11e étape – 7 juillet 2021 – Sorgues-Malaucène : le Mont Ventoux, sciences et défense
Le Mont Ventoux (Pixabay)
Sorgues, au nord d’Avignon, a apporté sa contribution à l’histoire militaire de notre pays sur le plan industriel, avec la fabrication d’explosifs. En 1915, pour faire face aux besoins croissants de l’artillerie sur la ligne de front qui s’est stabilisée, il faut accroître la capacité de production de munitions de gros calibre. Une poudrerie nationale est installée à Sorgues avec la construction de bâtiments industriels de grande dimension pour assurer cette montée en puissance de fabrication de la mélinite, un des composants indispensables pour les poudres. Cette filière industrielle existe toujours ; l’entreprise Eurenco, filiale de la SNPE (Société nationale des poudres et des explosifs), va investir 200 millions d’euros d’ici 2025 pour améliorer sa productivité. Eurenco Sorgues emploie 350 personnes.
Avignon a connu un riche passé militaire avec notamment le 7e Régiment du génie (RG) créé le 1er octobre 1894 et qui va occuper la caserne Hautpoul construite en 1865. Celle-ci est devenue la Cité administrative depuis 1950. Avant la Première Guerre mondiale, le régiment comprend 230 officiers, 1 200 hommes et… 3 000 chevaux. Le 7e RG est à nouveau à Avignon à partir de 1946, à la caserne Chabron, édifiée en 1892. Cette unité devient en 1984, le 7e Bataillon du génie de la Division alpine, avant d’être dissous en 1994.
Insigne du 2e Régiment étranger de génie
Allant vers l’Est, le peloton va passer à Apt et remonter vers le nord, traversant une zone calcaire quasi désertique mais qui a été au cœur de la dissuasion nucléaire avec le plateau d’Albion et ses 18 missiles SSBS (Sol-sol balistique stratégique) opérationnels de 1971 à 1996. Au début des années 1960, plusieurs sites ont été étudiés pour recevoir une base de lancement de missiles stratégiques à charge nucléaire. En avril 1965, celui du Vaucluse est choisi et les travaux débutent en 1966 pour construire 27 silos et 3 Postes de conduite de tir (PCT). Sur 785 hectares, la Base aérienne 200 (BA) dispose alors de toutes les installations pour assurer sa mission 24h sur 24, 365 jours par an. Seuls 18 silos et deux PCT sont construits. La chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide amènent le président Chirac à renoncer à cette composante de la dissuasion qu’il aurait fallu moderniser. La BA 200 va être en partie démantelée, tandis que le 2e Régiment étranger de génie (REG) s’y installe, le site s’appelant désormais Quartier Maréchal Koenig. Il abrite également des installations d’écoute de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) avec de nombreuses antennes, le radar Graves (Grand réseau adapté à veille spatiale) permettant de surveiller les objets spatiaux dans l’espace exo-atmosphérique. Graves, développé par l’Onéra (Office national d’études et de recherche aérospatiales), a été inauguré en 2005 et fait l’objet de modernisation pour poursuivre sa mission dans le cadre du Commandement de l’Espace, implanté à Toulouse. Les anciennes installations nucléaires servent également à la recherche scientifique avec le Laboratoire souterrain à bas bruit (LSBS) associant le CNRS et des Universités du sud de la France.
Après Sault, où le souvenir de la Résistance est vivace car la zone fut utilisée pour des parachutages d’armes au profit des maquis, le peloton affrontera les pentes du mont Ventoux culminant à 1 910 m. Site emblématique du Tour, le Ventoux dispose depuis 1882 d’un observatoire météo et d’installations de télécommunications avec sa tour culminant à 42 m au-dessus du sol. Ce site exceptionnel mais au climat rigoureux avec du vent environ 240 jours par an est occupé depuis 1945 par une quinzaine d’aviateurs, dépendant de la BA 115 d’Orange-Caritat pour assurer le fonctionnement du Centre radio sol-air (CRSA) qui protège l’espace aérien français. Une présence discrète mais indispensable !
Publié le 06 juillet 2021
Jérôme Pellistrandi