Alors que la première puissance navale mondiale consacre déjà un domaine de lutte spécifique au « seabed warfare », la France, qui a fait partie des pionniers dans la conquête des abysses, réfléchit à se doter d’une stratégie militaire de maîtrise des fonds marins. Le double enjeu pour les forces armées est de garantir la liberté d’action de nos forces et d’être en mesure de protéger les intérêts nationaux qui y reposent. Cette stratégie de puissance ne pourra se faire sans une dynamique d’accompagnement interministériel. Elle permettra de relever, avec nos partenaires, le défi de l’utilisation libre, pacifique et raisonnée des fonds marins internationaux. Notre domaine sous-maritime le plus vaste au monde nous y oblige.
Les fonds océaniques, un espace stratégique pour les armées françaises
L’actualisation du contexte stratégique présentée par Florence Parly, ministre des Armées le 21 janvier 2021 fait le constat que « les fonds marins deviennent de plus en plus un terrain de rapports de force » (1). Méconnu (2), difficile d’accès (3), le fond des océans abrite de nombreuses infrastructures vitales comme les câbles sous-marins et des réseaux de distribution d’hydrocarbures. Des ressources naturelles y sont régulièrement découvertes et convoitées, générant des velléités d’appropriation par des États qui n’hésitent pas à enfreindre les règles de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (4). Enfin, depuis le fond des océans, tirant partie des progrès technologiques et d’un milieu propice à la dissimulation, le développement de capteurs et de projets d’armements pouvant être utilisés vers l’espace aéromaritime et même vers la terre se multiplient.
La France, dotée du premier domaine sous-maritime mondial (5), ne peut se tenir à l’écart de ce nouvel espace stratégique. Elle doit, au contraire, améliorer sa maîtrise des fonds marins en entraînant ses partenaires pour faire face à la dégradation de l’environnement international et au défi de l’utilisation libre, pacifique et raisonnée des fonds marins internationaux. À l’heure où des États cherchent à étendre leur puissance par intimidation, grignotage ou moyens insidieux selon une approche dite « hybride », le fond des mers apparaît comme un espace propre à contribuer au brouillard de la guerre, dont se nourrissent les stratégies de déstabilisation difficiles à déceler et attribuer (6). Face à ces menaces, la réponse de la France doit relever d’une stratégie globale interministérielle voire multinationale, tant les enjeux sont multidisciplinaires et les risques multidomaines.
Fonds océaniques : multiples enjeux et risques croissants de conflictualités
Les enjeux de souveraineté
Des ressources naturelles de plus en plus convoitées
La publication en 2015 d’une Stratégie nationale d’exploration et d’exploitation des ressources minérales dans les grands fonds marins, actualisée en 2021 (7), témoigne de la prise de conscience des richesses qui gisent au fond des océans. La France bénéficie d’un accès exclusif par ses espaces maritimes à de nombreuses ressources encore inexploitées, en attente de techniques d’exploitation rentables (si les entreprises d’exploitation d’hydrocarbures ont investi l’offshore profond, à plus de 1 000 m, elles restent encore technologiquement limitées à 3 500 m). Le défi de la protection de ces richesses est d’autant plus fort que l’outre-mer français, qui dispose de moyens de surveillance restreints, contribue à hauteur de 97 % à notre espace maritime et que des tensions sur l’approvisionnement de certains minéraux terrestres, comme les terres rares, apparaissent.
Aujourd’hui, plus personne ne sous-estime l’importance des enjeux scientifiques et écologiques liés aux fonds océaniques. La préservation des écosystèmes sous-marins est ainsi devenue une priorité pour les entreprises d’exploitation d’hydrocarbures en offshore profond qui redoutent les marées noires et leur conséquence sur l’opinion publique. De plus, pour atteindre les objectifs des Accords de Paris (2015) et réduire leur impact sur l’environnement, les grands groupes pétroliers envisagent le stockage de CO2 dans des nappes sous-marines (projet Northern Lights des groupes Total, Shell et Equinor en mer du Nord, annoncé opérationnel en 2024) (8). La préservation du milieu, la connaissance des espèces qui y vivent sont des enjeux de plus en plus partagés. Dans ce contexte, l’exercice de notre souveraineté sur le fond des mers est une nécessité.
Des réseaux d’infrastructures sous-marines stratégiques
L’approvisionnement national en matières premières et en énergie dépend également d’un réseau d’infrastructure sous-marin posé au fond des océans (9). Le développement de l’éolien offshore s’accompagne de structures sous-marines. L’exploitation du potentiel énergétique des eaux chaudes de nos territoires ultramarins est aussi envisagée. Les interconnexions électriques sous-marines se multiplient comme en témoigne l’annonce par le gestionnaire de réseau RTE de la mise en service d’une seconde connexion électrique entre la France et l’Angleterre le 22 janvier 2021 (10). La sûreté de toutes ces infrastructures repose sur les opérateurs et les représentants de l’État en mer (11) qui régulent les activités s’exerçant à proximité.
Aujourd’hui, les données sont le « nouveau pétrole » : véritables pipelines traversant les océans pour irriguer notre économie, ce sont plus de 450 câbles sous-marins qui voient transiter près de 97 % du trafic numérique. Les États prennent conscience de la vulnérabilité croissante de la couche physique du cyberespace dont la propriété, la pose, l’entretien et le contrôle de bon fonctionnement reposent de plus en plus sur la responsabilité de consortiums privés de télécommunication, et bientôt des GAFAM (12). La France est un nœud vital de l’infrastructure des câbles sous-marins qui alimente le continent européen dans un contexte où 92 % des données numériques en Europe sont stockées aux États-Unis (13). La prise de conscience que la souveraineté numérique européenne passera par le stockage des données sur notre continent fait son chemin (14), et il n’est pas impossible que pour des raisons économiques de gain en énergie, des serveurs posés au fond des mers voient le jour (15).
