Les armées américaines, similaires, mais non semblables aux françaises, sont, dans le cadre de la préparation à la haute intensité, un exemple à suivre dans le domaine du changement, dans leur capacité à définir des ambitions en phase avec la menace, dans leur esprit pionnier et dans la simplification des tâches ancillaires. Pour autant, il faut s’attacher aux modèles français, dans les domaines de la (course à la) technologie, de l’éthique, des ressources humaines, et se défier de l’exceptionnalisme. Cette analyse objective, s’affranchissant de l’illusion des « cercles de Titchener », aidera à construire les outils requis pour un parangonnage (benchmarking) objectif et une interopérabilité efficace en préparation de la haute intensité.
France–États-Unis : se défaire de l’illusion des cercles de Titchener pour mieux se préparer à la haute intensité
« L’Amérique est un des pays au monde où l’on étudie le moins et où l’on suit le mieux les préceptes de Descartes. »
Alexis de Tocqueville (1)
Dans Affirmatif !, bijou d’humour sur la vie militaire, Xavier Thiébaut notait que dans les années 2000, un simple « les Américains le font en Irak » suffisait à convaincre la majeure partie d’un auditoire militaire que l’on parlait d’une solution à adopter immédiatement (2). En 2020-2021, lors de ma scolarité au Centre des hautes études militaires (70e session du CHEM et 73e session « Politique de défense » de l’Institut des hautes études de défense nationale), alors que je revenais d’une mission de trois ans aux États-Unis comme officier de liaison, j’ai été frappé par le nombre de conférenciers qui en exprimant ouvertement leur défiance ou leur scepticisme quant à la politique et au comportement du président Donald Trump, englobaient dans la même critique les États-Unis et les Américains.
Cela m’amène à penser que, dans sa réflexion sur la haute intensité, le militaire français doit se garder de ses propres biais cognitifs pour éviter, soit le piège de l’admiration béate, soit les travers de l’American bashing. Seul, ce dessillement lui permettra d’envisager de transposer ou de refuser des éléments du modèle américain. Dessillement ? S’agit-il d’une illusion d’optique ? Oui ! Rappelons-nous d’Hermann Ebbinghaus, psychologue allemand de la fin du XIXe siècle et du début du XXe, qui donne son nom à une illusion d’optique dans laquelle deux cercles de même rayon apparaissent de taille différente selon qu’ils sont entourés par des cercles plus petits ou plus grands. Puis en 1901, Edward Titchener, psychologue britannique enseignant à Cornell University, aux États-Unis, diffuse cette illusion qui est depuis généralement plus connue sous le nom de « cercles de Titchener ». Or, la réalité de la comparaison franco-américaine correspond bien souvent à cette illusion, en relevant soit d’un quasi-complexe d’infériorité globale, soit d’une appréciation générale des différences plus importantes qu’elles ne le sont réellement, ainsi que l’illustre le schéma ci-dessous.
Fort de mon expérience, de mes rencontres et de mes réflexions, je propose dans cet article de sortir de cette illusion qui, selon que l’on base le raisonnement sur le cercle central ou les cercles périphériques est de toute façon un prisme déformant dans l’analyse des différences et des similitudes franco-américaines. Il s’agit d’appliquer à cette analyse des différences la vertu que l’on reconnaît généralement aux Anglo-Saxons : le pragmatisme. Ceci est la seule façon de distinguer les exemples à suivre comme les tendances dont il faut se garder, que l’on peut tenter de regrouper en grands thèmes.
Ainsi, une fois posé que nos armées sont similaires, mais non semblables, nous verrons, dans la perspective partagée du défi de la préparation à la haute intensité, que le pays dont nous sommes le plus vieil allié apparaît comme un exemple à suivre, en particulier dans le domaine de la mise en œuvre du changement, dans sa capacité à définir des ambitions en phase avec la menace, dans l’état d’esprit pionnier qui l’anime, et dans la simplification des taches ancillaires. Néanmoins, ceci ne doit pas cacher le besoin de s’attacher aux modèles français, dans les domaines de la (course à la) technologie, des réflexions éthiques, des ressources humaines, et afin de se défier du piège de l’exceptionnalisme. Enfin, nous verrons quels sont les outils à développer au service d’un parangonnage (3) objectif et d’une interopérabilité efficace en préparation d’un engagement de haute intensité.
Les deux plus importantes armées occidentales, similaires mais non semblables
Des analyses stratégiques convergentes et des valeurs identiques
Il y a du sens à comparer « the world’s most lethal ground combat force in history » (4) et la « première armée d’Europe » (5). Certes, les deux pays ont une analyse stratégique différente, les États-Unis identifiant les menaces auxquelles ils doivent faire face sous le vocable « 4+1 », regroupant la Russie, la Chine, l’Iran, la Corée du Nord et les organisations terroristes (« Violent Extremist Organizations ») (6), alors que la France place la menace terroriste au premier rang, suivie par la prolifération et le retour de la compétition stratégique entre puissances (7), mais elles s’accordent sur le besoin d’un modèle d’armée complet et la préparation aux Large Scale Combat Operations (LSCO) ou aux combats de haute intensité.
Au service de deux démocraties anciennes ayant chacune des histoires mondiales, les soldats français et américains partagent les mêmes valeurs, comme le montre l’analyse comparée du Soldier’s Creed (8) et du Code du Soldat (9) qui, dans des termes quasiment identiques, mettent en exergue le service du pays, la prépondérance de la mission reçue, l’aide au camarade blessé, la discipline et la fraternité d’armes.
