L’Arctique subit de plein fouet les effets du réchauffement climatique. Au-delà des nouvelles opportunités économiques qui devraient bousculer la gouvernance régionale, la disparition progressive mais quasiment inéluctable de la banquise risque de rebattre profondément les cartes de la géopolitique mondiale. Dans un monde où les rivalités entre les puissances se multiplient, les grands acteurs ne laisseront pas passer la carte décisive qui peut faire pencher la balance en leur faveur : l’Arctique peut-il devenir cette carte ? La position d’équilibre de la France doit l’inciter à analyser ces évolutions avec lucidité pour décider en fonction de ses intérêts et de ses ambitions.
Réchauffement climatique en Arctique : une nouvelle donne géopolitique ?
Au fil des Conférences des parties (COP) de l’ONU sur les changements climatiques, la réalité du réchauffement s’est confirmée. En limiter les effets constitue un des principaux défis du XXIe siècle afin de préserver les générations futures. Les images chocs d’un ours polaire dérivant seul sur un iceberg au milieu de l’océan ont fait le tour de la planète, mais suffisent-elles à dépasser les rivalités étatiques et les tentations de saisir les nouvelles opportunités offertes par un océan Arctique plus facilement accessible que par le passé ? À en juger par la stratégie russe d’investissements dans la région, le doute n’est pas permis : malgré les gouvernances mises en place pour favoriser le dialogue et la concertation, les stratégies de puissance s’appliqueront en Arctique comme ailleurs sur la planète.
À partir des dernières études scientifiques sur la réalité du réchauffement climatique en Arctique, cet article revient sur les opportunités économiques et les positionnements des États qui, sous couvert d’études scientifiques et de protection environnementale, visent à conquérir de nouvelles parts de marché. Cependant, au-delà de la compétition économique, n’est-on pas sur le point d’assister à un bouleversement géopolitique ? Voici que la Russie, enclavée depuis la nuit des temps sur son immense côte septentrionale par une impitoyable étreinte de glace, voit s’ouvrir devant elle un nouvel océan. Plus besoin de se battre pour un accès vers les mers chaudes, objectif séculaire de la Russie depuis Pierre le Grand ! Plus besoin de franchir le détroit des Dardanelles ou le Kattegat (entre le Danemark et la Suède), plus besoin de négocier de précieux points d’appui dans des mers contestées : 14 000 km de littoral arctique voient s’ouvrir progressivement un accès libre à l’océan. La Russie se retrouve en position de dominer de facto le pivot stratégique au toit du monde, entre Atlantique et Pacifique. En a-t-on bien mesuré toutes les conséquences ? La puissance continentale historique, dominant le Heartland cher au géographe britannique Mackinder, n’est-elle pas en situation de devenir à terme une puissance maritime incontournable ?
Comment vont alors réagir les États-Unis et la Chine ? Face à ce changement fondamental, que doit faire la France ? Quelles conséquences en tirer pour l’emploi de ses forces armées ?
Le réchauffement climatique : quelles réalité et perspectives pour l’Arctique ?
Le réchauffement climatique est devenu une réalité qui n’est plus contestée, tant les effets physiques sont visibles, notamment en Arctique, région où l’élévation des températures est la plus rapide de la planète. En moyenne, le réchauffement y est deux fois plus rapide qu’ailleurs. Les derniers travaux du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec ou IPCC) (1) font état d’une élévation moyenne de la température à la surface de la planète de 1,09 °C sur la décennie 2011-2020 par rapport à la période de référence 1850-1900. Pour se projeter sur les évolutions climatiques jusqu’en 2100, le Giec utilise 5 scénarios en fonction du niveau de réussite du contrôle des émissions de Gaz à effet de serre (GES), principal facteur du réchauffement climatique. Seuls les deux scénarios les plus favorables (2) permettent de maintenir le réchauffement climatique sous le seuil de 2 °C avant 2100.
Les conséquences de cette élévation des températures se multiplient. En Arctique, le recul de la surface couverte par la banquise s’accélère : en septembre 2020, celle-ci a atteint son plus faible niveau historique à la fin de l’été avec 3,74 millions de km2 comparés aux 7 millions en moyenne entre 1979 et 1983 (3). À ce rythme, dans tous les scénarios, l’Arctique sera complètement libre de glaces au moins une fois avant 2050. En outre, si la planète ne réussit pas à tenir un des deux scénarios les plus favorables, la banquise disparaîtra complètement environ un été sur deux entre 2060 et 2080. Vu les retards réguliers des États pour tenir leurs engagements de maîtrise des GES, il faut se préparer à un Arctique libre de glaces sur des périodes de plus en plus longues dans la seconde moitié du XXIe siècle.