Dans ce contexte, l’implication des gouvernements est plus ou moins affichée, toujours recherchée mais de plus en plus compliquée. Plusieurs pays ont fait des câbles sous-marins une priorité stratégique. La Norvège ou le Danemark subventionnent désormais leur pose et leur maintenance (16). Mais c’est surtout la Chine qui prend une place croissante en développant un axe Est-Ouest qui s’inscrit dans le vaste programme des nouvelles routes de la soie (17). La question de la protection des câbles était à l’ordre du jour des ministres de la Défense des trente pays membres de l’Otan, le 23 octobre 2020, face aux risques que fait notamment peser la marine russe qui « sonde de manière agressive les réseaux sous-marins de câbles de communication » (18).
La maîtrise du volume sous-marin ne pourra plus s’envisager sans celle du fond des océans
Le fond des mers est aujourd’hui un espace encore largement inexploré et difficile d’accès. De ce fait, il est particulièrement adapté à la dissimulation. Pour l’atteindre, il faut traverser une masse d’eau opaque aux ondes électromagnétiques et au sein de laquelle la propagation acoustique, principal moyen de détection, répond à des règles de physique complexes (19). Le domaine des fonds marins est donc particulièrement adapté à abriter des vecteurs de « dislocation morale » (20) et il n’est pas étonnant que la dissuasion nucléaire repose d’abord sur des sous-marins. Ces dernières décennies se caractérisent d’ailleurs par un essor de l’arme sous-marine notamment en Asie (Chine, Inde, Malaisie, Vietnam et bientôt Philippines et Indonésie). Avec cette prolifération, l’exploitation de capteurs et d’armements au fond des mers se développe, laissant présager que la maîtrise du volume sous-marin ne pourra plus s’envisager sans celle du fond des océans.
Pour diminuer l’opacité de ce milieu et gagner en détection face à de tels vecteurs, la pose de microphones acoustiques sur le fond a été développée à partir des années 1950 par les États-Unis (21) et suivie par d’autres Nations depuis (projet russe Harmonie (22) en mer de Barents, projet chinois Underwater Great Wall Project (23)). Ces dispositifs fixes d’alerte permettent de faire peser une menace permanente complémentaire de celle apportée par des vecteurs dynamiques, mais par nature éphémères. Ils offrent un atout pour la protection d’une zone comme dans les passages resserrés. En dehors de dispositifs purement militaires, des projets de câbles « intelligents », ou Smart (Science and Monitoring and Reliable cable system), équipés de senseurs utiles à la surveillance de l’environnement sont également évoqués, laissant entrevoir le potentiel d’un emploi dual qui engendre de vrais enjeux juridiques. Enfin, l’exploitation des câbles optiques sous-marins à des fins de reconnaissance d’activités sous-marines est recherchée grâce à la technologie de la détection acoustique distribuée (24).
Posséder une capacité étatique d’intervention au fond des mers représente un outil militaire d’autant plus pertinent que de plus en plus de compétiteurs en sont dotés, ne serait-ce que dans le cadre de récupération d’objets sensibles abîmés en mer (épaves militaires, débris de missiles, etc.).
Au bilan, la devise bien connue des chasseurs alpins « qui tient les hauts, tient les bas » pourrait être inversée pour les chasseurs abyssaux puisque celui qui maîtrisera le fond aura un avantage certain sur toute la masse d’eau qui le recouvre. La combinaison d’infrastructures posées aux fonds des océans, de drones sous-marins, de vecteurs aéromaritimes classiques et du traitement automatisé et partagé des détections acoustiques favoriseront le pistage de sous-marins et d’unités de surface naviguant dans cet espace (25).
Les indices d’une dégradation des relations internationales au fond des océans
Un cadre juridique de plus en plus contesté
La possibilité offerte par la CNUDM à un État côtier de prolonger le plateau continental sous sa juridiction jusqu’à 350 nautiques a déjà réduit la superficie de la zone internationale des fonds marins (dénommée la Zone) de 70 % à 43 % de la surface des fonds marins (26). Décrétée patrimoine commun de l’humanité, la Zone est ouverte à l’utilisation à des fins exclusivement pacifiques par tous les États sous l’égide de l’Autorité internationale des fonds marins (27). Cette « appropriation » du fond de la mer génère des tensions interétatiques importantes, et la France n’est pas épargnée puisque les frontières de sa Zone économique exclusive (28) ne sont pas toutes reconnues : revendications de Madagascar sur les îles Éparses, de l’île Maurice sur Tromelin, du Mexique sur l’atoll de Clipperton, du Vanuatu sur les îlots de Matthew et Hunter, de la République des Comores sur Mayotte. La découverte de nouvelles richesses dans les fonds marins durcit encore davantage les relations internationales.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, alors que les progrès technologiques ouvraient la possibilité d’une arsenalisation du fond des océans, les États-Unis, le Royaume-Uni et l’URSS se sont accordés pour qu’au-delà de la zone côtière de 12 nautiques, les armes nucléaires et de destruction massive soient interdites (29). Mais alors que la distinction entre les mobiles sous-marins et les objets inertes s’estompe de plus en plus, le dépôt d’armes sur le fond des mers fait partie des projets militaires. Il y a donc peu de chances que le traité de dénucléarisation soit éternellement respecté.
