Depuis plusieurs décennies, sous le prisme des « dividendes de la paix » le concept stratégique de l’Otan a relativisé le rôle des armes nucléaires pour assurer la sécurité collective de l’Alliance. La guerre en Ukraine, déclenchée en février 2022, démontre qu’il serait illusoire et particulièrement risqué d’affaiblir ce pilier de la stratégie otanienne. Car la dissuasion nucléaire empêche la guerre sous ses formes les plus graves, c’est-à-dire celles qui pourraient conduire à l’anéantissement de notre Nation ou d’un membre de l’Alliance. Aussi, il semble intéressant d’étudier comment le concept français de dissuasion peut servir de modèle de réflexion et de renforcement de la crédibilité de la dissuasion nucléaire de l’Otan.
Vers un renforcement de la dissuasion nucléaire de l’Otan ?
« Puisqu’un homme et un pays ne peuvent mourir qu’une fois, la dissuasion existe dès lors qu’on a de quoi blesser à mort son éventuel agresseur, qu’on y est très résolu et que lui-même en est bien convaincu ». Cette citation du général de Gaulle (1) décrit clairement ce que souhaitait le président de la République dans son action pour créer la force de frappe française, pilier de notre système de défense. Elle peut également s’appliquer à la dissuasion nucléaire de l’Otan, dans la mesure où elle a été créée par les États-Unis pour assurer une défense qui empêche le retour de la « guerre » en Europe. Car la dissuasion nucléaire empêche la guerre. Pas toutes les formes de guerre, certes, mais les guerres les plus graves, c’est-à-dire celles qui pourraient conduire à l’anéantissement de notre Nation ou d’un membre de l’Alliance. Pour fonctionner, sa crédibilité doit être totale.
Aussi, à l’heure où la guerre en Ukraine remet le fait nucléaire et la dialectique de la dissuasion au premier rang de l’actualité internationale (2), il paraît important d’étudier où se situe la dissuasion nucléaire de l’Otan dans ce troisième âge nucléaire, avant d’établir les éléments de convergence des postures française et de l’Alliance atlantique au profit de la défense collective, tout en prenant en compte les enjeux à venir, notamment pour les pays européens de l’Otan.
La dissuasion nucléaire de l’Otan dans le troisième âge nucléaire
La dissuasion élargie : un instrument nécessaire
Le fait nucléaire a profondément transformé les relations internationales entre les États depuis le 6 août 1945 et la destruction instantanée avec une seule bombe nucléaire de la ville d’Hiroshima, à la fin de la Seconde Guerre mondiale. La puissance démesurée d’une telle arme a entraîné une véritable compétition entre puissances pour la maîtrise de « l’arme absolue » (3). En particulier, la guerre froide a conduit à une course aux armements jusqu’à l’effondrement du bloc soviétique, pendant ce qu’on peut appeler le premier âge nucléaire (4). Dans ce cadre, la création et le renforcement de l’Otan se sont réalisés en incluant le fait nucléaire dès ses origines. En effet, le premier concept stratégique de l’Otan de 1949, année d’accession de l’URSS au statut de puissance nucléaire (5), stipulait que l’Alliance devait « assurer la possibilité de procéder rapidement à des bombardements stratégiques comportant l’utilisation de tous les engins sans exception » (6). Puis, l’accélération de la course aux armements nucléaires et la recherche d’un équilibre dissuasif ont entraîné les États-Unis à proposer le partage de leur dissuasion : la « dissuasion élargie » se traduit par une affectation et un déploiement sur le sol européen d’armes nucléaires américaines (1954), c’est-à-dire la mise en avant de la possibilité d’utiliser des armes nucléaires américaines pour protéger leurs alliés du Vieux Continent.
L’augmentation de la puissance soviétique à la fin des années 1950 entraîne des réactions majeures dans un nombre important de pays, dont la République fédérale d’Allemagne (RFA), qui envisage à leur tour d’acquérir « la bombe ». Ce constat entraînera les États-Unis à aller encore plus loin dans le concept de dissuasion élargie, afin de poursuivre le renforcement de la capacité de défense de l’Europe et de stopper la prolifération nucléaire, source d’inquiétude majeure (7). Aussi, à compter de 1957, les États-Unis attribuent une responsabilité nucléaire à l’Otan en intégrant le Supreme Allied Commander in Europe (SACEUR), le général en chef des forces de l’Otan – et donc l’Alliance – dans la chaîne décisionnelle de l’emploi de ces armes américaines, affectées à l’Alliance. Ce rôle sera renforcé par la création, en 1963, de la Multilateral Force (MLF), qui comprend de plus en plus de moyens dédiés à la dissuasion nucléaire otanienne (sous-marins, bombardiers, armes nucléaires tactiques) mis en œuvre par des équipages de nationalités différentes, puis du Nuclear Planning Working Group (NPWG) intégrant huit pays, dont l’Allemagne qui souhaitait vivement peser dans la planification nucléaire, compte tenu de sa position géographique, entre les deux blocs. Ce renforcement de l’implication des pays européens dans le choix de la politique nucléaire de l’Otan, associé à des négociations bilatérales avec l’Union soviétique a ainsi permis de freiner la prolifération et de contribuer directement à la création du Traité de non-prolifération (TNP) (8), entré en vigueur en 1968. De même, l’élargissement, en 1979, du NPG (9) à tous les membres de l’Alliance (et plus seulement à un nombre restreint de pays) permet de renforcer la responsabilisation et l’adhésion au TNP de tous les membres de l’Otan.
La crédibilité politique : enjeu majeur de la dissuasion élargie
La dissuasion élargie a donc contribué à renforcer l’Otan et à limiter la prolifération nucléaire dans les pays européens. Cependant, ce concept a connu un affaiblissement certain pendant le deuxième âge nucléaire, de l’effondrement du bloc de l’Est à la remontée en puissance de la menace d’un conflit interétatique majeur, à compter du milieu des années 2010.
