La croissance du trafic aérien et la multiplication des menaces aériennes remettent en question la gestion du ciel. Si la sécurité est assurée par les armées de l’air nationales, la gestion commune des espaces aériens européens est appelée à devenir un enjeu financier et de souveraineté majeur.
La sécurité aérienne du territoire à l’horizon 2030
La croissance du trafic aérien en Europe a des implications directes sur les survols de notre territoire et rend plus urgente l’adaptation des structures actuelles en charge de l’espace aérien : les modalités qui seront adoptées pour la gestion du Ciel unique européen (CUE) ont comme objectif commun une défragmentation des espaces nationaux et une optimisation des trajectoires aériennes, tant civiles que militaires. La gestion future de la Posture permanente de sécurité (PPS), qui est de la responsabilité de l’Armée de l’air, en sera inévitablement affectée. Cette dernière doit également prendre en compte la menace croissante des drones et du terrorisme. Pour répondre à ces défis, une nouvelle « politique du ciel », doit être mise en place, incluant les aspects spatiaux et les différents aspects du nouveau dispositif sur lequel reposera la gestion du trafic aérien d’ici 2025.
La PPS, une mission de l’Armée de l’air en évolution
La Posture permanente de sécurité demeure une mission de l’aviation militaire, indispensable à la sécurité aérienne du territoire. Il s’agit d’une fonction permanente (24/24h et 7j/7) et donc exigeante, qui est opérationnellement et financièrement entièrement prise en charge par l’Armée de l’air, en collaboration avec la Direction générale de l’aviation civile (DGAC). Extrêmement réactive, elle répond à l’exigence de rapidité de décision et à la possibilité d’obtenir dans les plus courts délais les autorisations politiques (y compris au niveau du Premier ministre) pour agir.
La PPS représente aujourd’hui un dispositif performant, sans véritable équivalent chez nos partenaires européens. Son champ d’action embrasse, en effet, une grande diversité de situations accidentelles, intentionnelles ou non :
– non-respect des plans de vols déposés et des zones de circulation limitées,
– surveillance des survols par des appareils a priori suspects,
– assistance à des aéronefs en difficulté,
– interdiction des intrusions d’appareils étrangers dans l’espace aérien national à des fins de renseignement, d’intimidation ou d’amorçage d’un processus politico-militaire d’escalade,
– surveillance et protection aérienne des événements à haute signification politique et médiatique,
– surveillance de l’environnement des lancements à Kourou, à l’occasion des tirs spatiaux.
Le nombre d’alertes et d’interventions a progressé dernièrement, dont plus de 400 en 2018 reparties à peu près pour moitié entre pertes de communication et survols de zones interdites. L’activité des appareils russes aux abords de notre espace national s’est également accrue. Or, la surveillance aérienne du territoire va inévitablement connaître une importante mutation, d’ici 2030, passant de l’identification et la détection des aéronefs à partir de moyens civils et militaires nationaux à une gestion entièrement informatisée des trajectoires d’objets connectés largement gérée de manière centralisée dans le cadre du nouveau Ciel unique européen. Par ailleurs, l’interaction entre la sécurité aérienne et l’action face aux différentes formes de terrorisme devra se renforcer. Elle devra également faire face aux problèmes posés par le développement des drones.
Une approche globale de la sécurité aérienne du territoire justifiée par la menace terroriste et la prolifération des drones
Le terrorisme
L’interaction entre l’organisation de la sécurité aérienne du territoire et la lutte contre les différentes formes de terrorisme (sécurité des aéroports et des bases, perspectives d’une prolifération des drones…) a été récemment renforcée. Elle devra prendre en compte, en raison de la mise en place du CUE, une nouvelle répartition des rôles pour l’identification et la gestion des aéronefs.
Le lien entre terrorisme et opportunité d’attaques contre des facilités aériennes, par essence fragiles, est aujourd’hui reconnu, même si, par exemple, les leçons de l’affaire du vol Air France 0963 d’Alger, pris en otage par des membres du Groupe islamique armée (GIA) le 24 décembre 1994 et stoppé à Marseille alors qu’il se préparait à s’abattre sur la capitale, n’avaient pas encore été comprises, alors qu’elles préfiguraient les attaques du 11 septembre 2001.