Après le « New Space », le « New Seabed »
La France a été pionnière dans la course à l’accès aux fonds marins. Le premier bathyscaphe, inventé en 1945 par le Suisse Auguste Piccard et subventionné par la France, descendait à plus de 4 000 m, permettant à la Marine nationale et à la marine américaine d’être les deux seules marines capables d’atteindre ces profondeurs pendant une partie du XXe siècle. Aujourd’hui, les moyens privés ont largement dépassé nos moyens militaires, poussés par les développements technologiques au service de besoins économiques (prospection pétrolière, recherche sous-marine à des fins cinématographiques, etc.).
Il faut tirer parti des conséquences de la récente course à l’Espace. Après le « New Space (30) », nous voyons arriver le « New Seabed ». Le besoin croissant d’exploration par l’industrie pétrolière et gazière a dynamisé le secteur, comme l’engagement de certains États qui y voient un moyen d’étendre leur souveraineté. Des acteurs privés tels que les GAFAM posent des câbles sous-marins avec des budgets colossaux soutenus par des États, et des robots sous-marins de tourisme capables de descendre à 200 m sont commercialisés dès 2 000 €. Enfin, le développement de l’intelligence artificielle (IA) stimule le marché des robots et des drones d’exploration sous-marine. Cette dynamique doit être prise en compte pour relever le défi capacitaire de renforcer la panoplie aujourd’hui encore très réduite des moyens d’intervention étatiques français dans le domaine (31).
Des postures étatiques de plus en plus offensives au fond des mers
En moins de trente ans, la Chine s’est affirmée comme une puissance navale majeure (32). Dotée d’une stratégie navale très dynamique, elle ambitionne de contrôler la mer de Chine méridionale et y installe des capteurs et drones sous-marins. Des bâtiments de pêche chinois feraient partie intégrante d’un programme de sécurité intérieure, une sorte de grande muraille sous-marine. Ces moyens viennent renforcer la stratégie chinoise d’Anti-Access and Area-Denial (A2/AD). Enfin, Pékin occupe une position de tête pour l’exploitation des grands fonds comme en témoigne la mise en place en novembre 2020 d’un centre de formation et de recherche conjoint avec l’AIFM sur la technologie des grands fonds.
Concernant la Russie, c’est en Arctique, zone hautement stratégique en termes de ressources énergétiques, que se trouve la majorité de son domaine maritime. Elle y met en œuvre une stratégie dynamique qui lui donne un avantage certain de maîtrise de l’espace maritime et donc des fonds marins alors que des différends frontaliers et territoriaux perdurent avec les cinq États riverains du Grand Nord. La Russie possède des capacités militaires pouvant porter atteinte à nos intérêts jusque dans nos approches maritimes : menace sur les câbles sous-marins au large du Royaume-Uni, déploiements massifs de sous-marins en Atlantique et Méditerranée (33). Le fond des mers est un milieu opaque particulièrement adapté au concept de la « guerre non linéaire » développé par les théoriciens russes pour faire sentir aux Occidentaux leur fragilité.
Face à leurs compétiteurs, les États-Unis confirment leur ambition de garder une avance technologique et militaire comme en témoigne l’élaboration d’un domaine de lutte dédié, le « seabed warfare ». Depuis 2009, la marine américaine parraine de nombreuses expérimentations de drones sous-marins. Soucieux de conserver l’avance technologique, ils n’ont pas ratifié en 1994 la CNUDM qui impose de partager les résultats et les méthodes technologiques d’exploration (34). La documentation ouverte laisse entrevoir de nombreuses innovations. Un récent appel d’offres pour la conception et la fabrication du drone multimissions Snakehead destiné à être embarqué sur sous-marin est la preuve d’une avance considérable (35).
Un champ de confrontation propice aux stratégies hybrides comme à des actions de haute intensité particulièrement disruptives
De nombreux États cherchent ainsi à étendre leur influence sur la mer et sur les fonds océaniques en développant des stratégies d’appropriation, faisant fi des règles internationales telles que le principe de la liberté de navigation, le respect de la souveraineté des ZEE ou le statut de patrimoine commun de l’humanité de la Zone. Ces comportements sont de plus en plus fréquents en mer de Chine, en Méditerranée mais aussi en Arctique. Ils rentrent dans le champ des menaces dites « hybrides ». Déjà, dès le début des deux guerres mondiales, les câbles qui reliaient l’Allemagne furent sectionnés par des câbliers anglais. Sans attendre un conflit majeur entre États, il est certain que les artères de communications sous-marines constituent des cibles de premier choix pour celui qui souhaiterait s’en prendre à la souveraineté même d’un compétiteur, comme observé en 2014 avec la coupure des câbles de communications reliant la Crimée à l’Europe lors de son annexion par la Russie (36).
Face à ces menaces, la réponse relève d’une stratégie globale interministérielle et multinationale apte à anticiper, détecter, comprendre, attribuer, décourager les actions adverses et limiter leurs effets.
Pour une stratégie globale de défense de nos intérêts au fond des océans
Une ambition nationale à développer
Une indispensable prise de conscience politique
Pour la France, l’enjeu est certes énergétique, économique et militaire, mais il est d’abord politique. Les États qui affichent des stratégies d’intimidation ou du fait accompli au fond des océans n’ont, en réalité, que peu de chances de pouvoir s’imposer dans la durée dans un espace maritime qui par nature ne peut être fermement tenu. Comme le rapporte l’historien naval britannique Sir Julian Stafford Corbett au début du XXe siècle, « the normal state of affairs is not a commanded sea but an uncommanded one. Command of the sea is normally in dispute » (37). Les espaces maritimes, comme les fonds marins, sont des espaces contestés par nature. L’ambition politique consiste donc à ne pas admettre les postures d’appropriation ou de déni d’accès de nos compétiteurs comme irrémédiables. Elle consiste aussi à reconnaître avec lucidité qu’on ne peut, a contrario, défendre de manière sûre et pérenne une infrastructure ou une zone au fond des océans.