Quel changement fondamental pour un océan qui était encore considéré au début du XXe siècle comme un champ d’exploration passionnant mais redouté où ne s’aventuraient que d’intrépides et rares pionniers ! Dès le XXIe siècle, il va devenir navigable plusieurs mois dans l’année : le Porte-avions de nouvelle génération (PANG) (4) pourra certainement passer de l’Atlantique au Pacifique par le pôle Nord !
En outre, la fonte de la banquise modifie la carte du monde connu. En 2019, la Russie a annoncé avoir découvert et revendiqué cinq nouvelles îles au large de l’archipel de la Nouvelle-Zemble. Elles ont été révélées par la fonte des glaces (5).
Le réchauffement climatique contribue également à la fonte des glaciers. Chaque année, entre 2002 et 2011, on estime que le Groenland a perdu 215 milliards de tonnes de glace (6). Outre la modification des caractéristiques physiques des océans, comme la salinité et le profil de température, données essentielles pour les opérations sous-marines, la fonte des glaciers constitue le facteur principal d’élévation du niveau de la mer dont les conséquences seront dramatiques pour les populations littorales, notamment dans certains États insulaires de la zone Indo-Pacifique. Cette élévation est estimée entre 50 cm et 1 m d’ici 2100, mais l’évolution de la fonte des glaciers étant mal appréhendée, un scénario d’élévation entre 1,5 et 2 m d’ici 2100 ne peut être totalement exclu. Le phénomène devrait se poursuivre dans le temps long et explique l’engagement de la communauté internationale pour chercher à limiter un tel phénomène.
À terre, la fonte du pergélisol (7) constitue un défi pour l’entretien et le développement des infrastructures : les routes, pistes d’aviation, immeubles sont mis à mal au Groenland, en Sibérie ou en Alaska. Ce facteur rend plus complexe l’exploitation des richesses du Grand Nord et la mise en valeur de l’Arctique.
Un enjeu environnemental contrebalancé par des perspectives économiques majeures
La prise de conscience de l’enjeu environnemental favorise la concertation en Arctique
L’enjeu environnemental que constitue le réchauffement climatique fait l’objet depuis une dizaine d’années d’une prise de conscience croissante de moins en moins contestée. L’Accord de Paris sur le climat, adopté en décembre 2015 suite à la COP21, est entré en vigueur dès le 4 novembre 2016. Il fixe l’objectif de long terme de maintenir l’augmentation de la température sous le seuil des 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Cette dynamique, mise à mal par le retrait des États-Unis de l’accord en 2020 (8) et par la crise de la Covid-19, a été relancée lors de la tenue à Glasgow en novembre 2021 de la COP26 à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Cette conférence a obtenu des engagements encourageants des États qui placeraient la planète sur une trajectoire de réchauffement à 2,3 °C en 2100.
La tendance vertueuse engagée dans le cadre des conférences de l’ONU a lancé une impulsion largement relayée dans le monde entier, et suscite un engagement croissant de la société. La prise de conscience des enjeux environnementaux se traduit jusque dans l’économie réelle. Cela a pu pousser plusieurs grandes entreprises occidentales à limiter leurs ambitions en Arctique : en 2012, Total a renoncé à l’exploitation du pétrole, puis Shell en 2015 et BP en 2019 ont suspendu leurs recherches. L’armateur CMA-CGM a indiqué en 2019 qu’il n’utiliserait pas les routes polaires, et certaines banques (Goldman Sachs, JP Morgan Chase et Wells Fargo) annoncent également ne plus financer de projets pétroliers arctiques (9).
Cette tendance, qui devrait s’intensifier au fil des conférences sur le climat et de la prise de conscience des enjeux globaux à l’échelle de la planète, influence directement la gouvernance de l’Arctique et y favorise la coopération entre les États.
Le conseil de l’Arctique, fondé en 1996 et composé des cinq États riverains (Russie, États-Unis, Canada, Norvège et Danemark) ainsi que des pays périphériques (Islande, Finlande et Suède), a notamment pour mission de promouvoir les questions environnementales et de développement durable. L’extension de cette instance à de nombreux États observateurs illustre l’intérêt croissant pour la région et ses enjeux. Cependant, les cinq États riverains entendent conserver la gouvernance de l’Arctique, la signature en 2008 au Groenland de la déclaration d’Ilulissat excluant un éventuel traité international sur l’Arctique. Le cadre de discussions du conseil de l’Arctique vient néanmoins d’être mis à mal par la guerre en Ukraine. Les États-membres ont décidé de geler leur participation à ce forum que la Russie préside jusqu’en 2023. L’esprit de coopération et d’exception qui prévalait jusqu’à présent en Arctique risque d’être rattrapé par les rivalités géopolitiques.
Des perspectives économiques attrayantes
Avec la fonte de la banquise, les potentialités économiques de l’Arctique se multiplient : outre le développement de la pêche et l’essor du tourisme, ce sont les mythiques routes maritimes ainsi que les considérables réserves de pétrole, de gaz et de minerais qui attirent les spéculations. Si la libération des espaces maritimes va aller croissant et favoriser ces activités économiques, les conditions d’exploitation n’en resteront pas moins rudes à l’échelle du XXIe siècle et s’inscrivent plutôt dans les moyen et long termes.