Différences d’échelle et différences sociétales
Cependant, au-delà de ces points communs, toute analyse comparative doit impérativement prendre en compte et en tout premier les différences d’échelle, que l’on pourrait résumer par le triptyque 5-10-20, détaillé ci-dessous : en arrondissant les chiffres, la population américaine est 5 fois plus nombreuse que la population française, les effectifs militaires sont 10 fois plus importants et le budget de la Défense s’inscrit dans un rapport de 1 à 20. Cela signifie que, rapporté à chaque citoyen, les États-Unis disposent de deux fois plus de soldats pour les protéger et de quatre fois plus de budget pour financer ceux-ci.
Ensuite, l’étude des sociétés militaires et de leurs places dans les sociétés nationales fait apparaître bien plus de différences que l’on ne pourrait le penser au premier abord. Il convient de citer en particulier le modèle « vie sur base » des forces armées américaines, qui fait du soldat américain et de sa famille des citoyens pouvant vivre en quasi-autonomie (alimentaire, scolaire, médicale, sportive, sociale, religieuse), à la différence du soldat français qui, à de rares exceptions près, vit dans la Cité.
Une autre différence notable est la place des anciens militaires dans la vie politique, qu’elle soit locale (presque toutes les chambres de commerce comptent dans leurs rangs un ancien militaire chargé du lien avec les forces d’active) ou nationale ; à titre d’exemple, l’Administration Trump a compté dans ses rangs de nombreux anciens militaires, comme Michael Flynn, éphémère secrétaire à la Sécurité nationale, auquel a succédé Herbert Raymond (H.R.) McMaster, John Jelly, chef d’état-major de la Maison-Blanche (10), James Mattis, secrétaire à la Défense, et son successeur Mark Esper, qui a été officier d’active au sein des 10e et 82e Divisions aéroportées pendant dix ans après être sorti de West Point en 1986, dans la même promotion que Michael Pompeo, secrétaire d’État des États-Unis.
La référence américaine comme exemple à suivre
Une fois ce préambule posé, il convient d’admettre objectivement que le modèle militaire américain devrait dans certains cas inspirer le modèle français. Il ne sera pas question ici des domaines dans lesquels la référence américaine est incontournable, comme l’Otan, qui est plus un cadre qu’une référence et la langue anglaise qui est plus un outil qu’une référence. En revanche, cette partie s’appliquera à identifier des domaines dans lesquels la référence américaine est encore insuffisamment prise en compte alors qu’elle pourrait servir d’exemple, en tant que telle ou comme révélateur d’un pragmatisme efficace. L’exemple de la préparation à la haute intensité est frappant par la mise en œuvre du changement et la définition d’ambitions exigeantes en phase avec la menace identifiée, le tout soutenu par un état d’esprit « pionnier » général. Nous verrons également comment beaucoup de taches ancillaires sont allégées et permettent une meilleure efficience des militaires américains.
La mise en œuvre du changement : l’exemple des Cross Functional Teams et d’Army Futures Command
La France est souvent considérée comme rétive au changement : pour ne prendre que des exemples datant du dernier quart de siècle, entre « mammouth à dégraisser » (11), « État profond » (12) ou « réforme impossible » (13), les références ne manquent pas. A contrario, les États-Unis qui, comme l’avait déjà noté Alexis de Tocqueville (14), s’attachent plus aux résultats (output) qu’à la manière, allient pragmatisme et esprit cartésien. Cet état d’esprit général bénéficie grandement à l’institution qui, afin d’atteindre un objectif clair, intègre le changement et sa mise en œuvre rapide, ce dont la patrie de Descartes devrait s’inspirer.
En effet, lorsqu’elles en arrivent à la conclusion qu’une réforme structurelle doit être mise en œuvre, les armées américaines savent se modifier en profondeur et rapidement, en faisant un effort général porté par la hiérarchie et bénéficiant de beaucoup de publicité et de communication interne afin d’atteindre un objectif ambitieux. Ainsi, considérant qu’elle est empêtrée dans une gangue bureaucratique nuisant à son efficacité, l’US Army enclenche en moins d’un an un processus de réorganisation et de modernisation comme elle n’en avait pas vécu depuis la fin de la guerre du Vietnam.
Le 3 octobre 2017, le Chief of Staff of the Army (Cémat américain) définit les 6 priorités de modernisation de l’US Army, qui aboutissent à la création de 8 Cross Functional Teams trois jours plus tard (15). Puis, le 4 juin 2018, l’organe indispensable à la coordination efficace de ces équipes transverses, l’Army Futures Command (AFC) est créé à Austin, avec un objectif de Full Operating Capability (FOC) fixé (et atteint) pour le 1er juillet 2019. L’AFC bénéficie alors de l’affectation d’une ressource humaine de qualité et d’un portage sur les fronts baptismaux lors des grands événements militaires comme le AUSA Forum (Association of the US Army) afin d’atteindre un objectif clair et ambitieux : il s’agit de réduire de plus de moitié le cycle des acquisitions de matériel en coordonnant mieux le développement capacitaire. Les premiers résultats d’AFC, qui se définit comme « threat driven » et non « capability driven » sont scrutés à la loupe et montrent que l’US Army a été capable de convaincre les industriels. Si le système ne peut être répliqué en tant que tel en France, la définition d’un objectif considéré comme vital dans le cadre de la haute intensité puis la concentration des efforts mis en place pour atteindre au plus vite celui-ci doit nous inspirer.