La stratégie de défense des fonds marins impose une double dynamique si nous ne voulons pas qu’elle devienne un nouveau « Far West » :
– d’abord celle de réaffirmer le droit international, de défendre le statut de ces espaces communs considérés comme patrimoine mondial (38). L’objectif est de montrer aux compétiteurs assoiffés d’appropriation que la mise en œuvre d’une stratégie de déni d’accès est vaine.
– la seconde consiste à protéger notre souveraineté, en ayant bien conscience que cela nécessitera des efforts multidomaines, dont les résultats ne seront jamais complètement définitifs.
Le défi diplomatique et légal : adopter une diplomatie de combat, renforcer les cadres juridiques
Dans les eaux sous juridiction d’un État côtier (ZEE ou plateau continental étendu reconnu), la pose de câbles, de pipelines sous-marins et la recherche scientifique sont encadrées par le droit interne de l’État côtier, souvent peu contraignant. Seuls quelques pays comme Singapour ou l’Australie réglementent strictement la pose d’installations sous-marines dans leur ZEE sous couvert de préconisations liées à des contraintes environnementales. Dans nos ZEE, l’arsenal juridique reste trop fragile et permissif. La France gagnerait à davantage contrôler ce qui se pratique dans son vaste espace maritime en renforçant ses moyens de surveillance et son arsenal juridique. Ainsi, si la pose de câbles sous-marins sur le plateau continental français est réglementée (décret 2013-611 modifié), l’opérateur posant un câble de communication qui n’atterrit pas sur le territoire national n’a aucune obligation de notifier le tracé de son câble. Ce flou juridique peut avoir pour conséquence que l’État côtier ne soit pas informé de la présence de câbles sous-marins dans sa ZEE. Pour y remédier, un projet de révision du décret est en cours.
Œuvrer à la non-appropriation de la Zone, c’est d’abord faire respecter la liberté de navigation dans les eaux internationales. Alors que de plus en plus de pays riverains de la mer de Chine méridionale considèrent qu’il ne leur est plus possible de faire naviguer leurs bâtiments de combat dans certaines parties de la haute mer, il importe de réaffirmer le droit international en y patrouillant. C’est bien le signal envoyé par le président de la République lors de ses vœux aux armées le 19 janvier 2021 en mentionnant la mission du sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) Émeraude : « en ce moment même, un sous-marin manifeste l’attachement de la France au principe du droit de la mer, loin d’ici, en Asie » (39). Dès le temps de paix, ne pas accepter l’état de fait recherché par un compétiteur, c’est un combat en soi. Cet engagement aujourd’hui en haute mer, c’est d’abord un choc des volontés qui se traduit par la présence de moyens militaires puissants. Face à un adversaire déterminé, il faut une présence durable et donc une coordination entre partenaires. Le concept de présence maritime coordonnée (40) pourrait judicieusement être déployé face aux États qui n’ont aucun scrupule à s’affranchir du droit international à la surface comme au fond des océans. La Zone est ouverte à l’utilisation à des fins exclusivement pacifiques par tous les États signataires qui peuvent déposer des installations sur le fond de la mer conformément aux conditions fixées par l’AIFM. Avec la multiplication des objets nouveaux sur le fond de la mer et leur fort potentiel d’emploi dual, le durcissement de l’arsenal juridique est souhaitable. Les États qui ne sont pas partie de la CNUDM comme les États-Unis peuvent, sans autorisation ni préavis, y déposer des objets. Dans le même temps, la Chine s’investit activement au sein de cet organisme international. Dans ce contexte, la France doit s’armer d’une « diplomatie de combat » (41), impliquant les organisations internationales et les pays partenaires concernés.
Le défi de la gouvernance : pour une intégration multisectorielle des acteurs
Bien qu’une vision stratégique maritime française ait été portée par l’État depuis une dizaine d’années (42), l’absence de mise en œuvre efficace pour les grands fonds accentue le lent recul des moyens français, militaires et industriels (43), face à des États très engagés. Le bilan de la stratégie d’exploitation des fonds marins validé par le Comité interministériel de la mer (CIMer) en janvier 2021 rapporte que les résultats des cinq dernières années sont décevants et prône davantage de synergies entre les acteurs de la recherche et de l’industrie comme entre la sphère publique et les opérateurs industriels (44). Le défi d’une meilleure connaissance, exploitation et protection des intérêts des fonds marins passe par une dynamique collective améliorée. Après avoir levé la tête et réalisé que l’espace exo-atmosphérique devenait un nouvel espace de conflictualité, il est temps de prendre conscience que la maîtrise de l’océan profond constitue également un enjeu pour notre politique de défense et de sécurité nationale, et qu’elle dépasse le simple cadre d’une stratégie militaire.
Nombreux sont les secteurs et les ministères concernés par des intérêts qui reposent au fond des océans. Cette large transversalité peut être une force si chacun partage ses informations. Tous les moyens doivent être saisis pour améliorer notre évaluation, identification et caractérisation des menaces selon une approche globale. Le domaine du renseignement n’échappe pas à cette dynamique : renseignement humain, veille technique des avancées industrielles de nos compétiteurs, surveillance satellitaire, aérienne et de surface des navires civils et militaires étrangers engageant l’espace sous-marin (45). Les échanges avec nos partenaires seront déterminants pour croiser les informations et détecter des modes opératoires ou vecteurs innovants. La France pourrait ainsi profiter de sa prochaine présidence du Conseil de l’Union européenne pour porter ce sujet au niveau européen, dans la continuité de la Stratégie de sûreté maritime de l’Union européenne (SSMUE, adoptée en 2014 et son plan actualisé révisé du 26 juin 2018). La proposition, par exemple, d’une coordination des moyens océanographiques des États-membres permettrait d’optimiser notre connaissance des fonds. Dans le domaine de l’intervention par grands fonds, si les moyens militaires (Cephismer (46)) ou étatiques (Shom, Ifremer, DRASSM (47)) existent, des partenariats stratégiques avec des grands groupes privés (Opérateur Orange Marine, groupe Total, entreprise CGG, etc.) méritent d’être établis ou renforcés.