Les routes maritimes arctiques permettent de réduire largement la distance de transit entre les grands ports du nord de l’Atlantique et ceux du nord du Pacifique. Ainsi la Route maritime du Nord (RMN), ou passage du nord-est, permet de gagner 7 400 km sur un trajet Londres-Yokohama, 3 800 km sur un trajet Rotterdam-Shanghai ou 3 400 km sur un trajet Hambourg-Seattle (10) (soit entre 20 et 30 % de trajet). Elles présentent également l’avantage d’éviter des zones très fréquentées, soumises parfois à la piraterie, voire aux aléas du blocage accidentel ou intentionnel des goulots d’étranglement du trafic maritime (canaux de Suez et de Panama, détroits de Malacca et de Bab-El-Mandeb). En revanche, elles restent soumises à des conditions de navigation difficiles, souvent dans des zones à risque de glace, ce qui nécessite un équipage aguerri, une conception adaptée (certification glace) et peut contraindre les vitesses de transit. Le trafic sur la RMN est en plein essor, mais concerne pour l’instant essentiellement un trafic dit de destination, c’est-à-dire en provenance ou à destination de ports de l’Arctique, alors que le trafic de transit du Pacifique vers l’Atlantique reste très limité (11). Le chemin est encore long avant de concurrencer les autoroutes maritimes de l’océan Indien (en 2018, 84 566 navires ont transité par le détroit de Malacca, et 17 550 par le canal de Suez).
La zone arctique bénéficie également d’immenses réserves offshore de pétrole, de gaz et de minerais, dont des terres rares : la fonte de la banquise permet d’envisager leur exploitation, auparavant impossible. Les principaux champs se situent au nord de l’Alaska, du Canada, de la Norvège, mais surtout de la Russie qui détient dans sa Zone économique exclusive (ZEE) l’immense majorité des réserves prouvées. Leur exploitation fait l’objet d’attributions de concessions d’exploitation entre les grands groupes pétro-gaziers, pour la plupart au sein de consortiums associant les géants russes avec les groupes étrangers, initialement occidentaux, puis également chinois depuis les sanctions mises en place en 2014 suite à la crise de Crimée. Enfin, les réserves estimées de minerais stratégiques et de terres rares de l’Arctique suscitent également des espoirs importants, notamment auprès des grands pays industrialisés fortement consommateurs de ces approvisionnements pour la production des technologies de pointe (industrie de défense, aéronautique, télécommunications, santé, etc.). L’exploitation des mines du Grand Nord leur permettrait de diversifier leurs sources d’approvisionnement et de moins dépendre de la Chine.
Hormis sur la liaison de la Norvège au Svalbard, l’Arctique est aujourd’hui dépourvue de câble sous-marin. En revanche, le recul des glaces permet d’envisager leur pose pour relier les grandes métropoles de l’Atlantique et du Pacifique Nord. Le gain en distance pourrait réduire d’un tiers le « temps de latence » dans la transmission des données (12), élément essentiel pour les transactions financières. Des projets commencent à voir le jour, comme le « Far North Fiber » prévoyant de relier, d’ici 2025, le Japon au nord de l’Europe en empruntant le passage du nord-ouest (13). Le trajet de la RMN serait plus accessible, mais nécessite des relations de confiance entre les États pour se prémunir des risques d’espionnage et de sabotage. La Chine qui a acquis les technologies pour la pose de câbles pourrait chercher à en faire une des composantes de sa route de la soie arctique à moyen terme.
Premiers bénéficiaires : les États riverains de l’Arctique
L’essentiel des ressources identifiées se situe dans les ZEE des cinq États riverains de l’Arctique. La question des droits d’exploitation des ressources des fonds marins ne fait pas l’objet de rivalités à ce stade. Les délimitations des ZEE n’y font l’objet que de rares litiges autour de quelques îles. La Norvège et la Russie se sont accordées de manière pragmatique en 2010 pour définir la limite entre leur ZEE après quarante ans de négociations. L’exploitation du potentiel de la zone est un fort attrait pour sortir du statu quo et trouver des accords.
