Réponse aux partisans d'une petite France
À la suite des déceptions de la guerre de Corée, le général Eisenhower a promulgué un « Code de Guerre du Soldat Américain ». Notre dessein n’est pas d’en entamer l’étude ou la critique. Laissant à d’autres le soin d’élaborer un code analogue, valable pour le soldat français, je retiendrai seulement de ce texte qu’un idéal — une foi ! — est nécessaire pour que le combattant accepte sans arrière-pensée de risquer sa vie. Le culte de la patrie, ou, à défaut, le culte de l’honneur militaire, même sous sa forme rudimentaire de l’esprit de corps (je songe à notre magnifique Légion Étrangère), engendrent ces miraculeuses vertus grâce auxquelles des milliers d’hommes, qui sont loin d’être tous des héros ou des saints, se précipitent au-devant de la souffrance et de la mort. Un combattant, s’il est persuadé qu’il défend une cause injuste, ou qu’il collabore à des actions déshonorantes, perd son efficacité ; car une telle conviction ruine en lui le sens de la discipline, et d’autant plus vite que son niveau moral est plus élevé.
* * *
J’ai l’air de développer des évidences ; et pourtant, à une époque où il s’avère que l’Armée française a et aura pour tâche primordiale de se battre afin de conserver l’Union Française, des camarades, et non des moins distingués, impressionnés par des hommes dont la résignation à la perte de notre grandeur est d’autant plus dangereuse qu’ils se sont souvent, au cours de leur vie, comportés en patriotes, expriment des doutes sur la légitimité de la cause qu’ils ont le devoir de défendre. J’espère leur montrer qu’ils sont victimes d’un idéalisme inquiétant ; oui, inquiétant ! Si je viens de proclamer qu’une Armée a besoin d’un idéal, il n’est pas bon que ses cadres soient composés d’idéalistes ; il lui faut, au contraire, des chefs trempés dans la réalité, et ces chefs doivent être persuadés comme leurs troupes qu’il leur a été confié une mission dont ils ont le droit d’être fiers.
Il reste 93 % de l'article à lire