Ambitions exigeantes en phase avec la menace identifiée : exercices brigades et divisions
Dans le cadre de cette préparation à la haute intensité, l’US Army a identifié en 2019 dix-sept Critical Large Scale Combat Operations Gaps qui sont à combler d’ici 2028. Si la liste exacte de ces lacunes comprenant des équipements comme des savoir-faire est classifiée (16), il faut savoir qu’elle est prise en compte dans les efforts à faire dans les dix prochaines années, que ce soit en termes de matériel, d’entraînement ou de maîtrise tactique et technique. Ce travail est le fruit de l’analyse de 40 000 pages de documents (rotations en centre d’entraînement, wargames, exercices de postes de commandement), et doit être mis à jour tous les 4 ans. Cela représente un travail colossal, mais qui correspond au travail d’analyse de la situation nécessaire avant de définir les efforts. Cette liste définit les lacunes qui ne seront pas comblées par les travaux des CFTs, qui concernent huit domaines seulement et ne prennent donc pas en compte certaines problématiques comme le franchissement ou le ravitaillement en carburant.
Cela permet de faire d’ores et déjà travailler, lors d’exercices particulièrement exigeants (un exercice de contrôle de division Warfighter dure ainsi 10 jours et 9 nuits sur un rythme très soutenu, ce qui représente une exigence plus importante que la plupart des exercices français) et avec les équipements actuellement disponibles chaque grande unité dans son domaine (combat de contact pour la brigade, combat indirect pour la division, combat dans la profondeur pour le corps d’armée), selon des scénarios haute intensité et d’en tirer des Retours d’expérience (Retex) permettant de combler ces 17 gaps.
Alors que l’horizon 2030-2040 apparaît aux yeux des Américains comme un horizon probable d’engagement de haute intensité, la boucle rapide Analyse-Constat-Entraînement-Prise en compte apparaît comme particulièrement vertueuse.
L’état d’esprit pionnier au service de la préparation à la haute intensité
Le pionnier s’aventure dans les espaces inconnus. Il pense « out of the box ». Dans les armées américaines, la pensée originale est encouragée, l’esprit pionnier innerve l’institution militaire et la diffusion de cette pensée est assurée grâce en particulier à son accès libre via Internet (FM 3-0 (17), Essential to success (18), LSCO Book Set (19)).
Le pionnier n’a pas peur de l’échec et considère même que celui-ci est souvent un point de passage obligé sur le chemin de la réussite (« learning from failure »). En conséquence, les armées américaines essaient tous azimuts ; le domaine de la logistique regorge de ces innovations relativement technologiques (le fardier sur chenilles XRP – eXpeditionary Robotic Platform –, les pleins de carburant automatisés AGVR – Autonomous Ground Vehicle Refueling), comme très basiques (le cric pneumatique gonflable HLS – Heavy Lift System).
Fortes de leurs liens privilégiés avec les armées américaines, et pouvant se contenter de reprendre à leur compte des concepts validés outre-Atlantique, les armées françaises devraient s’inspirer encore plus de cet esprit pionnier et de son corollaire, le partage ouvert de l’information.
L’allègement des taches ancillaires de la vie personnelle
Pour clore ce chapitre, notons que le militaire américain est moins perturbé que le militaire français par l’exécution de tâches ancillaires chronophages.
Certes, le Plan Familles du Minarm montre l’identification de ce point, mais au-delà des aides matérielles existantes (comme l’indemnité garnison – Igar – par exemple), il conviendrait de s’inspirer de l’aide « physique » offerte aux militaires américains dans le cadre d’une relocation. Ainsi, le déménagement comprend l’emballage intégral des effets (sur 3 jours), ce qui, à la différence de la France, évite (bien souvent au conjoint) de faire les cartons soi-même tard dans la soirée en commençant plusieurs semaines à l’avance. Les enfants de militaires bénéficient de places (voire d’écoles) réservées ce qui évite la course aux écoles, bien connue des militaires français et de leurs familles. Enfin, l’effort porté sur le logement des familles de militaires va être encore intensifié : à elle seule, l’US Army a décidé en janvier 2021 d’un investissement de 1,1 milliard de dollars afin d’améliorer le parc immobilier (20), alors que le militaire français muté doit, dans la majorité des cas, courir les petites annonces pour se loger faute d’un parc immobilier réservé suffisant.
Il est évident que cette tranquillité d’esprit favorise des mutations sereines et une rentabilité accrue des personnels mutés, ce que la France gagnerait elle aussi à développer, en s’inspirant, toutes proportions gardées, de l’exemple américain.
La référence-différence ou pourquoi préserver la spécificité française
Si l’exemple américain doit nous inspirer dans certains cas comme cela a été montré plus haut, il convient en même temps de savoir dans certains domaines ne pas le suivre pour des raisons de budget, d’éthique, de modèle des ressources humaines et de société.
Les dangers de la (course à la) technologie
En 2017, dans une étude sur les mirages de la guerre, le très sérieux blog War on the Rocks, connu pour ses articles de grande qualité, définit six illusions majeures héritées des conflits récents, dont deux illusions technologiques ; la première de celles-ci est que la technologie américaine surpassera toujours celle de ses adversaires et la seconde que les munitions de haute technologie seront disponibles en quantité suffisante (21). Néanmoins, en dépit de cette analyse, la « culture de guerre américaine peut (toujours) se caractériser par (…) une tendance à exagérer la stratégie des moyens, la supériorité matérielle et technologique étant perçue comme la clé du succès » comme l’avaient déjà analysé Qiao Liang et Wang Xiangsui dans La guerre hors limites (22). À titre d’illustration, notons que sept des huit points-clés des opérations multidomain définis dans FM 3-0 reposent sur, ou sont des capacités techniques ou technologiques (23).