Le modèle de gouvernance réalisé par les acteurs de la sécurité maritime dans le cadre de la « fonction garde-côtes » constitue un exemple pertinent de l’action de l’État en mer au profit de la défense militaire du territoire. Sous pilotage du Secrétariat général de la mer (SGMer), l’élargissement de cette fonction, ou la constitution d’un groupe spécifique « fonds sous-marins » agrégeant les acteurs des fonds marins, pourrait être une piste. Cette gouvernance permettrait d’accompagner la stratégie militaire de défense des fonds marins en intégrant des moyens supplémentaires aptes à améliorer la connaissance et la surveillance de l’environnement et donc la caractérisation des menaces.
Un enjeu de défense et de sécurité nationale qui repose d’abord sur les forces armées
Les progrès technologiques et les velléités des États à exploiter et utiliser les fonds marins imposent d’avoir des tactiques et des outils militaires crédibles pour détecter, caractériser, intervenir et le cas échéant dissuader. Le double enjeu pour les forces armées françaises est de garantir la liberté d’action de nos forces et d’être en mesure de protéger les intérêts nationaux qui y reposent. Dans ce contexte, le plan Mercator 2021 - Accélération publié fin janvier 2021 par l’amiral Pierre Vandier, Chef d’état-major de la Marine, mentionne que « la maîtrise des fonds marins […] constitue désormais un domaine prioritaire, elle fait déjà l’objet d’une réflexion stratégique et d’études capacitaires qui seront poursuivies activement » (48). Sans empiéter sur le travail institutionnel entrepris, quelques réflexions sur les principaux défis à relever sont proposées.
Défi opérationnel pour les armées
La Marine française ne découvre pas les fonds marins. Elle développe déjà des expertises reconnues. Les sous-mariniers exploitent les reliefs sous-marins dont la connaissance repose sur le travail préalable du Shom pour les aider à se positionner. Les spécialistes de la guerre des mines assurent les opérations de déminage sur les voies maritimes utilisées par les Sous-marins lanceurs d’engins (SNLE) lors de leur transit entre leur base et la haute mer. En cas de menace mines, ils sécurisent les zones de déploiement des forces navales en zone littorale et assurent le libre accès aux principaux ports de commerce français. Enfin, les experts de la Cephismer entretiennent une capacité d’intervention sous la mer dans le cadre de l’action de l’État en mer (investigation d’épave par exemple) et surtout de sauvetage d’un sous-marin (programme Otan Submarine Rescue System).
L’évolution des menaces et l’intérêt national croissant de nos infrastructures et ressources sous-marines nous imposent d’élargir nos capacités d’observation, de protection et d’intervention : plus largement et plus profondément (49). Pour atteindre le fond des océans, il faut non seulement franchir le dioptre de la surface mais traverser l’espace sous-marin. Les fonds marins apparaissent davantage comme le prolongement de l’espace maritime qu’un espace à part entière. Il en ressort que nos doctrines de lutte sous la mer (50) doivent évoluer pour tendre vers une doctrine anti-sous-marine (ASM) globale intégrant toute l’étendue d’eau, jusqu’aux fonds abyssaux. Ce domaine de lutte, déjà le plus compliqué, devient encore plus complexe, nécessitant une connaissance toujours accrue de l’environnement et des fonds.
La stratégie de défense au fond des mers doit sans doute être différenciée, selon la nature (eaux territoriales, ZEE, Zone) et les défis de chaque zone : sûreté des approches, des zones de déploiement des forces, surveillance des ZEE et protection des installations au fond des océans notamment outre-mer. Ces travaux d’analyse trouveraient toute leur place dans les groupes d’anticipation stratégique menés au sein du ministère des Armées (51). La ZEE du golfe de Gascogne, zone de transit de nos SNLE, mérite une attention toute particulière. Si nous disposons actuellement de forces aéromaritimes cohérentes pour les accompagner et les soutenir vers leur zone de patrouille, la mise en place de capteurs fixes dans nos approches, comme le pratiquent certaines marines étrangères, pourrait s’avérer souhaitable et complémentaire.
Nos ZEE outre-mer nécessitent des forces de souveraineté adaptées aux enjeux océaniques du XXIe siècle. À ce stade, les capacités militaires qui y sont stationnées ne sont pas dimensionnées pour un environnement marqué par la rivalité, la contestation et la subversion, en particulier dans le domaine de la lutte sous la mer. Ainsi, les capacités de détection de nos futures frégates de surveillance, notamment ASM, gagneront à être envisagées à l’horizon 2035. Enfin, la panoplie de nos systèmes d’armes doit s’étoffer pour acquérir des moyens non létaux afin de contrer des activités « indiscrètes » de nos compétiteurs (52).
Ces réflexions doivent alimenter le travail de la prochaine actualisation stratégique en vue de la future loi de programmation militaire. La France gagnerait à élaborer un programme d’ensemble dédié à la maîtrise des fonds des mers, à l’instar de ce qui a été fait pour l’Espace.