Les risques d’intrusions sur les aéroports et les bases aériennes, tout comme la vulnérabilité aux manpads (2) des appareils en phase d’atterrissage ou de décollage, ont été depuis longtemps identifiés et des mesures ont été prises, notamment au niveau de la recherche de renseignement, de la surveillance des personnels dans les aéroports et de la sécurité des emprises. Elles supposent une préparation interministérielle poussée et des actions étroitement coordonnées. Leur financement est en partie assuré par les compagnies aériennes, qui en répercutent le prix sur les passagers.
Les drones
La question de la croissance des intrusions de drones dans des espaces réservés et une montée spectaculaire des incidents aériens posent des problèmes croissants de sécurité. Même si l’Armée de l’air n’est pas actuellement officiellement en charge de la prévention des accidents avec les drones, qui incombe à la DGAC et aux opérateurs de sites sensibles, aux termes des conventions passées, elle sera inévitablement concernée en cas d’accident.
L’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) prévoit un triplement des incidents lié aux drones par rapport à la période 2011-2015. Une évolution parallèle est enregistrée sur le continent nord-américain. En France, on peut citer la collision manquée entre un drone et un Airbus A320 d’Air France en approche de l’aéroport Charles-de-Gaulle (19 février 2016), l’intrusion dans l’espace des centrales nucléaires du Bugey (3 juillet 2018) ou, récemment, en Grande-Bretagne, la fermeture temporaire de l’aéroport de Gatwick (19 décembre 2018), immobilisant 110 000 passagers.
En outre, le nombre d’opérateurs de drone s’est rapidement accru. D’une cinquantaine d’opérateurs en 2012 en France, on est passé à plus de 5 000 opérateurs exploitant plus de 10 000 drones en 2018. Pour les seuls drones de loisirs, on compte plus de 500 000 exemplaires vendus depuis 2016 en France. L’encadrement de cette filière se fait dans la difficulté et selon des modalités qui ne sont pas suffisamment harmonisées entre pays européens en dépit des efforts de la Commission et de l’Agence européenne de défense (AED, qui a créé un groupe de travail spécial s’agissant des drones autonomes) pour dégager des règles communes. La France a mis en place, par étapes, une législation nationale (3). L’altitude maximale autorisée est dans les États de l’Union européenne de 150 m, et des obligations concernant l’enregistrement de l’appareil, l’identification de l’utilisateur et sa formation au pilotage, ainsi que les modalités du contact conservé avec l’appareil et l’interdiction des vols de nuit sont prévues et continuent de faire l’objet de concertations.
Il convient, certes, de ne pas brider la liberté individuelle des opérateurs par des contraintes réglementaires trop lourdes, qui risqueraient de briser le développement de la filière, au profit d’autres pays, eux aussi fabricants de drones (Chine par exemple). Toutefois, il est impératif de gérer la démocratisation nouvelle des utilisations de l’espace aérien. Les développements d’ores et déjà envisagés par les opérateurs de drones (taxis urbains, délivrance des colis, inspection des dépôts, etc.) rendent malaisé l’anticipation des problèmes qu’ils vont poser pour le partage de l’espace aérien : on peut être a priori assuré qu’ils seront d’une tout autre dimension que ceux que nous connaissons actuellement…
La Direction générale de l’armement (DGA), comme ses homologues étrangers, explore différentes approches, à la fois pour la détection précoce et la destruction des drones : fusils anti-drones, laser, rapaces dressés, brouillage des systèmes de navigation, filets de capture, intrusion cyber. Cependant, aucun système n’a – jusqu’ici – fait complètement ses preuves, même si plusieurs pays (dont la France) ont passé des commandes de matériel auprès de firmes privées et continuent l’évaluation de leur efficacité. Les progrès de l’Intelligence artificielle (IA) vont permettre une plus grande réactivité du pilotage automatique des drones, ce qui retire donc une grande partie de son efficacité à la méthode actuelle du brouillage de ses communications et renforce ainsi la nécessité de prévoir des moyens cinétiques. Il convient parallèlement de s’orienter vers des technologies innovantes, d’autant que la mise au point de mesures anti-drones intéresse le ministère des Armées, non seulement au titre de la sécurité aérienne du territoire, mais également au titre des opérations extérieures, comme on l’a déjà constaté lors des opérations de la coalition en Irak et en Syrie.
Les risques liés au terrorisme et aux drones constituent une raison supplémentaire pour assurer l’adaptation de la couverture radar du pays, notamment en basse altitude, même si la détection des drones reste encore actuellement très difficile. L’évolution des menaces conduit à considérer à la fois des cibles très rapides et relativement furtives mais aussi des cibles très lentes et de petite taille. Un dispositif permettant de gérer les drones à proximité (5 km) d’un aéroport est actuellement expérimenté.
