Les récentes publications de tribunes attribuées à des militaires ou anciens militaires ont suscité de vives polémiques. Au-delà du questionnement soulevé par ces textes, il est important de réfléchir sur le droit d’expression, le devoir de réserve et la responsabilité intrinsèque du militaire dans la Nation. D’où la publication simultanée de trois réflexions proposant une approche croisée autour de ce thème, rédigées par trois officiers recouvrant le stratégiste, le chef opérationnel et l’historien militaire. Réflexions essentielles à l’heure où le débat politique s’intensifie alors que la France rentre dans une année de campagne électorale.
Subordination du Céma au pouvoir politique : pour rétablir certaines vérités (T 1280)
© Malaury Buis, Armée de l’air
The recent publications of forums attributed to soldiers or former soldiers have sparked heated controversy. Beyond the questions raised by these texts, it is important to reflect on the right of expression, the duty of reserve and the intrinsic responsibility of the soldier in the Nation. Hence the simultaneous publication of three reflections offering a cross-approach around this theme, written by three officers covering the strategist, the operational chief, and the military historian. Essential reflections at a time when the political debate intensifies as France enters a year of electoral campaign.
Dans l’ambiance délétère qui secoue les armées aujourd’hui, par la publication de « tribunes » périodiques, certains se sont crus autorisés de s’en prendre directement au Chef d’état-major des armées en exercice, pas toujours avec la courtoisie, la déférence ou même la simple politesse, de règle lorsque l’on s’adresse au plus haut chef militaire. Par ces écrits, certains excessifs voire outranciers (le Céma s’est même vu menacé de la foudre divine !), leurs auteurs voulaient dénoncer une situation qu’ils jugeaient comme une inféodation, coupable à leurs yeux, du Céma au pouvoir politique. Tout a été dit et répété sur la subordination du commandement au pouvoir. Il n’y a pas lieu de revenir sur ces notions, connues.
En revanche, il y a lieu de rappeler de manière concrète, le fonctionnement parallèle des institutions de l’État et de l’exercice du commandement. La règle est d’une simplicité biblique : de tout temps, ou du moins depuis l’instauration du régime parlementaire représentatif en France à la fin du XIXe siècle, la liberté d’action du chef d’état-major (quelles qu’aient été ses appellations au cours du temps) a toujours été conditionnée par le degré de confiance que lui manifestait, ou non, le représentant du pouvoir politique : ministre, Président du conseil ou président de la République, selon les époques. Il s’est agi d’une règle qui n’a souffert d’aucune exception, surtout en période tendue ou de crise.
L’objet de ce court article vise à rappeler, par des exemples, cette vérité première, et d’analyser comment les chefs d’état-major s’y sont pliés. Il est d’ailleurs possible de noter que ces notions s’appliquent dans les mêmes termes aux autres grands corps de l’État pour lesquels la problématique est exactement similaire, dès lors que l’on demeure dans la sphère régalienne du fonctionnement des institutions de l’État.
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