En effet, la disparition de l’Union soviétique a entraîné un sentiment assez répandu parmi les alliés que le rôle des armes nucléaires n’était plus aussi essentiel qu’il avait pu l’être pendant le premier âge nucléaire. C’est la raison pour laquelle, en particulier sous l’action d’une partie de la classe politique allemande, la posture de dissuasion des forces nucléaires de l’Otan a été largement diminuée durant les années 1990, tant en volume qu’en délais de réaction (10). Les années 2000 ont également traduit cette volonté de réduire le rôle des armes nucléaires au sein de l’Alliance : en 1998, une proposition des partis de la gauche allemande visait à instaurer, au sein de l’Alliance, la No First Use Policy, c’est-à-dire le refus d’envisager l’emploi de l’arme atomique en premier face à une atteinte aux intérêts majeurs de l’Alliance, tout comme a été proposé le retrait des armes nucléaires otaniennes du sol allemand en 2005 (11). En 2009, sous l’impulsion du ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle, l’Allemagne, la Norvège et les pays du Benelux ont publié une lettre commune pour mettre en application le concept de Global Zero du président américain Barack Obama (12). Ces positions ont pu, dans une certaine mesure, fragiliser la crédibilité de la dissuasion nucléaire otanienne. Elles ont, en tout cas, conduit à une dilution du rôle des armes nucléaires dans la doctrine de l’Otan (13) actuellement en vigueur.
Ces questionnements ont été partiellement remis en cause à compter de 2014 avec l’annexion de la Crimée par la Russie (14), et la montée en puissance militaire ostensible de la Chine, notamment dans le domaine nucléaire (15).
Le troisième âge nucléaire, qui a débuté avec le retour de ces « États puissance », souligne l’enjeu de la crédibilité politique et de l’efficacité de la dissuasion nucléaire de l’Otan, qui repose aujourd’hui pour les pays « non dotés », membres de l’Alliance, sur des engagements visibles : le déploiement d’armes nucléaires américaines sur leur sol et la démonstration de la résolution des États-Unis et des Nations membres du NPG à employer ces armes en cas d’extrême nécessité. Cette détermination doit donc être entretenue et développée, compte tenu de la faible expérience de la majeure partie des alliés dans ce domaine.
Enfin, l’enjeu pour les États-Unis est de bien mesurer l’action de tout pays bénéficiant du parapluie nucléaire, dont l’activité ou l’attitude pourrait entraîner une escalade, posant le dilemme du risque de l’utilisation de la dissuasion élargie.
La guerre ukrainienne et l’attitude agressive de la Russie mettent en avant le retour au premier plan de la dissuasion nucléaire dans les questions de sécurité internationale pour lesquelles la dissuasion française peut inspirer l’Otan pour renforcer sa cohésion et sa crédibilité.
Vers un renforcement de la complémentarité des dissuasions
Des concepts différents mais complémentaires
Le concept stratégique de l’Otan est le document pivot de la doctrine nucléaire de l’Alliance atlantique. Depuis les trente dernières années, il a été publié en 1991 et en 1999, avant sa dernière mise à jour qui date de 2010 (Sommet de Lisbonne), soit, en moyenne, une adaptation tous les neuf ans et demi. Une nouvelle version devrait voir le jour au Sommet de Madrid, fin juin 2022, pour tenir compte de l’évolution géo-stratégique des douze dernières années. Le concept de 2010 a été précisé par la Revue de posture de dissuasion et de défense (16), publiée le 20 mai 2012. Enfin, de nombreuses déclarations et rapports officiels sont édités lors de chaque sommet, complétant de manière partielle les éléments du concept.
Le concept français de dissuasion est, quant à lui, adapté par chaque président de la République, dans un discours prononcé lors de chaque mandat, selon un principe officieux de « continuité républicaine » (17) sur ce sujet. Cette façon de procéder permet de tenir compte de manière régulière de l’évolution de la situation géopolitique et de signifier à nos alliés et à nos compétiteurs les évolutions de la grammaire de la dissuasion française. Le discours du président Emmanuel Macron, du 7 février 2020 (18), constitue ainsi la version en vigueur du concept français de dissuasion. En moyenne, le concept est adapté tous les quatre ans depuis la fin de la guerre froide et l’avènement du deuxième âge nucléaire.
Les concepts de dissuasion nucléaire français et de l’Otan sont d’abord et avant tout politiques. Domaine réservé du président de la République en France (19), la politique déclaratoire nucléaire otanienne se conçoit au sein du Conseil de l’Atlantique Nord, présidé par les chefs d’État des trente pays membres. L’arme nucléaire est également un outil politique au sein de l’Otan, car son emploi est étudié au sein du NPG créé en 1966, dont la France ne fait pas partie, réunissant les ministres de la Défense des vingt-neuf autres pays membres. De plus, les modalités de l’engagement de l’arme nucléaire sont profondément différentes entre la France et l’Otan. Le Président français dispose seul de ce pouvoir, comme le disait clairement François Mitterrand en 1994 : « Pour que les choses soient plus faciles c’est le chef d’État qui décide. La Constitution lui confère cette légitimité. […] l’urgence peut l’exiger. (20) » La décision au sein de l’Otan se fera, vraisemblablement, selon une décision collégiale avec, en dernier lieu, un accord du Président des États-Unis entraînant, a priori, des délais décisionnels supérieurs, mais démontrant là encore le rôle politique des armes nucléaires.
Le concept français de dissuasion repose ensuite sur la capacité (permanente) d’infliger des dommages absolument inacceptables sur les centres névralgiques d’un État qui voudrait s’en prendre à nos intérêts vitaux (21). C’est-à-dire qu’un agresseur potentiel verrait son appareil d’État (décisionnel, économique, politique, etc.) s’effondrer en un instant, à la suite d’une frappe nucléaire purement stratégique, infligée par la France en réponse à ce franchissement du Rubicon. Il aurait donc tout à perdre en s’en prenant aux intérêts français indispensables à la survie de notre Nation. Ces notions restent volontairement ambiguës, car comme le précisait le général Beaufre, un des penseurs du concept de dissuasion français : « c’est l’incertitude qui constitue le facteur essentiel de la dissuasion » (22). Elles restent également ambiguës pour éviter de tracer des « lignes rouges » et permettre un contournement trop facile de notre dissuasion « par le bas ».
