Spécialiste de l’histoire de la marine, Boris Laurent nous décrit la bataille des convois arctiques à destination de l’URSS, le « Murmansk Run ». À partir d’août 1941, les premiers convois livrent à l’URSS, carburants, pièces détachées, blindés, avions, vêtement et nourriture. Ils empruntent deux axes : la route du Pacifique (vers Vladivostok) et la route arctique. À partir de 1942, s’ajoutera le corridor persan via l’Azerbaïdjan. L’Arctique apparaît très tôt comme la voie la plus rapide. Il permet d’atteindre relativement vite les ports soviétiques d’Arkhangelsk, et surtout de Mourmansk, libre de glace toute l’année (Arkhangelsk est gelé de novembre à mai). Mais c’est aussi la voie la plus dangereuse…
La ville de Mourmansk est officiellement fondée le 4 octobre 1916 sous le nom de Romanov-sur-Mourman. C’est la dernière ville fondée par l’Empire russe. La même année, un chemin de fer la relie à Saint-Pétersbourg. Mourmansk reste encore de nos jours la plus importante ville située au-delà du cercle polaire.
De 1941 à 1945, près de 4 millions de tonnes de fournitures, d’équipements et de vivres parviennent ainsi à l’URSS, dont 7 000 avions, 5 000 chars d’assaut, des camions, des pneus, des médicaments. La Kriegsmarine et la Luftwaffe feront tout pour s’opposer à ces convois en coulant un total de 98 bâtiments alliés. À lui seul, le convoi PQ-17 perd près de 30 navires durant le seul mois de juillet 1942.
Les navires et les équipages alliés qui réussissent le voyage ne sont pas au bout de leurs peines, car après les sous-marins et les bombardiers allemands, il leur faut affronter la bureaucratie soviétique qui retarde le déchargement des marchandises. Il faut deux mois pour décharger un navire à Mourmansk ou à Arkhangelsk, quelques semaines partout ailleurs. Record absolu, un cargo américain passera même huit mois à Mourmansk en attendant son déchargement, le tout sous les bombardements allemands.
La taille des convois est variable même si l’on peut considérer qu’un convoi type se compose de 48 navires répartis en 8 lignes de 6 bâtiments. Les navires marchands sont au centre, entourés par leur escorte rapprochée (destroyers, corvettes, dragueurs de mines…). Les croiseurs légers naviguent quelques milles plus en avant.
En général, chaque route empruntée par les convois est désignée par un code composé de deux ou trois lettres suivies du numéro du convoi. Au début, les convois arctiques sont désignés par les lettres PQ à l’aller et QP au retour. Ces codes seront ensuite modifiés respectivement en JW et RA. En général, un convoi navigue à huit nœuds. Le trajet prend au minimum huit jours (2 780 km pour Mourmansk).
Les U-Boote qui les attaquent connaissent souvent des problèmes de mise à feu avec leurs torpilles, au point qu’en juin 1942, l’amiral Dönitz note dans son journal que les lancements effectués par ses sous-marins sont moins efficaces que ceux des sous-marins de la Grande Guerre. Malgré cela, le taux de perte des équipages de navires marchands sera plus élevé que celui des équipages des navires de guerre alliés.
Un livre passionnant sur un théâtre méconnu de la Seconde Guerre mondiale. ♦