
Dans son nouvel ouvrage, l’ambassadeur honoraire de Belgique et professeur invité à l’université catholique de Louvain (UCLouvain), Raoul Delcorde, continue de décortiquer le métier de diplomate et l’art de la diplomatie. Après une histoire de la diplomatie d’« hier à demain » en 2021, un état des lieux de la négociation diplomatique internationale en 2023, voici un précis pratique et théorique d’un aspect majeur du métier de diplomate : la médiation diplomatique internationale.
Petits en taille et accessibles, les ouvrages de l’ambassadeur Delcorde n’en sont pas moins d’une utilité indispensable en ces temps troubles pour les relations internationales des années 2020. Guerre en Ukraine, récentes déclarations américaines contre Kiev, guerre au Proche-Orient, remise en cause, voire dédain, du droit international… autant d’éléments qui démontrent que la guerre, le conflit armé, la dispute sont devenus le mode de règlement des différends dans le monde post-Covid-19.
Dans ce contexte, Raoul Delcorde ne s’avoue pas vaincu et il le démontre encore dans ce nouvel ouvrage : la diplomatie intervient, certes, avant un éventuel conflit armé en vue de l’éviter – ce n’est pas faute d’avoir essayé, entre 2014 et 2022 en ce qui concerne la Russie et l’Ukraine – mais, surtout, à la fin de celui-ci : les négociations, grâce à une éventuelle médiation internationale, peuvent mettre fin à une guerre. C’est ce qu’éclaire l’ouvrage de Raoul Delcorde : quel est le rôle de ce que l’on appelle la « médiation internationale » ? Quel est le rôle du médiateur, alors que l’actualité nous en parle régulièrement ? Discussions au Qatar entre Israël et des représentants du Hamas, discussions Russie–États-Unis en… Arabie saoudite, la médiation internationale fait l’actualité, sans pour autant que le public ne comprenne les raisons pour lesquelles des discussions concernant l’Europe ont lieu au Moyen-Orient ; et sans, pour autant, comprendre réellement le rôle de tel ou tel État dans telle ou telle discussion ou résolution de conflit. Grâce à des anecdotes historiques et des portraits de médiateurs internationaux ayant marqué leur temps, l’auteur explique d’une façon toute pédagogique, les raisons pour lesquelles les accords d’Oslo (1993) sur le conflit israélo-palestinien, signés à… Washington, portent le nom de la capitale norvégienne. Quelles sont les différentes stratégies de la médiation diplomatique internationale ? Est-elle toujours pertinente ? Quelles sont les conditions nécessairement réunies afin qu’une telle médiation puisse avoir lieu et être couronnée de succès ? L’étudiant en relations internationales comme le simple intéressé peuvent y trouver des réponses claires, concises et non partisanes. Car le médiateur international est, par essence, a-partisan, impartial : il apporte un espace de discussion, il facilite des échanges, donne des informations manquantes ou incomprises – rôle particulièrement important, notamment dans le cadre russo-ukrainien où la désinformation joue, hélas, un rôle majeur et néfaste.
Le cessez-le-feu à Gaza permettra-t-il l’arrivée d’une paix tenable ? La réouverture des discussions entre les États-Unis et la Russie, malgré la malheureuse et malvenue mise à l’écart de l’Ukraine et de l’Union européenne, permettra-t-elle une marche vers la paix ? Ces questions restent encore en suspens. Un des indices permettant de répondre à ces questions est de savoir si un acteur tiers (un médiateur diplomatique international) est impliqué dans ces nouvelles discussions. S’il n’y en a pas, ou si la médiation est rejetée, l’on peut penser que la paix n’est pas pour aujourd’hui. En revanche, si la médiation internationale est acceptée par les deux parties en conflit, l’on peut espérer que les négociations sont bien engagées. Pour décortiquer ces négociations, Raoul Delcorde fait un panorama de la manière dont peuvent se dérouler ces médiations internationales : quelles sont les différences entre les types de médiations (par un État, une organisation internationale, un individu) ; quelles sont les difficultés que le médiateur peut rencontrer ; quel est le rôle de la diplomatie pontificale, notamment entre parties non catholiques ; quel est, enfin, le rôle de la Suisse, connue pour sa neutralité, dans la médiation internationale ?
In fine, ce petit livre se veut complet et a toute sa place dans la bibliothèque de la diplomatie internationale : il aide à décrypter le monde en étant, entre les lignes, un plaidoyer pour la diplomatie alors que l’époque est à la guerre.