Le concept de l’Otan stipule, lui, que la responsabilité de l’Alliance est de « protéger et de défendre le territoire et la population de ses pays membres, contre une attaque, conformément à l’article 5 du Traité de Washington » (23). Ce concept s’appuie sur une posture de dissuasion et de défense robuste, organisée autour de quatre piliers : les forces nucléaires, les forces conventionnelles, la défense antimissile et la maîtrise des armements et de la non-prolifération. Les forces conventionnelles et la défense antimissile sont donc deux piliers à part entière des capacités de « dissuasion (24) et de défense », alors que dans la stratégie de défense française, le rôle de la dissuasion nucléaire est singulier, même si les forces conventionnelles contribuent à son exercice.
Ainsi, les forces nucléaires s’articulent dans le concept de l’Otan autour de deux axes :
• La contribution par la composante aéroportée de l’Otan, non permanente, constituée d’avions de chasse (Dual Capable Aircraft – DCA), armés, le cas échéant, de bombes nucléaires américaines B61 (25) dites « sub-stratégiques », c’est-à-dire que la dissuasion mise en œuvre par les DCA ne viserait pas à atteindre le cœur d’un État mais s’adresserait à des objectifs stratégiques d’un niveau inférieur, sans toutefois être une arme « tactique », du champ de bataille, d’où l’emploi du terme « sub-stratégique » pour désigner ces armes. Seuls sept pays de l’Alliance (26) prendraient part à la mission des DCA, alors que les bombes nucléaires B61 seraient stationnées dans cinq de ces pays (27). Cette composante serait appuyée par des moyens conventionnels (chasseurs, avions radars, etc.) appelés SNOWCAT (28) permettant d’augmenter la capacité de pénétration du raid de DCA et sa crédibilité. Tous les pays de l’Alliance peuvent, a priori, contribuer à cette mission d’accompagnement.
• La contribution par les forces stratégiques des États-Unis, qui assurent la garantie suprême de la sécurité des alliés (29), et qui ont mis en place, depuis la création de l’Otan, un parapluie nucléaire, dans le cadre d’une « dissuasion élargie ».
• Enfin, même si elles ne font pas partie de la posture de l’Otan, les forces nucléaires indépendantes de la France et du Royaume-Uni, contribuent significativement (par leur seule existence) à la « dissuasion globale et à la sécurité des alliés » (30).
Par ailleurs, si les intérêts vitaux de l’Otan ne sont pas mentionnés, la déclaration du Sommet de Bruxelles de 2018 évoque la « sécurité fondamentale d’un de ses États-membres », qui, si elle était menacée, pourrait entraîner l’Otan à « imposer à un adversaire des coûts qui seraient inacceptables et largement supérieurs aux gains qu’il pourrait espérer obtenir (31) », laissant penser que le pilier nucléaire de l’Otan pourrait reprendre de l’importance dans sa stratégie de défense et de dissuasion.
Aussi, ces éléments participent à la volonté de limiter la « dilution » du rôle des armes nucléaires au sein de l’Otan pour assurer la crédibilité politique de celle-ci.
Une posture nucléaire allégée depuis la fin de la guerre froide
La posture de dissuasion nucléaire se traduit par un volume de moyens et des délais de réaction associés. Plusieurs niveaux sont à prendre en considération.
La posture des DCA
Les moyens et les délais de réaction de la capacité nucléaire première de l’Otan ont, a priori sensiblement été allégés depuis la fin des années 1990 (32). Ainsi, le nombre relatif d’appareils dédiés à cette mission aurait diminué de plus de moitié, leurs délais de réaction associés étant passés de quelques heures à plusieurs semaines, voire plusieurs mois, alors que le nombre d’armes nucléaires dédiées aurait été divisé par dix pour atteindre aujourd’hui le nombre estimé de 150 bombes B61 (33), conséquences de l’évolution de la situation internationale et de la perception du rôle des armes nucléaires au sein de l’Alliance. De plus, cette mise en alerte ne peut se faire que par une décision venant probablement du NPG, qui nécessite une cohésion absolue de l’Alliance et, dans ce cas, un accord du président des États-Unis (34). Ainsi, l’emploi de la capacité des DCA ne pourrait s’envisager, à l’heure actuelle, qu’avec une décision collégiale suffisamment anticipée pour permettre une mise en alerte des moyens « à temps » dans le cas de crises dont le développement serait très progressif.
Posture de dissuasion française
Il s’agit d’une posture permanente. La dissuasion, avec près de 300 têtes nucléaires (35) est présente en toile de fond en toute heure de l’année, grâce notamment aux quatre Sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de la Force océanique stratégique (Fost) – dont un, au moins, est en permanence à la mer – et la capacité des Forces aériennes stratégiques (FAS) de l’Armée de l’air et de l’Espace à mettre en alerte des Rafale équipés de missiles nucléaires (Air-sol moyenne portée amélioré – ASMP-A), des avions ravitailleurs et des moyens associés dans des délais assez restreints. La décision appartenant au président de la République (et à lui seul), il semble clair que les forces nucléaires françaises offrent une capacité de réponse à toute crise, y compris dans le cas d’une crise au développement rapide. Les capacités de la Force aéronavale nucléaire (Fanu), mise en œuvre depuis le porte-avions Charles-de-Gaulle, permettent, en cas de besoin, de compléter les moyens des forces nucléaires permanentes.
Postures des forces nucléaires américaines et britanniques
Elles offrent une réactivité (a priori) assez équivalente à la dissuasion française. Leur mise en œuvre au profit de l’Otan se conçoit dans des cas extrêmes, dans le cadre du concept de « dissuasion élargie » sur une décision exclusive du Président des États-Unis ou du Premier ministre britannique.