Outre les revendications canadiennes et russes sur le statut d’eaux intérieures de certains passages des routes maritimes, le principal domaine juridique où s’exercent les rivalités entre les grandes puissances de l’Arctique concerne la question de l’extension du plateau continental. En application de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM), un État peut obtenir un plateau continental étendu à 350 nautiques, soit environ 650 km de la côte, s’il démontre auprès de la Commission des limites du plateau continental l’extension géologique naturelle de son propre sous-sol. Les États riverains ont tous posé des demandes en ce sens (à part les États-Unis qui n’ont pas ratifié la CNUDM). Au-delà de l’exploitation des ressources du plateau continental afférant, les prétentions du Canada, de la Russie et du Danemark relèvent également de l’ordre du symbole et du prestige puisque leurs revendications se chevauchent au pôle Nord. Nul doute qu’un accord sur un point aussi sensible ne sera pas tranché de sitôt par l’ONU, même si la Russie a voulu prendre un avantage psychologique lorsqu’en 2017, elle a planté au pôle Nord un drapeau russe en titane, par 4 000 m de fond.
L’implication croissante des États non riverains de l’Arctique (Chine, Inde, Japon, États européens…) ne relève pas simplement de la participation désintéressée aux études scientifiques nécessaires pour suivre l’évolution du réchauffement climatique et ses conséquences dans la région. Le libre accès aux routes maritimes du Grand Nord constitue un enjeu fort pour ces puissances commerciales. La participation de leurs champions à l’exploitation des ressources du sous-sol arctique constitue également une forte motivation.
Toutefois l’attrait de l’Arctique et le positionnement des grandes puissances dans la région pourraient également relever d’une autre grille de lecture, relative à l’évolution du paysage géopolitique et l’exploitation des potentialités stratégiques qui en résultent.
Un bouleversement de la géopolitique mondiale
Théories du Heartland/Rimland et accès aux mers chaudes dominent toujours le Grand Jeu
La Russie a bénéficié pour le développement de son empire d’une formidable barrière défensive naturelle dans tout le nord de son territoire, l’océan glacial Arctique. À la fois protection stratégique et frein au développement économique, cette donnée géographique a déterminé historiquement l’ensemble des réflexions stratégiques et géopolitiques sur l’orientation de la puissance russe, et par conséquent, les enjeux de puissance entre États.
Dès le XVIIe siècle, la Russie cherche à briser son isolement du commerce maritime mondial par un accès aux mers libres de glaces. En 1721, Pierre le Grand accède aux rives de la Baltique après une guerre de 21 ans contre la Suède. En 1774, Catherine II atteint la mer Noire en s’emparant de la Crimée aux dépens de l’empire ottoman. Mais cela ne suffit pas à l’empire russe. L’objectif ultime est la prise de Constantinople et le contrôle des détroits des Dardanelles et du Bosphore. L’intervention franco-britannique de 1854 permet de stopper la progression russe et conserver le contrôle des lignes commerciales en Méditerranée. Profitant des faiblesses d’un empire chinois déclinant, la Russie oriente alors son effort à l’est et atteint Vladivostok, port de l’océan Pacifique libre de glaces l’essentiel de l’année (14).
Le formidable développement de la puissance terrestre de la Russie amène Sir John Mackinder à proposer en 1904 sa théorie dite du « Heartland », la zone pivot au cœur du continent eurasiatique dont le contrôle permettrait de dominer la grande majorité des terres émergées. Cette théorie est adaptée en 1942 par l’américain Nicholas Spykman qui postule que le contrôle des espaces périphériques au Heartland, le « Rimland », permettrait de contenir la principale puissance terrestre. Bien que controversées pour leur absence de fondement robuste sur les facteurs de puissance entre les États, ces théories géopolitiques ont façonné pour une large part les perceptions stratégiques des grandes puissances au XXe siècle, à travers la politique américaine d’endiguement de l’URSS et les nombreux affrontements dans cet espace périphérique, en Europe de l’Est, en Asie du Sud-Est ou en Afghanistan.
Le positionnement actuel des bases américaines et les interventions militaires réalisées en ce début de XXIe siècle illustrent à quel point le contrôle du « Rimland » reste d’actualité. Et lorsque la Chine lance sa « Belt and Road Initiative » (BRI), elle semble chercher elle aussi à y contester la mainmise occidentale (15), en prenant progressivement le contrôle de points d’appui sur le pourtour de la masse continentale eurasiatique.
Vers une nouvelle géopolitique mondiale ?
Or, voici que disparaît une donnée fondamentale de la théorie du « Heartland » : en Arctique, s’ouvre un océan qui va devenir accessible et exploitable. Le contrôle du Rimland ne permettra plus alors d’encercler la puissance continentale, puisque son littoral septentrional se dégage des glaces. Une hypothèse majeure dans la construction des théories géopolitiques va s’effondrer dans le courant du XXIe siècle. Quelles en sont les conséquences ? Quel regard nouveau et lucide doit-on apporter sur la carte mondiale des relations de puissance pour ne pas subir cette « surprise » géopolitique (16) ?
