L’Institut Montaigne met en garde la défense française sur les nouvelles menaces géopolitiques
Militaires français lors du défilé du 14 Juillet (© AFP PHOTO / Fred Dufour)
Dans son rapport sur la défense, intitulé : Repenser la défense face aux crises du 21e siècle, paru ce mardi 9 février, l’Institut Montaigne met en perspective les capacités des armées à supporter les nouvelles menaces géopolitiques. Porté notamment par Nicolas Baverez et l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve (mais également de nombreux chercheurs et spécialistes des questions internationales et stratégiques), le document de près de 160 pages met en perspective les capacités actuelles des armées et les menaces internationales et géopolitiques des temps présent et futur. Le rapport pointe la sous-estimation de certaines menaces par la Revue stratégique de défense et de sécurité nationale de 2017, malgré sa récente Actualisation stratégique, présentée par Florence Parly le 21 janvier dernier, lors de ses vœux aux Armées, tout en soulignant les efforts à poursuivre et en émettant certaines propositions pour ce faire.
Constats, mises en garde, propositions
Le rapport de l’Institut Montaigne émet certains constats non-négligeables qu’il est heureux de rappeler. Les risques et les menaces stratégiques ont fortement évolué en une décennie, et il est primordial pour les armées (et les centres de décision) de parvenir à en prendre conscience. Et à agir en conséquence. Sans rigoureusement la remettre en question, le rapport – qui s’introduit pleinement en complément de l’Actualisation stratégique 2021 – met en lumière certains points qui n’ont pas été suffisamment valorisés en 2017 par la Revue stratégique. Telle, par exemple, la menace de la Turquie, vis-à-vis de l’Union européenne en général, de la France en particulier, d’un point de vue militaire.
Des propositions diverses : renforcer les moyens, favoriser l’autonomie stratégique, renforcer la présence internationale, encourager l’anticipation stratégique
Divisées en plusieurs points, les propositions du rapport tendent à la fois à innover et à renforcer les politiques mises en place en matière de défense en France et au sein de l’Union européenne. D’un point de vue intérieur, l’Institut Montaigne appelle à renforcer davantage l’appareil de défense, tout en mettant en garde sur les questions de finances publiques et de ressources humaines, et souligne la nécessité à avancer plus loin encore sur les questions de l’innovation. La Loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025, qui va dans ce sens, doit, selon le rapport, être soutenue tout en veillant à ces questions. Le rapport souligne le risque de remise en cause de la dynamique de la LPM dès 2023, notamment si le locataire de l’Élysée venait à changer ; et du fait des finances entachées par les dépenses dues à la gestion de crise de la Covid-19.
En matière purement stratégique, notamment sur la scène internationale, le rapport souligne la nécessité pour les forces armées de renforcer leur agilité stratégique et leurs capacités d’anticipation. Le spectre de la crise sanitaire internationale pèse sur le rapport, qui montre les failles liées à la capacité de mieux envisager et prévoir de telles crises et particulièrement ses conséquences. Pour les chercheurs de l’Institut Montaigne, « L’autonomie stratégique doit désormais s’appliquer à quatre nouvelles dimensions : sanitaire […] numérique, spatiale, et commerciale et financière ».
Pour ce faire, le rapport préconise une meilleure coopération à l’échelle européenne. S’il s’agit d’un aspect déjà mis en lumière dans la Revue stratégique de 2017, il est nécessaire, face aux crises nouvelles, d’encourager davantage la coopération à l’échelle de l’Union européenne, en tant qu’acteur international à part entière.
Ce rapport s’inscrit donc au début d’une nouvelle décennie, et renforce le constat d’un changement de paradigme du contexte et des menaces internationaux. ♦
Publié le 09 février 2021