Au-delà d’admettre qu’il ne faut pas « considérer la guerre comme un marathon [de] technique militaire, [mais] plutôt […] comme une épreuve d’esprit, de courage, de sagesse et de stratégie (24) », il faut aussi identifier les autres pièges qui guettent les alliés d’une grande puissance technologique (25). Certes les États-Unis sont en avance, en particulier dans les champs de l’Intelligence artificielle (IA), du traitement de la donnée, des robots autonomes, et leur aide dans ces domaines sera primordiale, mais la France ne peut se permettre de s’approcher des pièges que sont l’envolée des dépenses, la dépendance à la technologie, « l’entrée en conflit des systèmes d’armes (…) lourds et complexes, avec les principes simples du combat réel (26) », et la perte des savoir-faire dégradés, car cela ne correspond ni à ses moyens, ni à sa culture. Tout en recherchant l’interopérabilité, qui sera la clé du succès français dans un contexte de haute intensité, il faut aussi cultiver ce qui a fait le succès des armes de la France, en particulier sa capacité à combattre dans un environnement fortement dégradé : plutôt que de se reposer sur la supériorité technologique de son avionique, le pilote de chasse français doit toujours savoir faire preuve de créativité dans les combats aériens et plutôt que de miser sur le « GPS imbrouillable », l’artilleur doit pouvoir continuer à « sortir des coordonnées topographiques » sans aide satellitaire, ce qui suppose dans tous les cas une formation tactique et technique adaptée, et une expression claire du besoin en équipement.
Réflexions éthiques : la place de l’homme dans la boucle de décision et le soldat augmenté médicalement
Dans un conflit de haute intensité, face au déluge d’information, au nombre de décisions à prendre et à la pression des événements, réduire le temps de la boucle OODA (27) grâce à l’appui de l’IA, et disposer de soldats plus forts et plus résistants est une ambition partagée par les États-Unis et la France. En revanche, les approches, en particulier à travers le prisme éthique, sont différentes et ne doivent pas être simplement répliquées.
HITL ou HOTL ? Une simple lettre fait toute la différence. Ainsi, il a généralement été admis jusqu’à maintenant par les pays occidentaux, y compris les États-Unis, que dans les systèmes et les processus où l’IA se développait, il fallait garder un humain dans la boucle (Human In the Loop, HITL (28)). Ceci est réaffirmé dans la directive du Département de la Défense (DoD) sur les systèmes d’armes autonomes (29), mais certaines voix, et non des moindres, proposent plutôt de garder un humain en simple supervision de la boucle (Human On the Loop, HOTL (30)), donc plus loin de celle-ci afin de gagner du temps. Ce discours est par exemple porté par le général d’armée aérienne Terrence J. O’Shaughnessy, commandant le US Northern Command et le North American Aerospace Defense Command (NORAD), qui a tenu ces propos lors d’une audition devant le Sénat, le 13 février 2020 (31). Certes, le NORAD, qui met en œuvre les missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) ne représente pas l’ensemble des forces armées américaines, mais nous retrouvons là encore une foi absolue en la technologie. Or, au pays de Rabelais, il ne faut pas oublier que « science sans conscience n’est que ruine de l’âme » (32), et le passage total de HITL à HOTL, éloignant l’humain de la boucle de décision, en éloignerait également la conscience, car celle-ci n’est pas possédée par les machines. Si on peut imaginer que l’on pourrait choisir l’itinéraire d’un convoi logistique totalement autonome (Robotic and Autonomous Systems, RAS) en format HOTL, la décision de mise en œuvre de contre-mesures face à une attaque nucléaire, comme cela est prôné par le général O’Shaughnessy, n’est pas du même ordre.
Il convient aussi de se défier du soldat médicalement augmenté, qui est un concept sérieusement étudié outre-Atlantique. Même s’il ne s’agit que d’un document de prospective, le concept des opérations multi-domaines 2025-2045, et en particulier sa partie Science and Technologies (S&T, appendix C, p. 61-68) (33), envisage ainsi dans un horizon proche l’utilisation généralisée de substances médicamenteuses, les nutraceutiques (34) et les drogues nootropiques (35), et de prothèses neuronales permettant aux soldats de « s’interfacer » directement avec les machines. L’armée française, elle, doit continuer à s’interdire les augmentations invasives modifiant humainement le soldat, comme cela est réaffirmé dans le Cahier de la RDN consacrés au soldat augmenté publié en février 2018 (36), car on s’approcherait du transhumanisme.
Commandement : de l’importance des cadres de contact
Dans l’hypothèse d’un engagement de haute intensité, le chef, quel que soit son niveau, devra accepter de beaucoup déléguer à ses échelons subordonnés pour éviter au mieux un engorgement de sa chaîne de commandement, au pire son explosion. Pour cela, l’implication permanente des cadres de contact et leur liberté d’action est primordiale. Aux États-Unis, l’équivalent de la « fonction commandement » s’appelle « Command and Control », et de nombreux grands chefs ont fait le constat que le contrôle l’emportait souvent sur le commandement et qu’un rééquilibrage était nécessaire. La subsidiarité est donc un des grands enjeux de la philosophie du « Mission Command » de l’Army ou du « Centralized Control, Decentralized Execution » prôné au sein de l’US Air Force. De même, une certaine déshumanisation des relations de commandement est à éviter absolument.