Ce comparatif permet donc de se poser la question du renforcement de la posture nucléaire de l’Otan, dont le niveau actuel est la conséquence des années de « dividendes de la paix » et de la dilution du rôle des armes nucléaires parmi les pays occidentaux qui sont, pourtant, les premiers concernés par le retour au premier plan de la dialectique de dissuasion dans la guerre russo-ukrainienne.
Utilisation des forces conventionnelles dans un conflit de haute intensité
Si la dissuasion nucléaire française peut contribuer à renforcer la dissuasion nucléaire otanienne, les forces conventionnelles de l’Otan pourraient, à leur tour, contribuer à renforcer la crédibilité de notre stratégie de défense. En effet, dans le cadre des réflexions sur « la haute intensité » (36), la question de l’épaisseur de nos forces conventionnelles est un sujet d’implication croisée des forces conventionnelles et des forces nucléaires.
Comme l’a précisé le Président Emmanuel Macron dans son discours du 7 février 2020 (37), « la présence de forces conventionnelles robustes permet d’éviter une surprise stratégique en empêchant la création rapide d’un fait accompli. Elles permettent de tester au plus tôt la détermination de l’adversaire, en le forçant à dévoiler, de facto, ses véritables intentions ».
Aussi, l’action des forces conventionnelles françaises dans une confrontation directe de haute intensité pourrait se tenir dans le cadre d’une coalition (en particulier de l’Otan), en invoquant l’article 5 ou en soutenant un pays dans le cadre de cette clause de défense. Dans ce cas, il semble probable de disposer d’une véritable profondeur organique conventionnelle permettant de durer dans l’action. Il pourrait donc être utile de renforcer et d’améliorer encore l’implication de la France dans les opérations et les exercices de préparation opérationnelle conventionnels de l’Otan, notamment dans le domaine terrestre, pour pouvoir bénéficier le cas échéant de cette « robustesse » conventionnelle offerte par l’Alliance.
Un conflit de haute intensité qui impliquerait la France pourrait également s’envisager de manière autonome, dans le cas d’un théâtre en dehors de la zone de responsabilité de l’Otan, comme ce fut le cas de l’action du Royaume-Uni aux Malouines en 1982 qui, pour répondre à l’agression argentine, a mené une guerre conventionnelle autonome de haute intensité. Dans le cas où « l’épaisseur conventionnelle » serait plus réduite, la réflexion doit nous amener à renforcer certaines de nos capacités qui nous permettraient de conserver un avantage stratégique sur notre adversaire, notamment dans les capacités qui nous permettent d’entrer en premier.
Dans tous les cas, et quel que soit l’adversaire qui s’en prendrait à ses intérêts, la dissuasion nucléaire permettra à la France de conserver sa liberté d’action et son autonomie de décision. Il s’agit donc, dans cette perspective, de bien dimensionner l’outil conventionnel français pour assurer au président de la République une marge de manœuvre la plus grande possible.
La complémentarité de la dissuasion française et de la dissuasion otanienne semble pouvoir être encore renforcée. L’annexion de la Crimée en 2014, puis la guerre en Ukraine en 2022, avec l’utilisation d’une partie de la grammaire de la dissuasion nucléaire par Vladimir Poutine – ce qui constitue une première depuis la crise des euromissiles du début des années 1980 (38) – pour garantir son action de sanctuarisation agressive le confirment : il est temps de parler de dissuasion nucléaire en Europe (39) ; il n’y a plus de place pour les messages faibles au sein de l’Alliance.
Des enjeux pour les pays européens de l’Otan
Un positionnement complexe pour les États-Unis
Depuis quelques années, et en particulier depuis l’émergence d’une puissance militaire chinoise, la dissuasion nucléaire des États-Unis – et par conséquent la dissuasion élargie – fait face à plusieurs enjeux.
Tout d’abord, la montée en puissance de la Chine pose la question du dimensionnement des forces nucléaires des États-Unis. En effet, la dissuasion américaine vise à dissuader simultanément tous ses compétiteurs potentiels. Elle ne repose plus sur le principe de « destruction mutuelle assurée », visant essentiellement les villes (frappes « anti-cité »), mais sur le principe d’un ciblage « de contre-force nucléaire » destiné (notamment) à neutraliser les systèmes d’armes nucléaires de leurs adversaires avant qu’ils ne soient utilisés, notamment en Russie, Chine et Corée du Nord. Pour ce faire, on estime qu’il existe environ 1 000 cibles potentielles pouvant être « neutralisées » (40) par 2 000 armes nucléaires (dans un cas de menaces multiples), ce qui correspond peu ou prou à l’arsenal stratégique/sub-stratégique américain. L’augmentation du nombre des sites stratégiques chinois questionne donc la capacité des États-Unis à disposer d’un nombre suffisant d’armes nucléaires, dont le volume est encadré par le traité New START (41). Aussi, la sortie du traité FNI (42) en août 2019 (43) par les États-Unis, conséquence du non-respect de ce traité par la Russie – avec le missile SSC-8 Iskander M (44) – pourrait être une opportunité de conserver une certaine marge de manœuvre en augmentant son arsenal nucléaire (notamment pour leur dissuasion élargie).
Une autre option dans laquelle s’engagent les États-Unis pour prendre en compte cette montée en puissance chinoise repose sur une inflexion de leur stratégie : le concept de « dissuasion intégrée » publiée dans la Stratégie de Défense (45). Cette posture consiste à considérer que pour dissuader un adversaire de s’en prendre aux intérêts américains (et de leurs alliés), une combinaison de technologies du futur (conventionnelles) et de moyens dans les domaines et milieux de contestation (cyber, spatial, etc.) serait aussi efficace que la dissuasion nucléaire. Si le contour exact de ce concept reste à préciser, une telle évolution stratégique réduirait le rôle singulier des armes nucléaires, qui restent et resteront les seules capables d’infliger des dommages inacceptables, dans l’acception du terme français de dissuasion, qui n’est que nucléaire. Il pourrait être nécessaire de l’accompagner par un dialogue stratégique afin de ne pas affaiblir la crédibilité de la dissuasion nucléaire de l’Otan, dont la capacité à prévenir un conflit majeur dans sa zone est essentielle.