Pour l’Armée de l’air, le développement des drones et ses conséquences représentent donc un triple défi :
• Les opinions publiques ne comprendraient pas que des mesures efficaces ne soient pas adoptées par l’Armée de l’air dans la lutte anti-drones et que la responsabilité de cette dernière demeure essentiellement à la charge des gestionnaires des installations critiques (par exemple, les centrales nucléaires et les aérodromes). Le dispositif actuel de la PPS ne répond toutefois actuellement que de manière limitée aux besoins : les Mirage et Rafale sont trop rapides sur zone, tandis que les hélicoptères avec tireur embarqué destinés à l’interception de cibles lentes ne disposent pas toujours de la vitesse requise pour arriver à temps au point d’interception.
• La place et le rôle de l’Armée de l’air elle-même dans un dispositif anti-drones interministériel ne sauraient être dissociés de la politique de gestion de la sécurité de l’espace aérien. Pour le moment, l’effort se focalise sur les basses altitudes mais demain, certains drones croiseront à des altitudes voisines des vols commerciaux.
• La gestion de la PPS devrait demain explicitement prendre en compte les problèmes liés aux interférences des drones, quelle que soit l’altitude de circulation. Il s’agirait là pour l’Armée de l’air d’une extension formelle de responsabilités qui suppose à la fois une décision politique et juridique ainsi que l’attribution des moyens correspondants : elle confirmerait, en le renforçant, le rôle du Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA). La gestion opérationnelle de la PPS et donc des mesures actives désormais nécessaires demeurait inchangée par rapport au dispositif institutionnel actuel.
Les nouvelles formes de la gestion des espaces aériens en Europe, un enjeu majeur pour les aviations militaires
Dans le monde, la croissance annuelle du transport aérien se situe autour de 5 % et le trafic aérien double tous les 12-15 ans. Or, cette progression est reconnue comme incompatible avec les modalités actuelles de la gestion du trafic tant en Europe qu’aux États-Unis. L’évolution vers une numérisation complète de la gestion de l’espace aérien dans le cadre de la mise en place du Ciel unique européen est donc inévitable compte tenu du développement prévisible du trafic.
Le recours au décloisonnement des espaces aériens nationaux et à l’informatisation de la gestion des routes aériennes a été acté par l’UE dès les années 2000 dans le cadre du CUE avec ses déclinaisons successives, dont l’actuel Single European Sky 2+. Le mouvement apparaît aujourd’hui irréversible, soutenu qu’il est par les compagnies aériennes et la Commission européenne. Le programme SESAR (4), financé par la Commission (et dont Thales est l’un des contributeurs majeurs), au cœur de la définition des nouveaux dispositifs informatiques, progresse désormais rapidement et concerne donc également l’activité des flottes aériennes militaires en Europe (y compris les partenaires de l’UE) dont celle de l’Armée de l’air.
La détection des avions et drones ayant un comportement suspect ne s’effectuera plus seulement en fonction des plans de vols mais grâce au suivi de leurs évolutions en temps réel et à l’action conjuguée des radars civils et militaires. Elle doit cependant éviter d’affecter la liberté d’action des aviations militaires en ce qui concerne les zones d’exercice et d’entraînement, la confidentialité de leurs activités et la gestion des vols et déploiements sans préavis. De plus, du fait de sa situation géographique au croisement des routes aériennes européennes, la France assume une responsabilité particulière (5) et représente un élément clé du futur dispositif.
Dans ces conditions, la présentation à Bruxelles d’une attitude commune des responsables des aviations militaires des pays européens, en décembre 2018, marque une étape importante : deux officiers, français et allemand, tous deux commandants en second des CDAOA respectifs, et parlant au nom de la « communauté militaire aérienne européenne » ont notamment indiqué que :
• Les activités militaires ne sont pas responsables des délais et de la congestion du ciel européen grâce à un certain nombre de mesures déjà adoptées.
• La « communauté aérienne militaire européenne » est une partie prenante au CUE, même si elle ne représente qu’une part minoritaire de l’utilisation des espaces aériens (11 %), avec ses propres spécificités, ses coûts prospectifs et des considérations de sécurité propres.
• L’ATM (gestion du trafic) européen peut constituer un avantage pour les activités proprement militaires dans un environnement de plus en plus complexe, mais suppose aussi des entraînements spécifiques des équipages.