La Russie place ses pions pour rester maître du jeu dans l’Arctique
L’Arctique est devenu une priorité de premier ordre pour la Russie (17), tant d’un point de vue militaire qu’économique. En 2001, elle a annoncé sa « Stratégie arctique pour 2020 », consistant en investissements publics et privés de grande ampleur dans le Grand Nord. Il s’agit d’anticiper le développement d’un axe commercial essentiel entre les principaux poumons économiques de la planète. Les ports russes seraient idéalement placés pour en profiter, alimenter les vastes hinterlands du nord-est de l’Europe et désenclaver la partie orientale du territoire russe. Ils trouveraient également des débouchés facilités pour leurs exportations de matières premières.
La Russie réinvestit militairement les bases arctiques délaissées à la chute de l’URSS et y crée une vaste zone à capacité A2AD (Anti-Access Area Denial). Cette politique se traduit également par des déploiements réguliers de forces navales, par l’établissement de pistes pour son aviation à long rayon d’action (Alra), par l’entraînement d’unités spécialisées dans le combat en zone arctique, et par le programme ambitieux de brise-glace nucléaires de la classe Arktika (18) pour y assurer la liberté de mouvement toute l’année. Les intentions de la Russie restent cependant ambiguës : prendre les devants pour assurer une défense robuste de son vaste littoral nordique, ou chercher à imposer sa volonté dans une nouvelle zone stratégique ?
Cette stratégie est conforme à la ligne traditionnelle du Kremlin, jouant du sentiment national d’encerclement pour justifier de fortes positions défensives, pouvant rapidement profiter d’opportunités dans les zones de moindre résistance. L’invasion de l’Ukraine vient de nous en fournir un dramatique exemple… Il ne faudrait pas qu’il en soit de même en Arctique.
La Chine, un acteur ambitieux du développement de l’Arctique
La Chine se positionne, d’ores et déjà, comme un acteur majeur de la zone. Pays observateur au Conseil de l’Arctique depuis début 2013, elle s’est autoproclamée « pays proche de l’Arctique » (19). Jouant habilement des mêmes arguments que les puissances occidentales, elle met en avant ses capacités scientifiques pour mieux comprendre les évolutions climatiques et ses capacités financières pour soutenir la montée en gamme des infrastructures d’une région jusqu’à présent tenue à l’écart des grands enjeux économiques.
Elle y déploie ainsi depuis 2017 sa « route polaire de la soie », avec une stratégie d’investissements économiques dans la plupart des pays riverains. Elle a implanté une base scientifique au Svalbard, a pris des positions dans les industries gazières en Sibérie, développe des projets en Norvège, en Finlande et en Islande, et montre un appétit pour le développement d’infrastructures au Groenland.
La Chine sera la première bénéficiaire de l’exploitation d’une RMN qui lui permettra des gains importants dans ses échanges avec l’Europe et les États-Unis, et lui offrira une alternative à la route de l’océan Indien soumise au possible blocus des détroits. Elle n’affiche pas d’ambition militaire dans la zone arctique, mais elle est bien décidée à y faire respecter la liberté de navigation, dans un « deux poids-deux mesures » sans scrupule avec sa politique en mer de Chine méridionale.
En 2014, la Chine a profité des sanctions occidentales contre la Russie pour investir massivement dans les infrastructures énergétiques russes. Alors qu’il est encore trop tôt pour évaluer toutes les conséquences de la guerre en Ukraine, la coopération entre les deux géants eurasiatiques se dessine (20). Si elle se confirmait, elle complexifierait notablement l’équation stratégique des États-Unis. Ce grand bloc continental bénéficierait de liaisons intérieures assurant les échanges entre matières premières, investissements et technologies. Mais surtout, avec deux grandes façades maritimes, l’accès aux océans leur serait facilité, y compris en cas de crise. De ce point de vue, la RMN, totalement sous la bulle A2AD russe, offre un axe de circulation plus sûr.
Le développement des investissements chinois dans l’Arctique et son degré de coopération avec la Russie devront être suivis attentivement car ils seront les meilleurs indicateurs de la réalité de la montée en puissance de l’Empire du Milieu dans cette zone stratégique. Une alliance Chine-Russie bénéficiant d’un océan Arctique libre de glaces conférerait à ce bloc continental de nombreux atouts d’une puissance maritime mondiale.
Les États-Unis face à un défi géopolitique majeur : l’encerclement complet du Heartland
Depuis Brzezinski, la doctrine américaine suit la même ligne avec constance : l’endiguement de l’espace eurasiatique, le bloc Russie-Chine, afin de les empêcher de pouvoir rivaliser et détrôner la puissance maritime dominante. Cela signifie que les États périphériques (Europe, Moyen-Orient, Asie du Sud-Est et Pacifique occidental) doivent rester dans la sphère américaine (21).
Un Arctique libre de glaces est de nature à créer une brèche conséquente dans l’endiguement américain. Les États-Unis en ont pris conscience. En juin 2019, à travers sa stratégie pour l’Arctique, le Pentagone prend acte de la nouvelle compétition stratégique à l’œuvre en Arctique avec la Russie et la Chine, et prévoit un accroissement significatif de ses capacités en Arctique et Atlantique Nord. L’objectif affiché est de disposer des forces suffisantes pour garantir la liberté de navigation et de survol en Arctique, et ainsi empêcher Chine et Russie d’y consolider un corridor entre les deux théâtres stratégiques de l’Indo-Pacifique et de l’Europe (22).
