboratoire de l’Europe, selon la formule du ministre des Affaires étrangères, rappelle d’abord la profondeur, la complexité des identités nationales, des haines entre peuples. L’histoire de l’Europe n’est pas une ; elle est un composé mouvant d’histoires spécifiques (Europe occidentale, Europe centrale, Balkans…). La constitution d’un cadre paneuropéen n’abolit pas ces rythmes particuliers ; d’où l’extrême difficulté du dialogue entre la Communauté européenne et les acteurs de la guerre civile yougoslave : parlent-ils le même langage ? Les mots « nation », « liberté » ont-ils le même sens pour l’une et les autres ? La disparition du rideau de fer, si elle rétablit l’unité de l’Europe, fait surgir en même temps toutes ses contradictions.
L’été 1991, c’est également l’Union Soviétique. En août, l’échec du coup d’État conservateur confirme la mort du communisme et, plus précisément, du léninisme. Les putschistes, ultimes héritiers de Lénine, n’ont rien de ce qui, pour le fondateur de l’Union Soviétique, fait un révolutionnaire : clarté des objectifs, capacité de tout articuler en fonction de ces buts. Le putsch met en lumière l’extraordinaire poids qu’a acquis la télévision dans le gouvernement du monde.
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