Crise du service militaire (I) Pour une restauration de l'obligation militaire
Dix ans après la Libération, l’établissement de la Charte de la Défense nationale et la refonte de nos Forces armées divisent encore les experts. Cette indécision n’est pas sans danger : sans doute ne met-elle pas en péril la sécurité immédiate du Pays qui, sur le Continent, dépend davantage du système atlantique de défense intégrée que de la solution de ces querelles d’école, mais, à terme, elle constitue une menace pour le moral même d’une nation dont les responsabilités et les enjeux, dans l’Union Française, débordent largement le cadre atlantique.
Le public, en effet, — et il faut bien, dans la circonstance, désigner ainsi nos concitoyens, — ne veut pas entrer dans le jeu de controverses qu’il ne juge pas de sa compétence, et il sent confusément que la plus belle architecture, juridique ou administrative, de notre appareil de défense, — à supposer qu’il en existe une, — ne vaudra jamais que par la démonstration a posteriori de son efficacité.
Il y a pis. La nation, considérée dans ses rapports avec l’institution militaire, ne la connaît normalement que sous l’aspect de la conscription : jeunes recensés en vue de l’appel sous les drapeaux, recrues du contingent, réservistes avec ou sans fascicule de mobilisation, et jusqu’aux anciens libérés de toute obligation, sont techniquement et affectivement liés à l’armée par l’obligation militaire. Or, les atermoiements qui ont retardé la refonte de la Défense nationale se sont accompagnés d’une dégradation lente du service militaire, sans que le commandement absorbé par l’élaboration et la discussion de ses plans ait pris conscience que la matière vivante et le capital psychologique hérités des lois militaires de la République étaient en train de fondre entre ses mains. Nous en sommes arrivés au point que le service militaire, dans la France de 1955, est mis en cause, sinon remis en question, dans les cercles mêmes où se recrute le personnel dirigeant de la Nation et qu’une crise ouverte peut éclater à tout moment.
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