Les Éditions First publient une collection au slogan trompeur : Pour les nuls vise l’honnête homme de notre temps et le livre que voici eût pu y trouver place. C’eût été le célébrer justement. Certes, le titre de l’ouvrage annonce mal son contenu, lequel est plus le comment que le pourquoi. Mais l’auteur est ici à son affaire ; il enseigne à « Normale sup » la stratégie nucléaire, sujet qui ouvre la porte à une dialectique sans fin.
Nicolas Roche démarre bille en tête. Au risque de dévaloriser la théorie qu’il va développer, il rappelle deux cas concrets, comme l’on dit dans nos écoles, l’arme chimique syrienne, la crise ukrainienne. Suivent quatre parties, la dissuasion française, la « grammaire » générale de la dissuasion, les équilibres régionaux (Inde-Pakistan, Corée du Nord, Chine, États-Unis en Asie), l’hypothèse d’une dissuasion non nucléaire. En conclusion, l’auteur aborde – il était temps – le cœur du sujet : rapports, en la matière, du droit et de la morale. Arrêtons-nous sur ce sujet impossible.
Il est traité avec une grande délicatesse. L’Europe, fidèle à elle-même, se distingue ici du reste du monde : elle met en œuvre une conception progressiste du système international. Elle prend en compte l’évolution de celui-ci, dont Daesh est la personnification la plus inquiétante. Elle reste pourtant adossée à l’horreur absolue qui est le fondement de la dissuasion nucléaire.