Défi capacitaire et technologique
Nos moyens de lutte ASM « classiques » sont parmi les plus performants mais leur nombre reste limité. Comme le rappelle la loi d’Augustine (53), si nous restons sur les mêmes logiques de recherche permanente d’amélioration des capacités du moment sur un modèle d’armée complet, la contraction des formats va se poursuivre inexorablement. Il faut trouver des solutions alternatives pour obtenir de la masse, surtout dans un domaine où la portée de détection d’un vecteur restera faible au regard de l’espace d’opération. Le concept de capacités de lutte sous la mer conteneurisées et amovibles pouvant être utilisées depuis des plateformes navales non spécialisées (bâtiments de soutien militaires ou affrétés) pourrait être développé. Une autre piste consisterait à se doter de vecteurs peu onéreux et accessibles en nombre, capables de démultiplier les effets au profit d’une unité navale traditionnelle : mines, drones ou capteurs de fond.
La mine navale, peu coûteuse, possède des atouts considérables dans une stratégie du faible au fort. Pour les organisations terroristes, c’est une arme qui garantit un maximum d’effets psychologiques et matériels. Pour les États, elle offre un moyen de découragement et permet de disputer la maîtrise de la mer à une flotte puissante : la Chine et certains pays du Moyen-Orient l’ont compris (54). La France, comme la plupart des pays de l’Otan met l’accent sur la lutte anti-mines mais délaisse la capacité de minage. Développer un savoir-faire « minage » longtemps négligé apparaît pertinent à l’heure où certains pays développent des stratégies de déni d’accès et des vecteurs sous-marins offensifs qu’ils pourraient projeter dans nos propres approches. La réacquisition d’une capacité de minage aéroportée permettrait de compléter efficacement et à moindre coût celle de nos Sous-marins nucléaire d’attaque (SNA).
La Marine nationale bénéficie déjà de véhicules sous-marins téléguidés (guerre des mines, Cephismer) et va bientôt rentrer dans l’ère du drone sous-marin avec l’arrivée du Système de lutte anti-mines du futur (Slamf) (55) et la Capacité hydrographique et océanographique du futur (Chof) (56). Le développement d’une nouvelle capacité requiert aujourd’hui une quinzaine d’années. Il nous faut aller vers un modèle plus agile, une approche plus partenariale avec les industriels et encourager « la logique de rupture sur celle du remplacement » (57) en s’appuyant davantage sur les écosystèmes d’innovation (start-up, PME innovantes) en lien avec l’Agence de l’innovation de défense (AID). La victoire de l’Azerbaïdjan équipé de drones dans la guerre du Haut-Karabagh illustre l’importance des innovations capacitaires de rupture. La réalisation de drones militarisés sur la base de vecteurs civils déjà éprouvés doit permettre de réduire les délais et coûts de réalisation. Enfin, fédérés par la SSMUE, les membres de l’Union européenne gagneraient à développer une excellence industrielle dans le secteur des vecteurs sous-marins, bénéficiant de l’expertise des acteurs déjà présents dans le secteur (oil & gas, pose et entretien de câbles sous-marins). L’item « développement capacitaire » de la boussole stratégique prévue d’être validée pendant la présidence française du Conseil de l’UE début 2022 apparaît comme une occasion unique pour susciter une telle synergie. Le nouveau Fonds européen de défense (FED) s’inscrit dans cette même dynamique. La mise en place d’une telle politique duale favoriserait l’émergence d’une capacité hautement stratégique et économiquement intéressante.
Les systèmes fixes, duaux ou spécifiquement militaires, surtout lorsqu’ils pourront être installés et déplacés discrètement par moyens sous-marins, permettront de faire peser une capacité de découragement supplémentaire auprès de compétiteurs souhaitant s’approcher d’installations ou de zones sensibles. À terme, l’apport du drone permettra de créer un maillage entre les plateformes habitées et les systèmes fixes. Le combat collaboratif devra s’affranchir des milieux pour combiner les effets des armées (concept multidomaines) avec une hyperconnectivité qui représente un véritable enjeu technologique pour les vecteurs sous-marins.
Sous le dioptre de la surface des mers, le véritable goulet d’étranglement réside dans les communications sous-marines, très perturbées par un milieu où les ondes se déplacent lentement et souvent de façon aléatoire. Ce défi freine pour l’heure l’intégration en réseau des sous-marins, drones et capteurs sous-marins. Des travaux en recherche et développement évoquent des voies intéressantes (lasers à diodes bleues, systèmes lasers) (58), mais sans qu’une solution satisfaisante n’ait encore émergé. Profitant de la présence des acteurs travaillant dans le domaine sous-marin à Brest, un pôle d’excellence et de recherche y aurait toute sa place (59).
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Les richesses matérielles comme immatérielles qui gisent ou transitent sur le fond des océans génèrent de vrais enjeux de protection puisque « ce qui n’est pas surveillé est visité, ce qui est visité est pillé et ce qui est pillé finit toujours par être contesté (60) ». Avec le retour des politiques de puissance et grâce aux progrès technologiques, les systèmes capables d’opérer dans les abysses prolifèrent. Employés par des compétiteurs mal intentionnés, ces dispositifs sont de nature à entraver notre liberté d’action et notre souveraineté.
Face à la dégradation du contexte stratégique, ce « coup de sonde » sur les capacités et enjeux des fonds des mers confirme que nous avons de moins en moins « d’eau sous la quille » : les fonds océaniques sont bel et bien un nouvel espace stratégique qui nécessite un investissement coordonné : politique, juridique, économique, industriel et militaire.
© Shom - Autorisation n° 15/2021
La France possède le premier domaine sous-maritime du monde suite au programme national Extension raisonnée du plateau continental (Extraplac) qui a permis la reconnaissance depuis 2015 de l’extension du plateau continental de Guyane, Nouvelle-Calédonie, Antilles, La Réunion et des Terres australes et antarctiques françaises (Taaf). Des discussions sont en cours pour les îles Éparses, Saint-Martin, Clipperton et Saint-Pierre-et-Miquelon.
