
Jean Éric L., lieutenant gendarme dans la Garde républicaine, publie un recueil de son Opération extérieure (Opex), la 5e déjà, de son opération au sein de l’ONU, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma).
Il aborde le récit d’une vie aux antipodes de nos modèles occidentaux, marquée par un décalage entre les véritables problèmes que connaissent le Mali, ses habitants, la coalition et les revendications parfois futiles ou grotesques selon le point de vue que connaît notamment la France en 2019…
Le contraste est saisissant entre la réalité du terrain au Mali, et ce que peuvent dire les médias.
Cette opération met en lumière la difficulté d’unifier le Mali un pays miné par des discordes historiques entre les différentes ethnies (touareg, songhaï…). Les interventions étrangères sont elles aussi extrêmement complexes, car l’amitié que portent les populations aux armées diffère parfois en fonction d’un quartier ou d’un village à l’autre !
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’auteur nous dépeint un Mali bien différent de l’imaginaire collectif, la réalité quotidienne du pays et de ses habitants est bien éloignée de l’image qu’en véhiculent la plupart des médias et la vision qu’en ont les populations occidentales.
C’est donc sans filtre qu’il exprime ce qu’il ressent sans complaisance ou souci de plaire.
Comme toujours des questions émergent sur le rôle des forces de maintien de la paix dans ce type de conflit moderne, et y répondre est souvent complexe.
Le soldat de l’ONU, alterne missions d’assistance humanitaire et combat face à des populations qui l’accueillent les bras ouverts ou les armes à la main, le maintien de la paix et la volonté de « gagner les cœurs », sont donc rendus extrêmement difficiles.
Le témoignage permet de se placer au plus près des soldats eux-mêmes alternants doutes, excitation, stress, manque de préparation, formation, (pour certains des collègues du lieutenant). Le récit est particulièrement fidèle et détaillé sur la situation que vivent les militaires et dans une moindre mesure les populations rencontrées.
Il nous rappelle aisément les questions à laquelle a dû faire face la coalition et plus particulièrement la France, pendant près de 10 années de présence sur le sol malien.
Alors que son intervention fut un indéniable succès militaire, son récent repli, sonne comme un échec, qui pourtant n’est pas le reflet des progrès et de la popularité qu’elle avait acquis après avoir débarrassé les populations à l’époque des agressions djihadistes.
Aujourd’hui que peut-on penser ? Est-ce un conflit sans fin qui, dans une moindre mesure rappellerait l’Afghanistan ?
Bien que l’on dispose de nombreux éléments, grâce à ce qui nous est transmis sur ce conflit, il serait très certainement présomptueux de donner une réponse définitive sur le sujet.
Les facteurs à prendre en compte sont évidemment pluriels, cependant comme le rappelle souvent Jean Éric L. pour comprendre il faut voir, et vivre ce qu’il se passe réellement sur le terrain. Notre légitimité sur cette question reste donc assez limitée.
Néanmoins, si le constat est amer, au vu de l’actualité malienne qui retourne à ses démons (corruption, gouvernements instables, regain du djihadisme...). On peut, grâce au témoignage de l’auteur démontrer que l’ONU a une place importante auprès des populations. Remettre en cause son rôle serait sans aucun doute une erreur, alors que la fin de l’opération Barkhane a d’ores et déjà montré les limites de l’État malien, pour garantir la sécurité et la stabilité du pays. ♦