Cette volonté d’infléchir la doctrine des États-Unis pour tenir compte de la multiplicité des menaces s’est également traduite par les réflexions du président Joe Biden (46), avant son élection, sur le fait que la dissuasion nucléaire ne devrait s’appliquer qu’en réponse à une menace nucléaire selon le principe du « Sole Purpose » et que les États-Unis pourraient adopter la règle de « No First Use », ce qui constituerait une évolution majeure et assez négative pour la sécurité européenne. En effet, ces principes présentent l’inconvénient d’offrir une liberté d’action quasi-totale à tout pays agressif animé de velléités territoriales, qui s’en tiendrait à une action conventionnelle, y compris face à des pays de l’Alliance. Elle augmenterait également le risque d’auto-dissuasion des dirigeants de l’Alliance d’un recours à la dissuasion nucléaire en cas de crise majeure : on pourrait envisager le retour d’une guerre conventionnelle de grande ampleur impliquant directement des pays de l’Otan, car pour que la dissuasion fonctionne, « il faut absolument éviter toute action ou toute déclaration qui viendrait lever l’une des hypothèses que l’adversaire peut craindre » (47).
Cette évolution n’a toutefois pas été retenue dans la doctrine américaine, la Nuclear Posture Review (NPR), dont la publication est en cours. La complexité de la position actuelle des États-Unis est encore plus évidente lorsque l’on considère que, malgré cette diminution – ou tout du moins une tentation de diminution – perceptible du rôle des armes nucléaires par l’Administration américaine, celle-ci maintient une forte pression envers les pays DCA pour acquérir des chasseurs F-35 Lightning II, qui seront, à terme – avec les bombardiers B-2 Spirit et chasseurs F-15E Strike Eagle – seuls aptes à emporter la dernière version de la bombe nucléaire B61 (48).
Ces éléments confirment bien le retour au premier plan de la grammaire nucléaire dans le rapport de force entre Nations et notamment entre États dotés : le « pouvoir égalisateur de l’atome », dont parlait le général Pierre-Marie Gallois (49), un autre penseur du concept français de dissuasion, n’a jamais été autant d’actualité. L’Otan a besoin d’une dissuasion nucléaire forte c’est-à-dire crédible aux niveaux politique, opérationnel et technique.
Le soutien des populations
Un second facteur doit impérativement être intégré par les pays européens, membres de l’Alliance : l’acceptation par les populations (et leurs gouvernements) de la nécessité de la dissuasion nucléaire pour assurer leur sécurité ultime.
Si ce point ne pose pas de problème particulier en France, où la dissuasion fait l’objet d’un consensus, il n’en est pas de même dans tous les pays de l’Alliance et en particulier en Allemagne, en Norvège et aux Pays-Bas, dont les gouvernements ont pu manifester récemment leur volonté d’être observateurs au Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN) (50).
Le TIAN, entré en vigueur en 2021, peut présenter un risque pour la stabilité internationale. En effet, en visant l’interdiction des armes nucléaires « en raison de leurs conséquences humanitaires et environnementales inacceptables » (51) dans le cas de leur emploi militaire, fortement improbable, il ouvre la possibilité d’un retour des conflits conventionnels, dont le caractère meurtrier et les conséquences humanitaires et environnementales sont, quant à elles, concrètement inacceptables et trop malheureusement récurrentes : la guerre ukrainienne en est le malheureux exemple. Aussi, contrairement à certaines affirmations, la dissuasion nucléaire empêche des agressions directes majeures entre États dotés d’armes nucléaires : c’est bien l’absence de garantie nucléaire de l’Ukraine et des autres pays et régions envahis récemment – comme la Géorgie, qui ne possède pas d’arme nucléaire et ne bénéficie pas de dissuasion élargie pour la protéger – qui offre à la Russie la latitude de conduire des opérations de « sanctuarisation agressive » mettant la communauté internationale devant le fait accompli.
Dans ce cadre, l’action du TIAN pourrait entraîner une fragilisation inquiétante des dissuasions nucléaires des pays occidentaux (qui n’y sont pas partie), notamment en raison de la « taxonomie » que ce Traité souhaite instaurer contre les financements des sociétés qui contribuent à développer des systèmes d’armes nucléaires (52). Les compagnies occidentales étant plus sensibles aux potentielles pressions des opinions, il y a donc un risque, à terme que les armes nucléaires ne soient plus détenues que par des pays aux régimes autoritaires ou autocratiques, entraînant, de fait, le monde dans l’inconnu. L’agression russe en Ukraine met en évidence le fait que sans la dissuasion nucléaire otanienne, l’hypothèse d’une action similaire dans les anciens pays du bloc de l’Est serait aisément envisageable.
La position de certains pays de l’Otan doit être clarifiée pour conserver la crédibilité de la dissuasion et la cohésion de l’Alliance.
La position allemande
La position allemande sur la dissuasion nucléaire est centrale, bien qu’ambivalente depuis plusieurs décennies. En effet, même si l’Allemagne accueille de longue date (depuis au moins 1971) sur son sol des B61, sa politique normative centrée sur les actions de désarmement entraîne une difficulté, voire un refus, de considérer les armes nucléaires en tant que pilier de sécurité. Aussi, le paradoxe tient dans le fait que la population est majoritairement opposée aux armes nucléaires (53) : 66 % de sondés estimant que l’Allemagne ne devrait plus s’appuyer sur la dissuasion nucléaire pour sa sécurité ; tout en considérant que l’Otan, Alliance nucléaire, est essentielle – près de 64 % des Allemands considèrent qu’elle est importante pour leur défense (54).
