Eurosatory 2022, 27e édition : un Salon placé sous le signe du « Combat collaboratif aéroterrestre » pour le ministère des Armées
La maquette d'un hélicoptère Tigre est exposée non loin d'un Camion équipé d'un système d'artillerie (Caesar)
Du 13 au 17 juin 2022, des exposants venus du monde entier présentent au Parc des expositions de Paris-Nord Villepinte les nouveautés dédiées à la défense et à la sécurité terrestres et aéroterrestres. Cette édition est d’autant plus attendue que la précédente, celle de 2020, avait été annulée en raison de l’épidémie de la Covid-19 ; le secteur de la défense n’avait pas été épargné par les répercussions de la crise : Stéphane Mayer, président du Cidef (Conseil des industries de défense française), avait appelé en avril 2020 à un « plan de relance » pour la BITD (Base industrielle et technologique de défense) afin de soutenir ces acteurs. Un rapport d’information de l’Assemblée générale datant du 29 octobre 2020 soulignait la double nature du défi qui se présentait alors aux industriels de la défense : une « crise de l’offre », frappant particulièrement les très petites entreprises, pourtant maillon essentiel dans la chaîne d’approvisionnement ; et une « crise de la demande », impactant notamment le secteur aéronautique.
C’est un horizon composé de véhicules blindés, de munitions, de drones, d’équipements ou encore d’hélicoptères qui se dévoile aux visiteurs, tandis qu’ils descendent dans le hall 6 : au total, ce sont 1 800 exposants internationaux qui offrent en un même lieu une illustration des outils de la défense de demain. Comme le rappellent Marc Darmon, président du Gicat (Groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres) et Charles Beaudouin, directeur général du Coges (Commissariat général des expositions et salons du Gicat), la guerre en Ukraine a accentué la nécessité de se préparer activement aux conflits de demain.
Ainsi, l’espace dédié au ministère des Armées français (stand F30) place l’accent sur le « Combat collaboratif aéroterrestre » : les diverses technologies présentées, illustrant une capacité aéroterrestre approfondie, entrent dans le contexte de la Vision stratégique développée par le chef d’état-major des armées (le général Burkhard) en octobre 2021, plaçant l’effort sur les préparatifs à la haute intensité, ainsi que des objectifs de la Loi de programmation militaire 2019-2025 – une Loi qu’Emmanuel Macron a appelé à réévaluer dans son discours du lundi 13 juin 2022, à l’occasion du premier jour du Salon. Dans une logique incrémentale, les capacités opérationnelles des armées sont améliorées, notamment grâce à l’infovalorisation (configuration permettant d’exploiter au mieux les données dans un cadre opérationnel), et à la dimension interarmées et collaborative.
Exemples de cette ambition : le futur du réseau satellitaire grâce à l’introduction de Syracuse IV (qui remplacera Syracuse III lancé en 2005), composé à terme de trois satellites (dont un déjà lancé) : Syracuse IV permettra de disposer d’un meilleur débit, d’une plus grande disponibilité, ainsi que de plus de protection contre les attaques cyber et le brouillage ; toujours dans une logique de communication plus performante, la radio logicielle V/UHF (Thales) sera amenée à remplacer l’actuelle, le PR4G (Poste de radiocommunication de 4e génération). Ces technologies équiperont ainsi les hélicoptères H160M Guépard (une commande du gouvernement français en 2021 à Airbus va permettre d’ici à 2027 la création de 169 nouveaux hélicoptères, en collaboration avec Safran qui fournira les centrales de navigation SkyNaute) et autres véhicules composant le programme Scorpion (Synergie du contact renforcé par la polyvalence et l’infovalorisation).
Un espace du stand est également dédié au programme Titan, ambition de l’Armée de terre à l’année 2040, entrant en droite ligne de l’ambition développée plus haut, se positionnant au carrefour de cette volonté interarmées, multi-domaines et collaborative : ainsi, la supériorité de demain reposera sur le développement des secteurs suivants, cœurs de réflexion dans le développement de Titan : les capteurs, le flux d’informations, la gestion du nombre de données, la cyber-électronique, l’intelligence artificielle, le soutien à l’entraînement et à la décision… L’un des éléments de ce programme Titan est le char de combat MGCS (Système principal de combat terrestre), réalisé en collaboration avec l’Allemagne – l’Armée de terre pouvant ainsi remplacer son char Leclerc, et la Bundeswehr son char Leopard 2. Mais ce projet a malheureusement fait ressortir les difficultés que peuvent rencontrer les industriels de la défense : des difficultés qui ont ainsi été illustrées à l’occasion de l’Eurosatory 2022, lors de la présentation du char de combat KF-51 Panther réalisé par Rheinmetall, véritable concurrent du MGCS, avec de surcroît l’accord du BAAINBw (Bundesamt für Ausrüstung, Informationstechnik und Nutzung der Bundeswehr), direction générale de l’armement allemand. Cette situation entre les acteurs franco-allemands a notamment pris racine sur fond de mésentente à propos des canons équipant les chars.
Entre désaccords commerciaux, crise sanitaire toujours actuelle et contexte géopolitique fortement impacté par la guerre en Ukraine, la défense et la sécurité sont des domaines plus que jamais valorisés et mis sur le devant des priorités. Le prochain salon Eurosatory aura lieu en 2024 : une courte échéance pour le domaine de la défense, mais une date lointaine eu égard aux évolutions stratégiques internationales. ♦
Publié le 17 juin 2022
Margaux Latarche-Bertrand