Le Cémat américain a, dès sa prise de fonction, à l’été 2019, instauré la politique du « Peoplefirst » (l’humain en premier), comme sa priorité n° 1 en annonçant que les actes de racisme, d’harcèlement et d’attouchements sexuels, ainsi que les suicides constituaient la menace stratégique majeure à l’heure actuelle. Ainsi, suite à l’enquête diligentée après un meurtre sur la base de Fort Hood, au Texas, 14 hauts gradés ont été, soit suspendus (dont l’adjoint du III e Corps et le commandant de la 1re Cavalry Division), soit radiés de l’US Army en décembre 2020 (37) après que les défauts des cadres de contact vis-à-vis des Negative Behaviors (comportements déviants) aient été soulignés.
Or, si certains manquements des cadres s’expliquent en partie par le rythme et la durée des déploiements, des changements de fonction (tous les ans en moyenne) et des mutations (tous les deux ans), il faut aussi noter qu’une politique favorisant des relations humaines plus techniques qu’interpersonnelles leur a permis de se développer. Dans cette politique, notons le principe de no fraternization (un cadre doit éviter de recevoir chez lui des membres de son unité), la multiplication des cellules de contrôle (le Sexual Harassment/Assault Reponse and Prevention Program – SHARP – et le Committee for Resiliency and Readiness Board – CR2C), l’absence d’entretiens de commandement et de bilans professionnels de carrière, l’éloignement des baraquements des soldats du PC de leurs chefs, un barème de punitions peu flexible (et permettant la sanction d’une action de la vie privée) et, in fine, l’incapacité pour le commandement de proximité à exercer ses prérogatives. L’exemple américain doit nous engager à continuer à faire l’effort sur le comportement de nos cadres de contact qui doivent pouvoir agir dans un milieu à la fois exigeant et bienveillant, favorisant la subsidiarité et le bon sens.
Le piège de l’héroïsation généralisée et de l’exceptionnalisme
À l’aube de possibles engagements de haute intensité, il convient d’attribuer le qualificatif de héros avec discernement et d’améliorer la capacité de résilience de la nation tout entière en maintenant un lien armée-nation qui favorise la connaissance et la compréhension mutuelle plutôt que la coexistence de deux sociétés séparées.
Un militaire français vivant aux États-Unis est toujours touché des marques d’admiration et de respect que le peuple américain prodigue (depuis une quarantaine d’années) à son armée. Si le « Military Appreciation Day » à l’école comme dans les clubs de football, ou le « Military Discount » dans la quasi-totalité des commerces sont des marques de reconnaissance que l’on ne peut qu’envier, en revanche le « Salute to Service » hommage collectif de l’ensemble des spectateurs à un membre des forces armées présent dans le public tel qu’il est pratiqué entre deux périodes d’un match de baseball par exemple, pourrait participer à donner une image faussée du monde militaire. En effet, cette mise à l’honneur en vient à héroïser de la même façon un cuisinier de six mois de service ou un Staff Sergeant ayant été déployé 10 fois au combat en Irak et en Afghanistan. Gommant la célébration de la vaillance de certains au bénéfice de celle de l’engagement de tous, et bien que favorisant en cela le recrutement, elle héroïse néanmoins uniformément tous les militaires aux yeux de la société, gommant ainsi la reconnaissance des vrais héros (38).
À côté de cela, et comme l’expliquent trois chercheurs de l’Université d’Austin (Texas), les militaires américains se voient et sont vus comme des « saints laïcs » (39). Or, si l’appellation peut sembler flatteuse, ces chercheurs expliquent qu’elle recouvre en fait une réalité peu enviable qui dépasse la singularité militaire pour atteindre l’extraordinaire : armée professionnelle, comme en France, mais ayant subi des pertes beaucoup plus importantes (4 902 morts en Irak, 3 577 en Afghanistan selon le site de référence iCasualties (40)), l’armée américaine est marquée par un fort taux d’endorecrutement (on parle de « warrior caste »), par des viviers de recrutement très limités géographiquement, et par une coupure au quotidien d’avec la société civile. Les principales conséquences en sont un isolement des mondes militaire et civil, une participation au service de la nation (par classe sociale, genre et ethnie (41)) inégalitaire et l’émergence d’un patriotisme par procuration où l’acclamation du soldat en uniforme tient lieu d’engagement. Cependant, les évolutions de la société américaine étant en général préfigura trices de celles de la société française, il convient, tout en continuant d’améliorer la condition militaire, de se garder de cet exceptionnalisme comme de l’héroïsation généralisée précédemment décrite afin de conserver la force et la réalité du lien armée-nation.
Les outils à développer au service d’un parangonnage objectif et d’une interopérabilité efficace en préparation d’un engagement de haute intensité
Il s’agit, dans un premier temps, d’instruire tous les acteurs et jusqu’aux plus bas échelons, des différences culturelles. Puis, les comparaisons rationnelles, pragmatiques et décomplexées des deux systèmes, selon les prismes évoqués précédemment permettront de développer avec précision les outils nécessaires à une interopérabilité interarmées renforcée : un cadre, un constat et un mesureur d’interopérabilité.