• L’interopérabilité civile-militaire est déjà une obligation et les militaires ont un a priori favorable à la numérisation des opérations dans l’espace du CUE.
• La cybersécurité est une préoccupation commune aux militaires et aux civils.
• La navigation des drones doit être intégrée dans l’espace commun du CUE.
• La défragmentation des espaces de circulation aérienne et l’éventuelle délégation de tâches à des entités indépendantes doivent inclure des obligations contractuelles sur les priorités d’accès des militaires.
De plus, l’Otan (qui a établi plus de 300 STANAG (6) pour les exercices conjoints et les activités des pays membres) – dont l’US Air Force, première flotte aérienne militaire en Europe en nombre de vols effectués – a également des intérêts spécifiques à faire valoir dans la nouvelle organisation de l’ATM en Europe.
Les aviateurs s’affirment donc disposés à contribuer au CUE tout en faisant valoir leurs nécessités propres (flexibilité du dispositif pour assurer le mouvement des appareils, l’entraînement et l’organisation des missions dont la PPS ; confidentialité ; cybersécurité ; soutenabilité technique et financière des adaptations). Certes, dans l’ordre actuel des priorités, la mise en place des nouveaux systèmes du CUE porte sur l’optimisation des trajectoires et des flux réguliers du trafic commercial, et seulement subsidiairement sur les activités militaires. Au demeurant, la prise en compte d’activités militaires a priori non anticipées et non déclarées car effectuées en urgence (ou dont on souhaite conserver la confidentialité) ne portent que sur une proportion minoritaire des flux aériens européens à gérer.
Aujourd’hui, les spécialistes du SESAR et de l’AED estiment que les technologies développées pour l’ATM seront de nature à répondre simultanément aux besoins civils et militaires. Les nouvelles infrastructures doivent assurer l’interface entre les satellites, les instruments en vol et les stations au sol et devraient permettre une optimisation des zones demandées par les militaires pour leurs besoins spécifiques. En cas d’événement majeur, une partie de l’espace aérien pourra toujours être mobilisée pour faire face à une situation de crise réelle ou simulée.
La PPS bénéficiera d’une information enrichie : aujourd’hui, la trajectoire est connue via le plan de vol déposé avant le départ tandis que SESAR met en œuvre l’échange sur la trajectoire en temps réel, directement depuis les instruments de bord de l’appareil concerné. Il sera accessible aussi bien aux autorités compétentes civiles que militaires. En effet, ce système ne vise pas à l’autonomie totale de la gestion en vol de l’appareil, mais une augmentation progressive, en fonction des étapes de sa mise en service, de l’assistance automatisée des pilotes et des contrôleurs aériens. L’opérateur reste donc constamment « dans la boucle » et peut continuer à intervenir directement sur la trajectoire si besoin, même si cela devient davantage une exception.
Les conséquences sur l’emploi et la formation des contrôleurs, tant civils que militaires, peuvent être dédramatisées : l’évolution du système se fera progressivement sur 10-15 ans minimum. Il n’y a donc pas a priori d’impact négatif en termes d’emploi, mais progressivement le métier va évoluer vers celui d’un gestionnaire de système, tout comme celui des pilotes sur les appareils modernes. Il demeure que la prise en compte de ces évolutions sur le plan de la gestion des ressources humaines au sein de l’Armée de l’air doit être prévue.
Une mise en place du CUE indissociable d’une approche commune spatiale
Les nouveaux systèmes d’ATM, tant civil que militaire, en Europe comme aux États-Unis, et progressivement dans le reste du monde, vont dépendre étroitement des communications utilisant les relais spatiaux. De fait, il existe un lien étroit entre la mise en place du CUE et la capacité des pays européens à gérer la sécurité de leurs réseaux spatiaux et donc de disposer notamment de moyens de surveillance spatiale du système. La question de la vulnérabilité des communications assurées avec des plateformes satellitaires (attaques cyber ou cinétiques, tempête solaire, dysfonctionnement des satellites), se pose à l’évidence, comme pour la majorité des transmissions modernes. Elle constitue une préoccupation forte, tant à Washington qu’à Bruxelles : la stratégie suivie consiste à assurer la résilience du réseau par des systèmes redondants assurant la sauvegarde (back-up) d’un système « tout satellitaire ».
