5e étape – 6 juillet – Lille-Arenberg : fortifications et sièges
Siège de Lille en 1914 - Attaque de la porte de Douai (© Carte postale d'après un dessin d'O.J. Olbertz / Wikimediacommons)
Carte du parcours de la 5e étape du Tour de France (© ASO)
La ville de départ du 6 juillet est une place majeure entourée de remparts bastionnés comprenant la Reine des Citadelles au centre d’une ceinture de 13 forts. Ville fortifiée, Lille a connu dans son histoire militaire plusieurs sièges.
Le siège de 1708 fut la principale opération militaire de la guerre de Succession d’Espagne commencée en 1702. Les Anglais et leurs alliés souhaitaient, après leur victoire à Audenarde, affaiblir davantage les Français en lançant le siège de la citadelle lilloise, ouvrage de Vauban. Il fut lancé le 28 juillet par les troupes impériales du Duc de Marlborough contre les troupes françaises dirigées par le maréchal de Boufflers. Les 75 000 Français face à l’ennemi, supérieur en hommes et en munitions, se retranchèrent dans la citadelle du 22 octobre jusqu’au 8 décembre 1708, date de l’abandon de la citadelle et donc de leur capitulation. Ce siège fut une victoire pour les armées impériales qui prirent la ville et récupérèrent la Flandre du Nord. La France et Paris se retrouvèrent en proie à une invasion, Lille étant le verrou de sécurité sur la route de la capitale.
Cette opération fut particulièrement connue pour « l’affaire des poudres », pied de nez aux assiégeants. Deux mille cinq cents cavaliers et chevaliers du Luxembourg avaient pour but d’approvisionner en armes et en poudre la ville encerclée par deux lignes d’ennemis. Malgré la réussite de ce fait d’arme, les assiégeants n’étaient en rien affaiblis et continuaient leurs attaques. Lille redevient française après le traité d’Utrecht en 1713.
Plan de Lille (© Gallica / BNF)
En guerre contre le Saint-Empire romain germanique et ses États, Lille fut de nouveau assiégée en 1792. La place, défendue par le général Ruault, fut investie, le 23 septembre, par le duc Albert de Saxe-Teschen. Face au refus des habitants de faire reddition, la ville fut bombardée à partir du 30 septembre. Mais les bombardements ne firent pas céder les habitants. À bout de munitions et sous la pression des armées révolutionnaires, les Impériaux finirent par lever le siège le 5 octobre. Pour leur résistance, les représentants de la Convention nationale proclamèrent : « Les habitants de Lille ont bien mérité de la patrie ».
Durant la Première Guerre mondiale, Lille subit également un siège du 11 au 12 octobre 1914. Dans le cadre de l’opération course à la mer menée par les Allemands, Lille fut prise et occupée après d’intenses bombardements. La défense militaire de Lille apparut comme illusoire en 1914 face au progrès de l’artillerie. Ainsi, au début de la guerre, Lille fut laissée désarmée, ne semblant avoir aucune importance et fut déclarée ville ouverte.
Face à la menace allemande qui se déplaçait et s’étalait sur la ligne Douai-Lille, la défense de la ville fut renforcée sous le commandement du lieutenant-colonel de Pardieu. Cependant, face à la situation jugée désespérée – la ville est encerclée par 50 000 hommes –, de Pardieu reçut l’ordre de quitter la place ; mais, un contre-ordre fut donné le soir par le général Foch (1) qui décida finalement de défendre la ville, ainsi de Pardieu dut revenir, le 10 octobre. Ce retour s’effectua dans une grande confusion avec peu d’hommes et d’artilleries, alors que les Allemands commencèrent leur offensive le soir-même.
Le lendemain, le général Von Olenhusen fit une sommation au commandant de la place de se présenter avec le maire. Mais, les Français ne donnant pas de réponse, les Allemands bombardèrent le sud-est de la ville dans la nuit. Le quartier de la gare fut détruit et un incendie se déclara.
Le général Foch lança une offensive pour secourir Lille. De leur côté, les Allemands cherchaient à obtenir la reddition des Français qui refusèrent. Mais l’envoi d’un émissaire pour cette demande permit aux Allemands de prendre connaissance des faiblesses françaises. Les Allemands lancèrent des attaques repoussées au départ par les armées françaises, mais les renforts n’arrivant pas, les Français se retrouvèrent en difficulté.
Les Allemands concentrèrent donc leurs tirs sur la porte Douai, la moins bien défendue. Lille fut investie malgré la résistance. Face aux Allemands, le commandant fit hisser le drapeau blanc sur la tour de la Treille.
Par la suite, Lille fut occupée pendant quatre ans dans des conditions assez terribles, et la ville servit de base arrière pour l’occupant. Le siège et l’occupation survirent après une période de confusion, alternant ordres et contre-ordres du commandement français. Les exactions allemandes, d’octobre 1914 à octobre 1918 furent brutales avec de nombreuses exécutions.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Lille fut également occupée par les nazis pendant plus de quatre ans, du 31 mai 1940 au 4 septembre 1944.