(1) Ministère des Armées, Actualisation stratégique 2021, 21 janvier 2021 (https://www.defense.gouv.fr/).
(2) Aujourd’hui 10 % des fonds marins sont cartographiés avec une précision inférieure au mètre. Si l’Antarctique a été conquis en 1911 et l’Everest en 1953, la fosse des Mariannes, la plus profonde connue à ce jour, ne fut atteinte qu’en 1960.
(3) Avec une profondeur moyenne des océans de 4 000 m, la pression de la colonne d’eau représente le principal obstacle : une atmosphère [unité de mesure de pression] tous les 10 m de profondeur.
(4) CNUDM signée à Montego Bay le 10 décembre 1982, entrée en vigueur le 16 novembre 1994 (https://www.un.org/).
(5) « Tableau des superficies » sur le portail national (France) des limites maritimes (https://limitesmaritimes.gouv.fr/).
(6) Problématique similaire au domaine cyberdéfense.
(7) Stratégie nationale relative à l’exploration et à l’exploitation minières des grands fonds marins approuvée en Comité interministériel de la mer du 22 octobre 2015 et Stratégie nationale d’exploration et d’exploitation des ressources minérales dans les grands fonds marins : bilan et orientations, pour une nouvelle dynamique, approuvée en CIMer du 22 janvier 2021 (https://www.gouvernement.fr/).
(8) AFP, « Total, Shell et Equinor investissent ensemble dans un projet de captage de CO2 », Le Monde de l’énergie, 17 mai 2021 (https://www.lemondedelenergie.com/total-shell-equinor-captage-co2/2020/05/17/).
(9) « Le gazoduc Franpipe arrive au point d'entrée de Dunkerque et transporte le gaz naturel en provenance de Norvège (30 % des entrées) » (https://selectra.info/energie/guides/comprendre/gaz).
(10) « Mise en service commerciale de la nouvelle interconnexion électrique France-Angleterre », RTE France, 22 janvier 2021 (https://www.rte-france.com/).
(11) Marine nationale, Gendarmerie maritime, Affaires maritimes, Douane, etc.
(12) Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft réalisent aujourd’hui 50 % des investissements des câbles sous-marins (exemples transatlantiques : Marea financé par Microsoft et Facebook, Dunant par Google, Amitie par Facebook) : Izambard Antoine, « Facebook, Google, Amazon… Pourquoi les géants du Net se ruent sur les câbles sous-marins », Challenges, 18 juillet 2019.
(13) Rapport European Digital Sovereignity de la société de conseil américaine Olivier Wyman, octobre 2020, p. 7 (https://www.oliverwyman.com/).
(14) Bruno Lemaire, ministre de l’Économie, a annoncé le 4 juin 2020 le projet Gaia-X, initiative franco-allemande devant permettre aux entreprises européennes de bénéficier de services cloud propres : Ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance, « Concrétisation du projet “GAIA-X”, une infrastructure européenne de données », 4 juin 2020 (https://www.economie.gouv.fr/).
(15) Voir par exemple : « Projet Natick phase 2 : Microsoft et Naval Group, un premier bilan concluant pour le datacenter immergé », Naval Group, 14 septembre 2020 (https://www.naval-group.com/fr/projet-natick-phase-2-microsoft-et-naval-group-un-premier-bilan-concluant-pour-le-datacenter).
(16) Commission des affaires étrangères, Mers et océans, quelle stratégie pour la France ? (Rapport d’information n° 2042), Sénat, 19 juin 2019, p. 84 (https://www.assemblee-nationale.fr/).
(17) Seng Chan Michael (Major, Republic of Singapor Navy), « The Undersea Cauldron: China’s Rising Challenge to U.S. Undersea Dominance », The Submarine Review, décembre 2018, p. 7-23, p. 15.
(18) Brzozowski Alexandra, « L’Otan veut protéger les câbles sous-marins des attaques russes », Euractiv, 23 octobre 2020 (http://www.euractiv.fr/).
(19) Principaux paramètres influençant la célérité du son dans l’eau sont : la température, la salinité et la pression.
(20) Le but de la stratégie est « d’atteindre la décision en créant et en exploitant une situation entraînant une désintégration morale de l’adversaire » : général André Beaufre, Introduction à la stratégie (1963).
(21) Appelés SOSUS (SOund SUrveillance System) puis IUSS (Integrated Undersea Surveillance System) et RAP (Reliable Acoustic Path). Cf. Sontag Sherry et Drew Christopher, Blind Man’s Bluff: The Untold Story of American Submarine Espionage, Public Affairs Press, 2000.
(22) « La flotte russe détectera les sous-marins ennemis à l’aide de satellites », Sputnik News, 20 juillet 2016 (https://fr.sputniknews.com/defense/201607201026835571-flotte-russe-systeme-hydroacoustique/).
(23) « Underwater Observation Network », Global Security (https://www.globalsecurity.org/military/world/china/plan-uon.htm).
(24) Ou Distributed Acoustic Sensing, cf. Henno Jacques, « Chut ! La fibre optique nous écoute », Les Échos, 24 février 2020.
(25) Clark Bryan, Cropsey Seth et Walton Timothy A., « Sustaining the Undersea Advantage: Transforming Anti-Submarine Warfare Using Autonomous Systems », Hudson Institute, 10 septembre 2020 (http://www.hudson.org/).
(26) Bahr Ulrich, Ocean Atlas 2017, Heinrich-Böll-Stiftung Schleswig-Holstein, p. 33.
(27) L’AIFM a été créée pour limiter le risque de conflits, la surexploitation des ressources et l’impact sur l’environnement des exploitations.
