Julian Lindley-French, vice-président de l’Association du Traité de l’Atlantique (ATA) et William Hopkinson, ancien directeur adjoint du Royal Institute of International Affairs (Chatham House) et ancien Secrétaire d’État adjoint au ministère de la Défense britannique, s’attellent dans cet ouvrage à proposer une vision cohérente des évolutions géostratégiques au Moyen-Orient et à présenter un plaidoyer pour une nouvelle stratégie audacieuse, qui permettrait de mettre fin aux multiples déchirures que connaît cette région.
Parmi les puissances impliquées dans le conflit qui fait rage sur le théâtre irako-syrien, les auteurs distinguent trois catégories d’acteurs. En premier lieu, les « démons » désignent un large éventail d’acteurs nuisibles qui cherchent à imposer leurs pratiques religieuses et leurs dogmes dans les territoires conquis avec des implications pour l’ensemble de la région et de l’Afrique du Nord. Deuxièmement, les « dragons » englobent les puissances régionales qui sont parties au conflit. Enfin, les puissances globales, pour lesquelles le Moyen-Orient est le théâtre d’une lutte géopolitique sans merci, peuvent être considérées comme de nouveaux « super-dragons ». L’analyse des interactions entre ces trois catégories d’acteurs permet de discerner les évolutions futures qui se profilent déjà dans la région.
Si tant est que les dirigeants occidentaux souhaitent sincèrement mettre fin au conflit, à la tragédie humanitaire et à la crise des migrants qui en découle et déstabilise nos sociétés, un changement radical de politique va s’imposer. Ce changement pourrait prendre la forme d’un nouveau Plan Marshall pour le Moyen-Orient comme le souhaite d’ailleurs le général John Allen, qui préface cet ouvrage. Il fut commandant en chef adjoint de US Centcom et émissaire spécial du Président des États-Unis pour la coalition contre l'État islamique (septembre 2014 - octobre 2015).
Il n’y aura en effet pas de solution militaire aux conflits de la région et le terrorisme ne cessera pas. Seule une « Grand Strategy » mise en place par la nouvelle Administration américaine et impliquant des investissements de plusieurs milliards de dollars sur une longue période – sans doute plusieurs décennies – pourrait, à ce stade, sortir la communauté internationale de l’ornière. Ce plan devrait être mis en œuvre par des acteurs régionaux et non pas imposé par les puissances occidentales. La participation de l’Iran et de la Russie pourrait même être envisagée. Un tel plan constituerait le plus grand des défis pour la génération de dirigeants politiques qui a émergé dans le contexte de l’après-guerre froide. Il va désormais s’agir pour eux de mener une véritable réflexion prospective hors des sentiers battus.
« Si nous n’agissons pas, nous serons condamnés à subir une nouvelle guerre de Cent Ans, qui cette fois-ci sera globale… », avertit le général Allen.