Un cadre : une vision stratégique ou Strategic Vision Statement interarmées
Le 10 juillet 2015, le général Bosser, Cémat, et le général Odierno, son homologue américain, ont signé un Strategic Vision Statement (SVS). Document de référence utilisé quotidiennement par les deux armées, et en tout premier par les officiers de liaison Terre aux États-Unis, ce texte décrit à la fois un cadre général de coopération et des objectifs d’interopérabilité clairs, comme en particulier celui de placer une division d’un pays sous les ordres d’un corps d’armée de l’autre et vice-versa (42).
Le 28 novembre 2016, Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense et Ashton Carter, secrétaire à la Défense, ont signé un Statement of Intent qui définit le cadre de la coopération ministérielle (43).
À l’heure où le multidomain est reconnu de part et d’autre de l’Atlantique, il paraît particulièrement utile de réfléchir en complément à la rédaction d’un document faisant la jointure des deux précédents au niveau opératif et interarmées, qui définirait une ambition commune, déclinerait des objectifs d’interopérabilité particuliers, marquerait des limites et servirait de référence identique pour les officiers traitants des armées des deux pays.
Un constat : l’identification des lacunes capacitaires
À l’instar de ce qui a été fait aux États-Unis pour l’US Army, il serait utile d’identifier nos lacunes capacitaires. Le mot « capacitaire » ici ne recouvre pas uniquement les notions d’équipement, mais aussi celui des savoir-faire technique et tactique. Ces lacunes pourraient être identifiées dans un contexte « mono-couleur » (une seule armée engagée), interarmées ou multinational, et en fonction des types de théâtre : franco-français, type Serval ou Sentinelle, européen type frontière russe, en appui des États-Unis type Pacifique, ou hybride/sous le seuil. Le tableau ci-dessous illustre les prismes d’approche de cette identification qui permettrait aux armées françaises de définir leurs besoins en équipement comme en savoir-faire.
Un outil interarmées d’évaluation de l’interopérabilité bilatérale
Avec les exercices Joint Warfighting Assessment 2018 et 2019, les exercices Defender 2020/JWA 2020 et Warfighter 2021-4, l’US Army et l’Armée de terre ont pris conscience du besoin d’un outil d’évaluation de leur interopérabilité afin de capitaliser sur les acquis et d’améliorer leurs points faibles, comme l’explique le document « French Participation in JWA: How to Prepare our Future Together » (44).
Cette interopérabilité repose sur des relations humaines, renforcées par des échanges dans la durée, des processus et des outils techniques. Concernant les armées de terre, les domaines d’évaluation sont les suivants, comme le précise le Multinaltional Interoperability Handbook édité en 2016 par l’US Army (45) : commandement, mêlée, appuis cinétiques et non cinétiques, agencement de l’espace terrestre (compris dans le domaine suivant) logistique, renseignement, protection. Dans la démarche bilatérale entre les armées de terre française et américaines, les domaines cyber et simulation ont été ajoutés. Dans la pratique, il s’agit de noter de 0 à 3 les unités impliquées selon leur niveau d’interopérabilité (46).
En plus de l’affinage du processus d’évaluation de l’interopérabilité « terrien » il convient maintenant de définir un processus interarmées, qui pourra s’appuyer sur l’existant et qui permettra l’atteinte des objectifs définis dans le SVS interarmées défini plus haut. Si l’échelle américaine, le caractère de fonctionnement assez « tuyaux d’orgue » des Services et la différence de périmètre de responsabilité entre le Chef d’état-major des armées (Céma) et le Chairman of the Joint Chiefs of Staff (son homologue américain) paraissent rendre ce but difficile à atteindre, le multidomain, interarmées par essence, y aidera.
* * *
La sortie de l’illusion des cercles de Titchener permettra aux armées françaises d’analyser pragmatiquement les choix américains devant être pris en exemples, comme ceux à ne pas suivre dans le cadre de leur préparation à la haute intensité. Puis dans le cadre bilatéral de cette même préparation, la création d’outils adaptés permettra d’avancer vers les objectifs clairement définis d’une interopérabilité interarmées encore plus efficiente.
Débarrassés de leurs préjugés, forts d’une bonne connaissance de leur plus grand allié, et conscients des différences culturelles grâce en particulier à un recours systématique à l’expertise des officiers de liaison, nantis d’un cadre interarmées stratégique clair, les militaires français pourront ainsi avoir des échanges encore plus constructifs pour le plus grand bénéfice de l’interopérabilité entre les forces armées des deux pays. À titre d’exemple, le général d’armée Paul Funk, directeur du Training and Doctrine Command a été particulièrement intéressé par le concept de « masse agile » développé dans la doctrine exploratoire Scorpion (47), disant à l’auteur de ces lignes qu’il envisageait « d’emprunter ce concept » (48).
Éléments de bibliographie
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Bergen Peter, Trump and his generals, the cost of chaos, Penguin Press, 2019, 386 pages.
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Centre de doctrine et d’éducation au commandement – CDEC (dir.), 100 ans après 1918. Vaincre au XXIe siècle, Acte du colloque de pensée militaire du 6 février 2018 à l’École militaire.
CREC St-Cyr (dir.), Le soldat augmenté : Les besoins et les perspectives de l’augmentation des capacités du combattant, Cahier de la RDN, décembre 2017 (https://www.defnat.com/e-RDN/sommaire_cahier.php?cidcahier=1138).
Debray Régis, Civilisation. Comment nous sommes devenus américains, Gallimard, 2017, 233 pages.
Departement of Defense, 2018 United States of America National Defense Strategy.