(28) ZEE : 200 nautiques à partir de la ligne de base de l’État côtier qui y dispose de « droits souverains aux fins d’exploration et d’exploitation, de conservation et de gestion des ressources naturelles, des eaux subjacentes aux fonds marins, des fonds marins et de leur sous-sol » (CNUDM).
(29) Traité de dénucléarisation entré en vigueur en mai 1972 (https://treaties.un.org/).
(30) Les technologies spatiales font l’objet d’une reprise en main par l’industrie de l’information : les applications spatiales se privatisent même si certains États subventionnent de façon massive.
(31) Après 51 ans passés par 2 350 m de fond à 45 km de Toulon, le sous-marin français Minerve a été retrouvé par le navire Seabed Constructor de l’entreprise américaine Ocean Infinity, après des recherches vaines du navire océanographique de la Marine nationale Pourquoi Pas et d’un navire de l’Ifremer.
(32) La PLAN (People’s Liberation Army Navy) est la deuxième marine mondiale en tonnage avec 350 unités (Flotte de combat 2020).
(33) Sunak Rishi, Undersea Cables, Indispensable Insecure, Policy Exchange, décembre 2018, p. 10.
(34) CNUDM, op. cit., article 143.
(35) Capacités de surveillance et renseignement en 2021, guerre électronique, lutte anti-mines, ASM et antinavire en 2023.
(36) MacAskill Ewen, « Russia could cut off Internet to Nato Countries, British Military Chief warns », The Guardian, 14 décembre 2017 (https://www.theguardian.com/).
(37) Corbett Julian, Some Principles of Maritime Strategy (1911).
(38) Qualification donnée en 1970 par la résolution 2749 de l’Assemblée générale des Nation unies pour la haute mer, article 136 de la CNUDM pour la Zone.
(39) Macron Emmanuel, « Déclaration du président de la République sur la politique de défense », Paris, 19 janvier 2021 (https://www.vie-publique.fr/).
(40) Concept décliné pour la première fois face à la piraterie maritime dans le golfe de Guinée, zone déclarée première zone d’intérêt européen le 25 janvier 2021 par les chefs de la diplomatie de l’Union.
(41) Commission de la défense nationale et des forces armées, Évolution de la conflictualité dans le monde (Rapport d’information n° 3283), septembre 2020, Assemblée nationale (http://www.assemblee-nationale.fr/).
(42) Stratégie maritime nationale pour la mer et les océans (Livre bleu) de 2009, Stratégie nationale de sûreté des espaces maritimes du 22 octobre 2015 révisée le 10 décembre 2019, Stratégie nationale d’exploration et d’exploitation des ressources minérales dans les grands fonds marins du 22 octobre 2015 actualisée en janvier 2021, Stratégie nationale pour la mer et le littoral de février 2017 ; toutes sous l’autorité du Premier ministre via le Comité interministériel de la mer (CIMer). Le Secrétaire général de la mer en assure la préparation et veille à l’exécution des décisions prises.
(43) Rachat en 2015, par l’entreprise finlandaise Nokia, d’Alcatel dont sa filiale Alcatel Submarine Networks est le numéro un mondial en matière de production, installation et maintenance des câbles sous-marins.
(44) Stratégie nationale d’exploration et d’exploitation des ressources minérales dans les grands fonds marins, op. cit.
(45) Sur critère cinématique ou visuel, tirant parti de la couverture satellite croissante qui à terme ne permettra plus de se dissimuler à la surface de la mer.
(46) Cellule plongée humaine et intervention sous la mer.
(47) Service hydrographique et océanographique de la Marine, Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, et Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines.
(48) Cf. la plaquette de présentation du plan Mercator 2021 publiée par la Marine nationale (https://www.defense.gouv.fr/).
(49) La Marine nationale ne dispose aujourd’hui d’aucun moyen pour descendre à plus de 2 000 m alors que le golfe de Gascogne dépasse par endroits 4 500 m.
(50) Lutte ASM, lutte contre les mines, lutte anti-torpilles, mise en œuvre des commandos marine depuis des unités navales (frégates, sous-marins).
(51) GAS : Groupe d’anticipation stratégique ; et GOSM : Groupe d’orientation stratégique militaire.
(52) Exemples : vecteur filoguidé doté d’un bras articulé, vecteur acoustique pouvant s’aimanter sur une coque de sous-marin le rendant indiscret et donc contraint d’abandonner sa mission.
(53) Du nom d’un ancien secrétaire de l’US Army : « si les méthodes du Pentagone ne changent pas, le budget 2050 servira à acheter un seul avion tactique, il sera confié 3 jours par semaine à l’US Air Force, 3 jours à la Navy et le septième au Marine Corps » Norman Augustine, 1978.
(54) La Chine posséderait plus de 50 000 mines de 30 modèles différents dont des mines-torpilles.
(55) Programme d’armement basé sur des drones dotés de sonars et des robots pour l’identification et la neutralisation des mines. Ce système remplacera les chasseurs de mines, les bâtiments remorqueurs de sonars en élargissant le domaine d’opération de 80 m à 300 m de profondeur.
(56) Dont des drones de surface et sous-marins déployés depuis des navires porteurs.
(57) Cour des Comptes, Rapport public annuel 2021, Tome II, p. 55 (https://www.ccomptes.fr/).
(58) Henrotin Joseph, « La guerre sous-marine en pleine mutation : enjeux technologiques et capacitaires », Areion 24 news, 9 septembre 2020 (https://www.areion24.news/).
(59) Écoles (ENSTA Bretagne, École navale), industriels (Naval Group, Thales, ECA, IXBlue, Orange marine, Sercel), institutionnels (Marine nationale, Shom, Ifremer).
(60) Philippe Édouard, « Discours du Premier ministre », 30 septembre 2017, Toulon (https://www.gouvernement.fr/).