Sans rechercher le sensationnel, cet ouvrage préfacé par Alain Bauer, donc par un connaisseur, impose et mérite une lecture attentive.
C’est ainsi, en excluant les généralités, qu’on s’efforce d’y définir avec précision ce qui ne va pas tellement de soi, à savoir les deux termes utilisés dans le titre : « renseignement » et « criminel ». Dans l’application ensuite, on a affaire à deux métiers « distincts mais indissociables », la recherche et l’analyse. Il faut anticiper, hors de toute « myopie professionnelle », et dépasser les « outils traditionnels » par la pratique du « décèlement précoce » et ne plus se limiter à la « finalité judiciaire immédiate ». En outre, la synthèse est indispensable entre la multitude des fichiers, tout en sachant que la circulation en boucles conduit au risque d’intoxication mutuelle. Des « nuages annonciateurs » existent souvent ; ont-ils été suffisamment perçus avant Pearl Harbour ou le 11 septembre ? N’oublions pas en outre que la fin de la Guerre froide n’a pas amené automatiquement un état de paix mais semble bien avoir au contraire débouché sur un monde chaotique où « l’ennemi ne va plus de soi ».
On voit donc, pour reprendre les termes utilisés par les auteurs, qu’il ne faut plus partir du fait criminel pour remonter ensuite à l’auteur du fait mais agir selon un processus inverse. Une telle méthode de « ciblage » est certes susceptible de heurter les principes de libertés publiques et de présomption d’innocence. Elle impose donc désormais l’engagement et la caution du politique en place d’une simple orientation policière ainsi que l’assurance d’une continuité protectrice. A titre d’illustration, sans négliger les évidents talents britanniques, ni les mafias italiennes, les auteurs mettent l’accent d’une part sur la prolifération balkanique et albanaise, d’autre part sur l’organisation belge, apparemment en avance sur son temps.