Tour de France 2022 : 11e étape – 13 juillet – Albertville-Col de Granon : les Alpes face à la menace italienne
Vue panoramique d'Albertville depuis Conflans (© Florian Pépellin / Wikimediacommons)
La 11e étape traverse les Alpes, région stratégique qui a vu se bâtir de nombreux forts à la pointe de ses sommets. Située au cœur de la Savoie, Albertville apparaît comme essentielle dans la défense de la France face aux menaces venues d’Italie.
À la fin du XIXe siècle, l’Italie unifiée devint une menace pour les Alpes, et la formation de la Triplice en 1892 (Empire allemand, Autriche-Hongrie et Royaume d’Italie) la concrétisa. Les fortifications françaises devaient être repensées pour y faire face. C’est ce que fit le général Séré de Rivières qui, en 1874, imposa au Comité de Défense un nouveau système de protection. Ainsi, il organisa la place d’Albertville avec plusieurs forts et ouvrages, placés et étagés autour de la ville.
Trois types d’ouvrages principaux se complétaient en vue de couvrir la plus large surface possible : des ouvrages d’interdiction qui barraient les fonds de la vallée, des ouvrages de protection à flanc de montagne avec un champ de tir large, et des ouvrages de surveillance sur les crêtes.
Parmi ces forts, celui du Mont fut bâti à partir de 1877 pour contrer une éventuelle invasion italienne. L’armée l’occupa jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Construit à 1 130 mètres d’altitude, il se montrait propice à la surveillance de l’ennemi et aux tirs d’artillerie de longue portée. Il remplissait ainsi pleinement sa fonction protectrice.
Deux ans après sa construction, la défense du flanc Est fut complétée par l’édification de deux ouvrages : le blockhaus de Laitelet et le blockhaus des Têtes.
Le système Séré de Rivières reposait sur la construction de forts conçus et équipés de façon à tenir un siège de trois mois. Ils disposaient d’une longue autonomie en vivres, eau, matériel médical, et munitions. À titre d’exemple, le fort du Mont pouvait accueillir jusqu’à 400 soldats et 72 tonnes de poudre.
L’avantage premier de ce fort était sa faible visibilité, et donc son exposition minime aux tirs ennemis. Inséré au relief naturel, il répondait à « l’art du défilement ». Son altitude lui permettait également de ne pas être atteint. Toutefois, le fort du Mont n’a jamais connu de combat.
Route du col du Granon (© Anthospace / Wikimediacommons)
Comme Albertville, le col de Granon fut aménagé à la fin du XIXe siècle face à la menace italienne. La position était composée du fort de l’Olive, des retranchements dits de Berwick, d’emplacements d’artillerie pour défendre le passage vers le fort, et des bâtiments pour abriter les soldats. Le fort de l’Olive était également un fort Séré de Rivières servant à contrer d’éventuelles offensives italiennes.
La position fut renforcée pendant l’entre-deux-guerres en raison de la montée des tensions avec l’Italie. L’ouvrage du col de Granon s’inscrivit dans la ligne Maginot. L’idée était de stationner des unités sur place afin d’assurer la défense des Alpes. Il permettait de barrer le col de Granon afin d’éviter tout contournement des forts de Briançon et de couper la route de Grenoble. Plus largement, il servait à arrêter toute progression des forces de l’Axe.
L’ouvrage de Granon n’a pas été touché par les combats de juin 1940, et il n’a pas non plus été occupé par les forces de l’Axe. Mais les maquisards s’y étaient réfugiés entre le débarquement de Provence, le 15 août 1944, et la libération de Briançon (1), le 6 septembre 1944.
Aujourd’hui, le col du Granon sert de terrain pour des exercices militaires, notamment pour le 7e bataillon des chasseurs alpins (2). ♦
(1) Franc Claude, « Histoire militaire – La libération des Alpes : juin-septembre 1944 », RDN, n° 825, décembre 2019, p. 115-123 (https://www.defnat.com/e-RDN/vue-article.php?carticle=22228&cidrevue=825).
(2) Bordeaux Henri, « Les chasseurs alpins », RDN, n° 8, janvier 1940, p. 3-19 (https://www.defnat.com/e-RDN/vue-article.php?carticle=42&cidrevue=008).
Carte du parcours de la 11e étape du Tour de France (© ASO)
Publié le 13 juillet 2022
Jérôme Pellistrandi, Marie Toiron