La possibilité que l’Allemagne devienne pays observateur au TIAN, comme indiqué dans le contrat de coalition du gouvernement d’Olaf Scholz (55), est une étape dont il faudra suivre l’évolution. En effet, une adhésion de l’Allemagne (ou d’un autre pays de l’Otan) à ce traité remettrait de facto en cause le caractère nucléaire de l’Alliance, entraînant une crise politique majeure et une fragilisation importante de la cohésion otanienne. Il est donc essentiel de sensibiliser la population allemande qui ne semble pas consciente des conséquences d’une telle adhésion.
Cet intérêt affiché pour le TIAN interpelle, si l’on considère la question du choix du remplaçant des Panavia Tornado allemands. En effet, les avions de chasse DCA allemands, en service depuis 1982 sont vieillissants et doivent être retirés des rangs de la Luftwaffe, l’armée de l’air allemande, à l’horizon de 2030. La France et l’Allemagne, rejoints par l’Espagne, ont lancé le projet Scaf (Système de combat aérien du futur) pour acquérir, à l’horizon des années 2040, un avion de combat de nouvelle génération (56). La volonté politique allemande de conserver la capacité des DCA étant toujours affichée pour garder une position d’influence majeure au sein de l’Otan, il est nécessaire de trouver une solution pour assurer cette mission en attendant le Scaf. C’est la raison pour laquelle, le gouvernement de la chancelière Angela Merkel avait envisagé d’acquérir des avions américains Boeing F/A-18F Super Hornet pour éviter la rupture temporaire de capacité, tout en écartant une fragilisation du projet Scaf en ne choisissant pas le F-35, beaucoup plus cher, pouvant entraîner un effet d’éviction sur le projet franco-germano-espagnol (57).
Aussi, les déclarations du Chancelier Olaf Scholz, dans un discours du 27 février 2022 (58) et de la ministre allemande de la Défense, le 14 mars (59) qui indiquent que l’Allemagne penche finalement pour le F-35 (60) et donc que la participation à la dissuasion nucléaire otanienne est une priorité pour elle, doit entraîner une sensibilisation au fait nucléaire de la population et des élites allemandes : la proposition du Président français, de voir « se développe[r] un dialogue stratégique avec nos partenaires européens qui y sont prêts sur le rôle de la dissuasion nucléaire française dans notre sécurité collective ; […] ces échanges participeront naturellement au développement d’une véritable culture stratégique entre Européens » (61), peut permettre de contribuer à cette tâche en instituant un dialogue franco-allemand à plusieurs niveaux, sur la dissuasion nucléaire.
Ce constat peut également s’appliquer à d’autres pays, comme les Pays-Bas ou la Norvège, qui ont pu exprimer leur souhait d’être observateurs du TIAN.
A contrario, la position des pays de l’Europe de l’Est, membres de l’Otan, milite clairement pour une dissuasion nucléaire forte et assumée. En particulier, la position de la Pologne est représentative d’un besoin d’une dissuasion nucléaire la plus crédible et la plus robuste possible, Varsovie ayant déclaré se porter candidat d’un accueil d’armes nucléaires dans l’éventualité où l’Allemagne déciderait de ne plus assumer son rôle (62).
Vers une culture stratégique européenne partagée
Il est essentiel que les membres de l’Otan, en particulier les pays européens, développent et cultivent une culture stratégique de dissuasion nucléaire. À cet égard, il n’est pas anodin et assez révélateur de constater que lors de la guerre entre la Russie et l’Ukraine de 2022, ce sont les ministres des Affaires étrangères britannique et français qui ont réaffirmé que « l’Otan était une Alliance nucléaire » (63), en réponse à l’usage répété de la dialectique de dissuasion par le Président russe. Une telle déclaration de la part du chancelier allemand ou d’un autre pays de l’Otan non doté serait une évolution majeure dans l’acculturation stratégique à la dissuasion, et un signal très fort démontrant à tout compétiteur potentiel la cohésion de l’Alliance.
Aussi, la précision par le président Emmanuel Macron du fait que « les intérêts vitaux de la France ont une dimension européenne » (64) est un élément concret pour la formalisation d’un dialogue stratégique de niveau politique afin de renforcer la culture stratégique nucléaire de l’Europe (65).
Celle-ci ne peut passer que par une première phase de dialogue politique et stratégique de haut niveau entre Français et certains de leurs homologues européens, pour faire comprendre les buts de la dissuasion nucléaire et ses modes de fonctionnement (la « grammaire » de dissuasion). L’intérêt porté par les autorités polonaises (66) est un élément positif à exploiter.
Ce renforcement pourrait, ensuite, passer par une déclinaison de cette coopération au niveau politico-militaire, pour permettre une amélioration de la culture nucléaire entre les armées de l’Otan selon des actions concrètes et progressives à formaliser. Aussi, comme le président de la République l’a indiqué dans son discours du 7 février 2020, les partenaires européens qui souhaiteraient s’engager sur cette voie pourraient être associés aux exercices des forces françaises de dissuasion : on pourrait, par exemple, étudier la participation d’avions DCA à un raid d’entraînement des avions des FAS (opération Poker (67) ) ou la création d’un exercice coordonné mettant en œuvre toutes les forces de dissuasion de l’Alliance.
Enfin, sans rejoindre le NPG, la France pourrait également étudier des modalités pour permettre de faire progresser la mission SNOWCAT, tout en conservant son indépendance, grâce à son savoir-faire mis en œuvre depuis 1964 dans le domaine de la dissuasion aéroportée.
* * *
Les dividendes de la paix avaient été sévèrement entamés depuis 2014 avec l’annexion de la Crimée. Ils sont désormais totalement soldés, comme le démontre la possibilité du retour de la guerre aux portes de l’Europe. Cet état de fait doit permettre de poser à nouveau la question que se posait Thérèse Delpech : « les Européens voudront-ils la paix ou juste avoir la paix ? (68) » Aussi, pour y répondre, le rôle et la crédibilité de l’Otan sont essentiels. En particulier, le rôle de sa dissuasion nucléaire mériterait d’être renforcé pour permettre d’adresser un message dissuasif net et précis à tout compétiteur potentiel. La France peut contribuer activement à cette évolution, tout en conservant son indépendance et la spécificité de sa dissuasion nucléaire qui permet au Président de conserver sa liberté d’appréciation de décision ou d’action.