Headquarters, Department of the Army, Field Manual (FM) 3-0, Operations, Headquarters, Department of the Army, 2017 (https://armypubs.army.mil/epubs/DR_pubs/DR_a/pdf/web/ARN6687_FM 3-0 C1 Inc FINAL WEB.pdf).
Headquarters, Department of the Army, Army Doctrine Reference Publication (ADRP) 3-0 Unified Land Operations, 2016.
Large-Scale Combat Operations Book Set, Combat Studies Institute, 9 volumes, 2018.
Liang Qiao et Xiangsui Wang, La guerre hors limites, Payot et Rivages, 2006, 310 pages.
Ministère des Armées, Actualisation stratégique 2021, 21 janvier 2021 (https://www.defense.gouv.fr/dgris/presentation/evenements/actualisation-strategique-2021).
Montenon (de) Philippe, « The Art of the Deal : réflexions sur la relation de défense franco-américaine », Cahier de la RDN « Un monde en turbulence - Regards du CHEM 2019 – 68e session », p. 64-74 (https://www.defnat.com/e-RDN/vue-article-cahier.php?carticle=141).
Thiebaut Xavier, Affirmatif, Chiflet & Cie, 2010, 117 pages.
Tocqueville (de) Alexis, De la démocratie en Amérique (1835 et 1840), Institut Coppet, 2012. ♦
(1) Tocqueville (de) Alexis, De la Démocratie en Amérique (1835), 12e édition, Institut Coppet, 2012, 635 pages (https://www.institutcoppet.org/wp-content/uploads/2012/01/De-la-d%E9mocratie-en-Am%E9rique.pdf), p. 392.
(2) Thiebaut Xavier, Affirmatif, Chiflet & Cie, 2010, 117 pages, p. 33.
(3) Ou benchmarking, en anglais.
(4) Milley Mark (Chief of Staff of the US Army) et Esper Mark (Secretary of the Army), US Army: Ready Today, Investing in Tomorrow, FY18 Accomplishments, p. 3 (https://www.army.mil/e2/downloads/rv7/army_fy18_accomplishments.pdf?st).
(5) AFP, « Macron à Mourmelon salue la modernisation de l’Armée de terre », L’Express, 1er mars 2018 (https://www.lexpress.fr/actualites/1/politique/macron-a-mourmelon-salue-la-modernisation-de-l-armee-de-terre_1989044.html).
(6) Summary of the 2018 United States of America National Defense Strategy, p. 1 (https://dod.defense.gov/Portals/1/Documents/pubs/2018-National-Defense-Strategy-Summary.pdf).
(7) Ministère des Armées, Actualisation stratégique 2021, p. 14 (https://www.defense.gouv.fr/content/download/604385/10165550/file/Actualisation strat%C3%A9gique 2021.pdf).
(8) Soldier’s Creed (https://www.army.mil/values/soldiers.html).
(9) Code du Soldat, juin 2020 (https://www.defense.gouv.fr/terre/actu-terre/le-code-d-honneur-du-soldat-francais).
(10) Ce poste est un poste civil et ne correspond pas à celui de Chef de l’état-major particulier du président de la République (CEMP) en France.
(11) Allègre Claude, 24 juin 1997, à l’occasion d’une table ronde avec les syndicats enseignants.
(12) Macron Emmanuel, 31 janvier 2019, dans un entretien à Libération (https://www.liberation.fr/france/2019/01/31/emmanuel-macron-il-faudra-peut-etre-repondre-par-une-societe-du-debat-permanent_1706723/) et le 21 août 2019, en conférence de presse.
(13) Tenzer Nicolas, France : la réforme impossible ?, Flammarion, 2004, 264 pages.
(14) Voir par exemple le chapitre X de la première partie du tome III, « Pourquoi les Américains s’attachent plutôt à la pratique des sciences qu’à la théorie », De la Démocratie en Amérique, op. cit., p. 416-421.
(15) Secretary of the Army, Army Directive 2017-24 (https://armypubs.army.mil/epubs/DR_pubs/DR_a/pdf/web/ARN6101_AD2017-24_Web_Final.pdf).
(16) Mais son existence est connue de tous, comme le prouvent les discours publics, voir par exemple Swart-Entwistle Tisha, « Lundy retires at Fort Leavenworth », US Army, 3 février 2020 (https://https://www.army.mil/article/231700/lundy_retires_at_fort_leavenworth/).
(17) Field Manuel 3-0 Operations, octobre 2017 (https://armypubs.army.mil/epubs/DR_pubs/DR_a/pdf/web/ARN6687_FM 3-0 C1 Inc FINAL WEB.pdf). Il s’agit du manuel de doctrine des opérations de l’armée de terre américaine.
(18) Essential to Success. Historical Case Studies in the Art of Command at Echelons Above Brigade, édité par The Army University Press, 2017 (https://www.armyupress.army.mil/Books/Browse-Books/Command/Essential-to-Success/). À travers 20 chapitres abordant chacun un cas historique précis, ce livre décrit les opérations de haute intensité par niveau (division, corps d’armée, armée).
(19) LSCO Book Set (https://armypubs.army.mil/epubs/DR_pubs/DR_a/pdf/web/ARN6687_FM 3-0 C1 Inc FINAL WEB.pdf). Il s’agit d’une série de 7 livres qui étudient sous l’angle historique et par spécificité (feux, logistique, déception, etc.) différents cas emblématiques des opérations de haute intensité des cent dernières années.