Lorsqu’en août 2019 le président Trump annonce qu’il souhaite acheter le Groenland au Danemark, au-delà de l’effet d’annonce, il marque clairement au monde entier la volonté américaine de renforcer ses positions dans le Grand Nord et de ne pas laisser le champ libre à ses compétiteurs. La réactivation en 2018 du commandement de la 2nd Fleet de l’US Navy basée à Norfolk constitue également un signal fort. Commandement maritime emblématique de la guerre froide, il est chargé de la défense maritime de l’Arctique et de l’Atlantique Nord. Dans le même temps, les États-Unis exploitent à nouveau la base de Keflavik en Islande où sont positionnés des avions de patrouille maritime P-8 Poseidon. Mis à part leurs deux brise-glace insuffisants pour naviguer en autonomie à travers la banquise, les États-Unis disposent toujours de capacités militaires majeures en Arctique grâce à leurs systèmes de surveillance, de défense et de dissuasion (23).
Toutefois poursuivre la stratégie d’endiguement ne se limite plus à devoir tenir un vaste croissant allant de l’Europe à l’Asie du Sud-Est, il faut maintenant procéder à un encerclement complet. Tenir seuls un front aussi étendu constitue un défi de taille, même pour la superpuissance américaine. La capacité des États-Unis à s’appuyer sur des alliances fortes et des partenaires engagés à leurs côtés devient à nouveau essentielle. Après avoir traversé une crise existentielle depuis la chute de l’URSS jusqu’à son « état de mort cérébrale », l’Otan retrouve des couleurs et sa raison d’être face à son adversaire de toujours. La nouvelle alliance AUKUS entre les États-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni relève aussi de cette stratégie d’encerclement en s’appuyant sur tous les partenariats essentiels.
Les compétiteurs font monter la pression, exploitant chaque faiblesse présumée, appuyant là où des fissures pourraient apparaître dans la cuirasse. La course aux armements est relancée. Les États-Unis vont devoir consacrer une part croissante de leurs ressources économiques, démographiques, militaires et d’influence pour conserver leur statut de première puissance mondiale. Le défi est de taille, c’est celui du XXIe siècle.
Recommandations pour les armées françaises, bras armé d’un État stratège
Pour faire face à l’ampleur de ces défis, à la multiplication des zones de crise potentielle, des théâtres de déploiement, à la course à la technologie et au réarmement en masse de nos compétiteurs, la France va devoir être un État stratège : définir une ambition conforme à ses intérêts en l’état du monde, et atteindre ses objectifs avec le meilleur emploi de moyens contraints.
Une prise de conscience progressive
Sans être un État riverain de l’Arctique, la France n’en est pas moins concernée au premier plan par les différents enjeux du Grand Nord. Bénéficiant d’une longue tradition d’expéditions scientifiques polaires portées depuis 1992 par l’Institut polaire français Paul-Émile Victor (IPEV), la France cherche à élargir son horizon dans les pôles dès 2009 avec la création du poste d’ambassadeur pour les pôles, alors occupé par Michel Rocard. En juin 2016, elle se dote d’une « Feuille de route nationale sur l’Arctique » (FRNA), intitulée « Le grand défi de l’Arctique », définissant les priorités en matière de recherche scientifique, de coopération économique, d’enjeux de défense et de sécurité, et de protection de l’environnement. La présence française dans les instances internationales traitant de l’Arctique, le rôle de l’UE et les intérêts nationaux dans la zone y sont également soulignés. Plusieurs rapports parlementaires se sont depuis fait l’écho de cette ambition et encouragent une plus grande et constante implication de la France et de l’UE dans la zone (24).
Contribuer à la compréhension et à la limitation du réchauffement climatique, participer à une exploitation concertée des nouvelles possibilités économiques en Arctique, comprendre et anticiper l’évolution des postures dans la région pour aider à prévenir la montée de tensions, convaincre de l’intérêt de tous au principe de la liberté de navigation dans une région aussi stratégique pour les échanges mondiaux, et bien sûr garantir la liberté de manœuvre des forces aéromaritimes en Atlantique, essentielle à la crédibilité de la dissuasion française : autant de missions auxquelles les forces armées françaises vont devoir répondre dans la durée (25), autant de facettes d’une même ambition, préserver une gouvernance équilibrée et apaisée en Arctique. La montée des tensions actuelles illustre à quel point cet objectif s’avère, d’ores et déjà, ambitieux et urgent.