Les troupes allemandes du général Wæger, dans le cadre de la bataille de France, encerclèrent Lille défendue par les troupes du général Moliné. Une poche de Résistance s’organisa, composée de 35 000 à 40 000 soldats retranchés dans la citadelle. Malgré une résistance adverse et la capture du général Kühne, la ville tomba aux mains des Allemands le 31 mai. La bataille de Lille se termina officiellement le 1er juin avec le défilé des troupes françaises et britanniques en armes devant les Allemands. Cette action fut reprochée par Hitler car elle aurait ralenti la progression allemande vers Dunkerque leur rendant les honneurs face à leur courage. Churchill estima que ce siège avait donné cinq jours de répit à l’opération Dynamo.
La vie militaire de Lille est aujourd’hui principalement marquée par la présence du 43e régiment d’infanterie (RI) et du Corps de Réaction Rapide France au sein de la citadelle de Lille du commandement des forces terrestres (CFT), en charge de la préparation opérationnelle de l’Armée de terre.
Cette étape passera par un ensemble fortifié, indispensable lors de la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit du fort Maulde, bastion de la ligne Maginot (2). C’est un fort de type Séré de Rivières situé sur la ligne de fortification Lille-Maubeuge. Il a été construit en 1880 et fait partie d’un ensemble comprenant deux autres forts d’arrêt, ceux de Flines-les-Mortagne et Curgies.
Toutefois, l’amélioration de l’artillerie rendit obsolète ce type de fort, qui fut déclassé en 1912. Il fut néanmoins réarmé pendant la Première Guerre mondiale et fit office de prison.
Sa position stratégique fit de lui un atout déterminant dans la perspective d’un nouveau front à partir de 1935. On y concentra d’importants moyens de feux dans une organisation défensive plus large de la rive gauche de l’Escaut. En 1936 et 1937, trois casemates d’artillerie furent édifiées sur le site de Maulde. Cet ensemble fut complété par un observatoire intégré dans l’ancien fort Séré de Rivières. L’ensemble fut occupé par le 54e régiment d’infanterie de forteresse, composé de trois compagnies : les 106e, 107e et 108e Compagnies d’Equipages d’Ouvrages (C.E.O). Le régiment fut commandé par le lieutenant-colonel Delcure.
Du lundi 20 mai au lundi 27 mai 1940, le fort de Maulde a été pris dans la tourmente de la campagne de 1940 et fut abandonné après huit jours de combat par le capitaine Schwengler. Après 1940, le Fort de Maulde fut utilisé par les occupants pour des essais d’effets d’explosifs, laissant des dégâts importants.
Le 24 juillet 1712, alors que la France fut enrôlée dans la guerre de Succession d’Espagne, une bataille se tint à Denain, lui accordant une victoire nécessaire pour négocier une paix favorable après plusieurs défaites. La guerre de Succession d’Espagne avait commencé depuis 1701, et la France se trouvait dans une période très compliquée sur le plan financier et militaire. Les places fortes du Nord étaient presque toutes sous contrôle Austro-Anglais. Le commandement des armées du Nord fut donné au maréchal de Villars. En 1712, il décida de reprendre l’offensive. Pour reprendre l’initiative, il lança une attaque sur Denain. Ils menèrent une opération de diversion en envoyant des hommes en direction de Landrecies où se trouvait le prince Eugène afin que les ennemis renforcent leurs troupes sur ce point et ainsi allègent l’aile droite de Denain. Le reste des troupes françaises furent envoyées vers la Selle pour lancer l’assaut de la palissade. Les ennemis, surpris, s’enfuirent. Mais dans leur fuite, ils encombrèrent le pont du moulin qui s’écroula sous leur poids. Les Français réussirent à repousser pendant plusieurs heures les assauts autrichiens. Le prince Eugène ne pouvant plus contre attaquer, Denain resta aux Français.
La France remporta ainsi une victoire décisive qui eut une grande influence dans le règlement de la guerre. En 1781, le roi Louis XVI fit ériger à proximité de Denain une pyramide destinée à rappeler cette victoire bienvenue par son aïeul, Louis XIV. ♦
(1) Mantoux Étienne, « Un centenaire. Le général Foch », RDN, n° 85, octobre 1951, p. 309-319 (https://www.defnat.com/e-RDN/vue-article.php?carticle=549&cidrevue=085).
(2) E.J Debau, « La fortification a-t-elle vécu ? », RDN, n° 82, juin 1951, p. 623-637 (https://www.defnat.com/e-RDN/vue-article.php?carticle=530&cidrevue=082).
Publié le 06 juillet 2022
Jérôme Pellistrandi, Marie Toiron