Une autre composante de la résilience des communications spatiales utilisées pour l’ATM doit être la mise en place d’un système efficace de surveillance de l’espace afin de détecter et d’attribuer les responsabilités en cas de dysfonctionnement. L’organisation de cette surveillance aux États-Unis, y compris sur le plan financier, renforce la nécessité d’une capacité autonome européenne.
Les aspects financiers
Les coûts d’adaptation pour les flottes militaires aériennes aux nouveaux dispositifs sont très difficiles à estimer à ce stade. Toutefois cette adaptation ne pourra se faire que lentement, probablement sur une période d’au moins 10 à 15 ans. D’ores et déjà, aux États-Unis, où la Federal Aviation Administration (FAA) impose déjà des mesures d’interopérabilité avec le système NexGen, des retards importants sont enregistrés par rapport aux échéanciers. Seule une faible proportion (20 %) des flottes commerciales est équipée en 2018. En tout état de cause, il convient de distinguer la mise en place des nouveaux dispositifs sur les appareils et l’adaptation des infrastructures au sol.
• Sur la base des projets de financement déposés auprès de l’AED, le coût pour la modernisation de l’interopérabilité entre centres de contrôle civils et militaires est estimé pour l’ensemble des États de l’UE entre 1 et 2 milliards d’euros et, pour la France, à 300 millions d’euros pour la phase initiale.
• S’agissant des « aéronefs », il est difficile de faire la distinction entre les modernisations liées à l’adaptation au CUE et celles qui correspondent à des équipements qui seraient, de toutes les manières, installés. Par ailleurs, les coûts de la modernisation des systèmes en vol varient fortement selon le rythme choisi pour la mise à niveau des appareils. Enfin, les exigences d’interopérabilité actuelles sont susceptibles d’évoluer au cours des dix prochaines années, en fonction notamment des progrès technologiques.
• La gestion des données militaires confidentielles ne pourra a priori être effectuée directement par le système SWIM de CUE. Il faudra donc établir un « cloud » militaire avec des cloisons électroniques étanches.
D’après ces estimations, le coût global de l’adaptation au CUE, sur la période considérée de 10 à 15 ans, pourrait atteindre 5 milliards d’euros, en dehors des infrastructures.
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Une nouvelle politique s’impose désormais pour répondre au triple défi du terrorisme, des problèmes suscités par une insertion plus importante des drones dans l’espace aérien partagé et de la mise en place du « Ciel unique européen ». Elle doit être en cohérence avec les différents aspects de la politique spatiale, notamment en ce qui concerne la surveillance de l’espace. Au moment où celle-ci doit être développée rappelons que l’une des importantes applications concrètes de cette dernière concernera notamment la gestion future des circulations aériennes.
Les enjeux financiers renforcent cette nécessité : des arbitrages devront être effectués pour la répartition entre civils et militaires des coûts induits par ces transformations, s’agissant notamment des infrastructures à maintenir, moderniser ou abandonner.
Dans ces conditions la contribution de l’Armée de l’air à cette nouvelle politique globale de la gestion des espaces aériens, elle-même coordonnée avec la politique spatiale, devient un enjeu majeur pour les prochaines années. ♦
(1) Les conclusions du groupe de travail n’engagent pas l’Armée de l’Air. Ont participé aux travaux : M. d’Aboville, Mmes Bouchet-Orphelin et Minot, MM. Antoine, Duhamel, Hercberg, Meneghetti et Petros, et des militaires. À Bruxelles, MM. Guillermet et Ciotti ont utilement contribué au travail du groupe.
(2) Missiles sol-air lancés à l’épaule.
(3) Notamment la loi du 24 octobre 2016 et l’arrêté du 18 mai 2018 distinguant, en fonction du poids de l’engin (au-delà de 800 grammes) différentes catégories de drones. L’instruction ministérielle 5050 du 10 mai 2016 vise à déconcentrer la responsabilité des mesures de protection.
(4) Single European Sky ATM Research (ATM : Air Traffic Management).
(5) Depuis l’été 2018, elle est devenue la cible d’une campagne des compagnies aériennes, pour sa responsabilité dans l’accumulation des retards subis par les passagers européens en période de pointe du trafic commercial. Les grèves françaises des contrôleurs aériens et l’obsolescence des systèmes de gestion de la France et de l’Allemagne ont été dénoncées par la presse et les compagnies aériennes. Cf. Commission des Finances, La modernisation des services de la navigation aérienne (Rapport d’information n° 568), Sénat, 13 juin 2018 (www.senat.fr/rap/r17-568/r17-568.html).
(6) Normes de standardisation Otan.