Préserver une zone Arctique essentielle pour l’avenir de la planète
Face à l’enjeu majeur que constitue le réchauffement climatique, la France, aux côtés des pays membres de l’UE, se veut à l’avant-garde de la transition climatique. Dans son discours de la COP26 à Glasgow, le 23 février 2021, le président de la République a évoqué trois régions, dont l’Arctique, qui nécessitent une « implication de la communauté internationale […] pour éviter des conflictualités nouvelles », soulignant « l’enjeu climatique et géopolitique, […] et les réponses pour prévenir le réchauffement et éviter les tensions géopolitiques ». Les armées pourraient contribuer, en parallèle de certaines de leurs missions, au soutien de l’action des missions scientifiques françaises menées par l’IPEV, à travers un soutien logistique, le partage d’observations, voire le développement en commun de moyens partagés.
Le suivi de l’évolution de certains paramètres climatiques est possible grâce aux nombreux capteurs, navires, aéronefs et satellites qui observent déjà, sur le temps long, les évolutions dans la zone. Ce pourrait être l’occasion de renforcer nos moyens d’observations, notamment satellitaires, en prévoyant une coopération entre Européens, ce domaine se prêtant particulièrement bien au consensus et aux missions que se fixe l’Union européenne. Enfin, sans brise-glace, la France manque d’un moyen essentiel pour soutenir l’action de ses missions scientifiques et pour agir en autonomie dans la zone arctique. Alors que tous les pays du G7 en possèdent, il pourrait être envisagé de se doter d’un tel bâtiment, soit à usage dual civilo-militaire sur le modèle de l’Astrolabe (26), soit dans le cadre d’un programme de coopération européen à initier.
Défendre le respect des conventions internationales et la libre circulation sur les mers
Même si l’exploitation massive des routes maritimes est encore lointaine, la possibilité que l’océan Arctique devienne un axe stratégique du commerce maritime international dans la seconde moitié du XXIe siècle doit être anticipée. La défense de la liberté de navigation dans les eaux internationales de l’Arctique peut nécessiter de s’y déployer avec des moyens militaires capables d’appuyer une vision équilibrée du monde et des échanges, en refusant toute préemption ou fait accompli dans la zone. Ces moyens devront bénéficier d’une bonne connaissance et compréhension de l’environnement, ce qui milite pour y poursuivre des déploiements réguliers de navires océanographiques comme de bâtiments de combat. Renouveler une navigation complète le long d’une route arctique lorsque le contexte international le permettra viserait également à appuyer cette position (27). Ce pourrait être l’occasion de favoriser une coopération accrue avec les marines des pays riverains.
Garantir la liberté de manœuvre dans le Grand Nord
Le développement des usages et des capacités militaires étrangères en Arctique ne devra pas limiter la liberté de manœuvre aéromaritime dont bénéficient actuellement les moyens français dans le Grand Nord, essentielle pour la crédibilité de la dissuasion nucléaire. Les travaux de préparation de la prochaine Loi de programmation militaire (LPM) devront tenir compte des perspectives en Arctique et de la forte incertitude associée aux intentions de nos compétiteurs. Le théâtre de l’Atlantique Nord s’étend au-delà du cercle arctique. Dans le cadre de ses engagements, la Marine nationale peut y déployer simultanément des moyens de combat conséquents : frégates anti-sous-marines, avions de patrouille maritime et sous-marins nucléaires d’attaque. Y opérer nécessite des unités capables non seulement de surclasser les moyens de combat les plus modernes, mais également d’opérer dans la durée malgré les conditions particulièrement exigeantes du Grand Nord.
Agir avec l’UE et l’Otan
Dans le nouveau Grand Jeu qui se dessine en Arctique entre les principales puissances, la France devra continuer d’inscrire ses actions en coordination avec celles de l’Otan et de l’UE. Cette coopération constitue déjà un des axes principaux de notre action dans la région arctique. La participation des armées françaises aux exercices conjoints en milieu polaire (Arctic Challenge, Trident Juncture…) contribue à l’interopérabilité de nos forces, à un partage des bonnes pratiques dans les conditions extrêmes de grand froid et à la confiance mutuelle de partenaires qui montrent leur détermination à agir ensemble. L’entretien de capacités interarmées entraînées et interopérables avec nos alliés pour agir en réassurance, voire en réaction rapide, doit se poursuivre.
Face à un environnement éprouvant pour les hommes et le matériel, l’établissement d’un point d’appui en zone arctique chez un de nos partenaires norvégiens, islandais ou danois faciliterait les mouvements logistiques en soutien de nos unités déployées pour de longues périodes. Il illustrerait également notre détermination à agir dans la zone au profit de l’Alliance atlantique.