Le Sommet de l’Otan à Madrid des 29 et 30 juin 2022 devrait être l’occasion pour l’Alliance de renforcer ce pilier de son concept stratégique et pour les pays européens de mieux assumer leur rôle dans ce dispositif, à condition que les indices d’une inflexion de la posture américaine ne soient pas retenus dans leurs concepts stratégiques à venir. On peut toutefois penser que la guerre en Ukraine et la détermination ostensible de Vladimir Poutine démontrent qu’un engagement vers une dissuasion qui ne serait plus « l’Ultima Ratio des peuples » (69) pourrait entraîner des conséquences imprévisibles. ♦
(1) De Gaulle Charles, Conférence de presse du 23 juillet 1964, Palais de l’Élysée (https://fresques.ina.fr/).
(2) « Guerre en Ukraine : la menace nucléaire de Vladimir Poutine est-elle à craindre ? », Franceinfo, 16 avril 2022 (https://www.francetvinfo.fr/).
(3) Vandier Pierre, La dissuasion au troisième âge nucléaire, Éditions du Rocher, 2018, 108 pages.
(4) Ibidem.
(5) L’URSS réalise son premier essai nucléaire le 29 août 1949.
(6) Otan, « Politique et forces de dissuasion nucléaire de l’Otan » (https://www.nato.int/).
(7) McNamara Robert, Memorandum for the President, the Diffusion of Nuclear Weapons with and without a Test Ban Agreement, 16 février 1963 : « d’ici 10 ans, il y aura probablement 8 pays supplémentaires [en plus des 4 déjà dotés] à disposer d’armes nucléaires ».
(8) Alberque William, The NPT and the Origins of NATO’s Nuclear Sharing Arrangements, Institut français des relations internationales (Ifri), février 2017, 58 pages (https://www.ifri.org/).
(9) Le NPWG s’est transformé en NPG (Groupe des plans nucléaires) en 1966, dont seuls trois pays étaient membres : les États-Unis, le Royaume-Uni et la RFA. La France ne fait pas partie du NPG.
(10) Otan, « NATO’s Nuclear Forces in the New Security Environment », 22 octobre 2009 (https://www.nato.int/).
(11) O’Neil Andrew et Ühling Stephan C., Partners in Deterrence. US Nuclear Weapons and Alliances in Europe and Asia, Manchester University Press, 2021, 256 pages.
(12) « Aujourd’hui, j’affirme clairement et avec conviction l’engagement de l’Amérique à rechercher la paix et la sécurité dans un monde sans armes nucléaires. Ce but ne pourra être atteint avant longtemps, sans doute pas de mon vivant. » Voir Obama Barack, « Un monde sans armes nucléaires », Le Monde, 6 avril 2009 (Retranscription du discours du 5 avril 2009 du Président américain à Prague sur « l’avenir des armes nucléaires au XXIe siècle ») (https://www.lemonde.fr/).
(13) Otan, Engagement actif, défense moderne, 19 novembre 2010 (https://www.nato.int/).
(14) Agence France Presse (AFP) et Reuters, « La Russie complète l’annexion de la Crimée », Le Monde, 21 mars 2014 (https://www.lemonde.fr/).
(15) « La Chine développe son arsenal nucléaire, selon un rapport américain », Le Point, 28 juillet 2021 (https://www.lepoint.fr/).
(16) Otan, Revue de la posture de dissuasion et de défense, 20 mai 2012 (https://www.nato.int/).
(17) Les discours sur la dissuasion ont été prononcés en 1994 par François Mitterrand, en 1996, 2001 et 2006 par Jacques Chirac, en 2008 par Nicolas Sarkozy et en 2015 par François Hollande.
(18) Macron Emmanuel, « Discours du président de la République sur la stratégie de défense et de dissuasion devant les stagiaires de la 27e promotion de l’École de Guerre », Paris, 7 février 2020 (https://www.elysee.fr/).
(19) Les institutions de la Ve République ont été créées en intégrant la responsabilité du président de la République dans le fait nucléaire.
(20) Mitterrand François, « Intervention du président de la République sur la politique de défense de la France et la dissuasion nucléaire », Paris, 5 mai 1994 (https://www.vie-publique.fr/).
(21) Macron Emmanuel, op. cit.
(22) Beaufre André, Introduction à la stratégie, 1963, 192 pages, p. 72-73.
(23) Otan, Engagement actif, défense moderne, op. cit.
(24) Le terme « Deterrence » en anglais n’est pas nécessairement associé au nucléaire.
(25) Ces bombes sont Non Strategic Nuclear Weapons (NSNW).
(26) États-Unis, Allemagne, Belgique, Grèce, Pays-Bas, Italie, Turquie. Voir Bell Roger B., NATO Nuclear Burden-Sharing Post-Crimea: What Constitues “Free-Riding”?, Thèse de doctorat, Tufts University, 2021 (https://www.proquest.com/).
(27) Allemagne, Belgique, Pays-Bas, Italie, Turquie.
(28) Support of Nuclear Operations with Conventional Air Tactics.
(29) Représentation permanente de la France auprès de l’Otan, Communiqué du Sommet de Bruxelles, 12 juillet 2018 (https://otan.delegfrance.org/).
(30) Ibid.
(31) Otan, « Déclaration du Sommet de Bruxelle », Article 36, 11 juillet 2018 (https://www.nato.int/).
(32) Otan, « NATO’s Nuclear Forces in the New Security Environment », NATO Topics, 22 octobre 2009, 6 pages (https://www.nato.int/).
(33) Kristensen Hans, « Urgent: Move US Nuclear Weapons out of Turkey », Federation of American Strategists (FAS), 16 octobre 2019 (https://fas.org/).
(34) Commission de la défense et de la sécurité, Une nouvelle ère pour la dissuasion nucléaire ? Modernisation, maîtrise des armements et forces nucléaires alliées (Rapport), Assemblée parlementaire de l’Otan, 12 octobre 2019, 32 pages (https://www.nato-pa.int/).