(20) Porte-parole de l’armée, « Army approves $1.1 billion for housing improvements on six installations », US Army, 27 janvier 2021 (https://www.defense.gouv.fr/dgris/presentation/evenements/actualisation-strategique-2021).
(21) Barno David et Bensahel Nora, « Mirages of War: Six Illusions From our Recent Conflicts », War on the Rocks, 11 avril 2017 (https://warontherocks.com/2017/04/mirages-of-war-six-illusions-from-our-recent-conflicts/).
(22) Liang Qiao et Xiangsui Wang, La guerre hors limites, Payot et Rivages, 2006, 310 pages, p. 9.
(23) Field Manuel 3-0 Operations, op. cit., p. 1-17.
(24) Liang Q. et Xiangsui W., op. cit., p. 143.
(25) Ceci a en particulier été noté par les forces armées allemandes, le général allemand Frank Leidenberger l’ayant exprimé publiquement lors du salon de l’AUSA (Association of the US Army), le 11 octobre 2017.
(26) Liang Q. et Xiangsui W., op. cit., p. 143.
(27) OODA : Observe, Orient, Decide and Act ; Observer, s’Orienter, Décider et Agir.
(28) HITL : la décision finale appartient à un être humain.
(29) Autonomy in Weapon Systems, Directive 3000.09, DoD, 2012, mise à jour en 2017 (https://www.esd.whs.mil/Portals/54/Documents/DD/issuances/dodd/300009p.pdf).
(30) HOTL : il est possible, mais pas obligatoire, à l’être humain d’intervenir dans le processus de décision.
(31) Senate Armed Services Committee, « Déclaration du général Terrence J. O’Shaughnessy », Sénat, 13 février 2020 (https://www.armed-services.senate.gov/imo/media/doc/OShaughnessy_02-13-20.pdf).
(32) Rabelais François, Pantagruel (1532), chapitre VIII (http://www.coillet.eu/Site/Documents/Pantagruel.pdf).
(33) The US Army Concept for Multi-Domain Combined Arms Operations at Echelons Above Brigade 2025-2045, version 1.0, septembre 2018 (https://usacac.army.mil/sites/default/files/documents/ArmyEABConcept.pdf).
(34) Les nutraceutiques (nutraceuticals) sont des nutriments pharmaceutiques.
(35) Les drogues nootropiques sont des substances permettant une modulation de la physiologie et de la psychologie, et impliquant une augmentation cognitive.
(36) « Le soldat augmenté ; les besoins et les perspectives de l’augmentation des capacités du combattant », Cahier de la RDN, février 2018 (https://www.defnat.com/pdf/cahiers/Cahier Le Soldat augment%C3%A9 (C).pdf).
(37) Kates Graham, « 14 fired or suspended following Fort Hood investigation into Vanessa Guillen’s death », CBS News, 9 décembre 2020 (https://www.cbsnews.com/news/fort-hood-vanessa-guillen-investigation-army-fires-suspends-14-officers/).
(38) En 2018, 50 % des Américains considéraient que tous les membres des forces armées méritaient la qualification de héros. À titre de comparaison, le taux de réponses positives à la même question était de 15 % en Allemagne et de 32 % au Royaume-Uni. Vandiver John, « Half of Americans surveyed say all servicemembers are heroes », Star and Stripes, 27 septembre 2018 (https://www.stripes.com/news/half-of-americans-surveyed-say-all-servicemembers-are-heroes-1.549349).
(39) Bryant Susan, Swaney Brett et Urben Heidi, « From Citizen Soldier to Secular Saint: The Societal Implications of Military Exceptionalism », Texas National Security Review, vol. 4, n° 2, printemps 2021 (https://tnsr.org/2021/02/from-citizen-soldier-to-secular-saint-the-societal-implications-of-military-exceptionalism/).
(40) Total des décès en Afghanistan au 3 mars 2021 (http://icasualties.org/App/AfghanFatalities).
(41) À la différence de ce qui est pratiqué en France, l’identification selon ces trois critères est naturelle dans toutes les études sociologiques américaines.
(42) Pour la partie française, cet objectif a été atteint lors de l’exercice Warfighter 21-4 en avril 2021.
(43) Déclaration d’intention conjointe de Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense de la République française et Ashton Carter, secrétaire à la Défense des États-Unis, 28 novembre 2016 (https://www.defense.gouv.fr/content/download/491285/7853713/Declaration conjointe JY Le Drian - A Carter - FR.pdf).
(44) Colonel Marchand Pierre-Olivier, lieutenant-colonel de Malartic Antoine et lieutenant-colonel Konieczny Nicolas [officiers français de liaison aux États-Unis], French participation in JWA: How to Prepare our Future Together (https://usacac.army.mil/sites/default/files/publications/17990_0.pdf).
(45) Center for Army Lessons Learned (CALL), Multinational Interoperability Handbook, juillet 2016 (https://usacac.army.mil/sites/default/files/publications/16-18.pdf).
(46) 0 : Incompatibilité, 1 : Dé-conflictées, 2 : Compatibles, 3 : Intégrées.
(47) Commission de la défense nationale et des forces armées, « Audition du général Facon Pascal, commandant le Centre de doctrine et d’enseignement du commandement (CDEC) », Assemblée nationale, 25 septembre 2018 (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/comptes-rendus/cion_def/l15cion_def1718074_compte-rendu).
(48) Général d’armée Funk Paul, commandant le Training and Doctrine Command, entretien avec l’auteur, 11 septembre 2019.