(35) Hollande François, « Déclaration du président de la République sur la dissuasion nucléaire », Istres, 19 février 2015 (https://www.vie-publique.fr/).
(36) Commission de la défense nationale et des forces armées, La préparation à la haute intensité (Rapport), Assemblée nationale, 17 février 2022 (https://www.assemblee-nationale.fr/).
(37) Macron Emmanuel, op. cit.
(38) « La crise des euromissiles », CVCE, Université du Luxembourg (https://www.cvce.eu/).
(39) Tertrais Bruno, « Weapons of Mass Debate—Time to Talk about Nuclear Deterrence in Europe (Again) », Institut Montaigne, 19 juillet 2021 (https://www.institutmontaigne.org/node/8668).
(40) Kroenig Matthew, « The Special Role of US Nuclear Weapons », Atlantic Council, 23 septembre 2021, 7 pages (https://www.atlanticcouncil.org/).
(41) « New START » a pris la suite du traité de désarmement russo-américain START I (Strategic Arms Reduction Treaty), signé en 1991 par George Bush et Mikhaïl Gorbatchev, qui expirait en décembre 2009 et qui limite le nombre d’armes stratégiques déployées par les deux pays. La Chine n’est donc pas concernée par quelque limitation que ce soit.
(42) Forces nucléaires de portée intermédiaire limitant le nombre de missiles nucléaires dont la portée est comprise entre 500 et 5 500 km.
(43) Mandraud Isabelle, Stroobants Jean-Pierre, « Washington et Moscou sortent du traité FNI sur les missiles nucléaires intermédiaires », Le Monde, 1er février 2019.
(44) Fitzgerald Clare, « Iskander-M Russia’s Hypersonic Ballistic Missile System », War History Online (https://www.warhistoryonline.com/).
(45) US Department of Defense (DoD), 2022 National Defense Strategy, 28 mars 2022 (https://media.defense.gov/).
(46) Kheel Rebecca, « Five Top Challenges for Biden on Defense », The Hill, 1er mars 2021 (https://thehill.com/).
(47) Beaufre André, op. cit.
(48) La B61-12 sera mise en service en 2025. Guidée, elle devrait augmenter l’allonge d’un raid nucléaire et contribuera à conserver la crédibilité technique de cet armement.
(49) Gallois Pierre-Marie, Stratégie de l’âge nucléaire, 1960, 238 pages.
(50) Daoudal Marie, « L’Allemagne se positionne en chef de file contre la prolifération nucléaire », Courrier international, 15 décembre 2021.
(51) « Des dégâts catastrophiques », Ican France (http://icanfrance.org/les-faits/des-degats-catastrophiques/).
(52) « Engagez votre banque », Ican France (http://icanfrance.org/engagez-votre-banque/).
(53) Major Claudia et Mölling Christian, « Weapons of Mass Debate—Germany’s Unease Around Nuclear Deterrence », Institut Montaigne, 8 juillet 2021 (https://www.institutmontaigne.org/).
(54) Marcade Salomé, « Otan : la perception des Européens a-t-elle évolué depuis l’invasion de l’Ukraine ? », YouGov, 16 mars 2022 (https://fr.yougov.com/).
(55) Alançon (d’) François, « Nucléaire, le contrat de coalition allemand rassure les alliés de l’Otan », La Croix, 30 novembre 2021 (https://www.la-croix.com/).
(56) Bezat Jean-Michel et Gallois Dominique (propos recueillis par), « Système de combat aérien du futur : “Nous avons une responsabilité historique” », interview d’Éric Trapier, PDG de Dassault Aviation, Le Monde, 13 avril 2022.
(57) Nadau Louis, « Contrainte d’acheter le chasseur américain F-18, l’Allemagne subit le diktat yankee au sein de l’Otan », Marianne, 22 avril 2020 (https://www.marianne.net/).
(58) Maurice Paul, « Un “changement d’époque” ? Vers une réorientation de la politique étrangère allemande après l’invasion russe en Ukraine », Ifri, 7 mars 2022 (https://www.ifri.org/). L’auteur analyse le discours du chancelier allemand au Bundestag, le 27 février 2022.
(59) Bos Jean-Michel, « Le monde n’a jamais autant aimé les armes », Deutsche Welle, 18 mars 2022 (https://www.dw.com/fr/).
(60) Ce choix, s’il ne constitue pas une bonne nouvelle pour le Scaf – tout dépendra du nombre de F-35 que commandera Berlin dans les 5 ans à venir –, démontre que l’Allemagne prendrait le risque de se passer d’une coopération industrielle européenne structurante pour assumer son rôle de membre d’une Alliance nucléaire.
(61) Macron Emmanuel, op. cit.
(62) Reuters, « Explainer: Will Germany’s Next Government Ditch US Nuclear Bombs? », US News, 22 novembre 2021 (https://www.usnews.com/).
(63) Andureau Anthony et AFP, « Ukraine : Le Drian rappelle à Poutine que “l’Alliance atlantique est aussi une alliance nucléaire” », BFMTV, 24 février 2022 (https://www.bfmtv.com/).
(64) Ibidem.
(65) À titre d’exemple, il n’y a en Allemagne que quelques officiers traitant les questions de dissuasion nucléaire.
(66) Kulesa Lukasz, « Weapons of Mass Debate—Polish Deterrence with Russia in the Line of Sight », Institut Montaigne, 6 juillet 2021 (https://www.institutmontaigne.org/).
(67) Maigret Bruno, Opération Poker. Au cœur de la dissuasion nucléaire française, Tallandier, 2021, 256 pages.
(68) Rosselet Mélanie, « La crise ukrainienne a aussi une dimension nucléaire », Le Monde, 3 février 2022.
(69) Ailleret Charles, « L’arme atomique : Ultima Ratio des peuples », Revue Défense Nationale, n° 120, décembre 1954, p. 553-563.