Évaluer les conséquences géopolitiques de l’ouverture de l’océan Arctique
Les enjeux de puissance dans la zone arctique ne peuvent se limiter à l’étude des rivalités liées aux perspectives de développement économique. Ce sont les équilibres relatifs entre les États-Unis, l’UE et leurs deux principaux compétiteurs, la Chine et la Russie, qui sont remis en question par la modification de la carte du Grand Jeu. Alors que la compétition s’intensifie dans tous les secteurs, que les vulnérabilités des uns sont aussitôt exploitées par le biais de contestations de plus en plus affirmées, y compris par le retour de la guerre de haute intensité en Europe, l’évolution géographique majeure que constitue la fonte de la banquise et l’ouverture progressive de l’océan Arctique va modifier les zones de friction classiques. Un nouveau champ de confrontation potentielle s’ouvre. La France se doit d’analyser les conséquences de ce changement majeur pour partager avec ses partenaires et alliés ses conclusions et convictions afin d’éviter une surprise stratégique qui jetterait un froid polaire dans le dos de l’alliance occidentale.
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L’Arctique subit de plein fouet, et plus qu’aucune autre région, les effets du réchauffement climatique, le plus visible étant le recul de la banquise. Alors qu’il est difficile d’en évaluer toutes les conséquences sur un écosystème jusqu’ici préservé, la disparition progressive des glaces devrait apporter son lot d’opportunités aux États riverains par l’exploitation des richesses de sous-sols enfin accessibles, et de nouveaux usages pour la pêche, le tourisme et surtout l’exploitation des routes maritimes.
La gouvernance actuelle y privilégie les coopérations entre les États riverains au sein de structures comme le Conseil de l’Arctique. Mais le réchauffement climatique va provoquer dans la région une profonde évolution de constantes géographiques qui ont façonné jusqu’ici notre vision du monde. Ce sont alors les cartes de la géopolitique mondiale qui pourraient en être rebattues. Dans un monde où les rivalités entre les puissances s’affichent de plus en plus ostensiblement, et alors que la partie s’annonce serrée pour la domination du monde au XXIe siècle, les grands acteurs comptent chaque carte et ne laisseront pas passer l’atout maître : l’Arctique sera-t-il l’atout qui fera pencher la balance ?
La position d’équilibre de la France doit l’inciter à analyser ces évolutions en autonomie et avec lucidité pour décider en fonction de ses intérêts et ses ambitions. « Ce sont les intérêts, et non les idées, qui déterminent directement les actions des hommes » (Max Weber).
Éléments de bibliographie
Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, Bilan des négociations climatiques de Glasgow (COP26) (Rapport d’information n° 279), Sénat, 9 décembre 2021 (http://www.senat.fr/rap/r21-279/r21-279.html).
Commission des Affaires étrangères, La problématique des pôles : Arctique et Antarctique (Rapport d’information n° 4082), Assemblée nationale, 14 avril 2021 (https://www.assemblee-nationale.fr/).
Commission des Affaires européennes, La politique de l’Union européenne pour l’Arctique (Rapport d’information n° 499), Sénat, 5 avril 2017 (https://www.senat.fr/rap/r16-499/r16-4991.pdf).
Garcin Thierry, Géopolitique de l’Arctique (2e édition), Économica, 2021, 256 pages.
Gosset Nicolas, « Ressources et enjeux stratégiques dans l’Arctique. Un retour de la géopolitique ? », Sécurité & Stratégie n° 145, Institut royal supérieur de défense [Belgique], février 2021 (https://www.defence-institute.be/wp-content/uploads/2021/02/ss-145.pdf).
Lasserre Frédéric, Passages et mers arctiques, géopolitique d’une région en mutation, Presses de l’Université du Québec, 2010, 490 pages.
Loïzzo Clara et Tiano Camille, L’Arctique, à l’épreuve de la mondialisation et du réchauffement climatique, Armand Colin, 2019, 192 pages.
Ministère des Affaires étrangères et du Développement international, Le Grand défi de l’Arctique – feuille de route nationale sur l’Arctique, juin 2016, 66 pages (https://www.diplomatie.gouv.fr/).
Working Group I Contribution to the Sixth Assessment Report of the IPCC, « The Physical Science Basis–Summary for Policy makers », 2021 (https://www.ipcc.ch/).
Zajec Olivier, Introduction à l’analyse géopolitique, Éditions du Rocher, 2018, 272 pages. ♦
(1) Working Group I Contribution to the Sixth Assessment Report of the IPCC, « The physical science basis–Summary for policy makers », 2021 (https://www.ipcc.ch/).
(2) Scénarios SSP1-1.9 et SSP1-2.6, correspondant à une absorption du CO2 par la planète supérieure aux émissions, respectivement dès 2055 et 2075.
(3) Garcin Thierry, Géopolitique de l’Arctique (2e édition), Économica, 2021, p. 49.
(4) Prévu de remplacer le porte-avions Charles-de-Gaulle vers 2038.
(5) Rouet Sébastien, « En Russie des îles révélées à cause de la fonte des glaces » GÉO, 25 novembre 2019 (https://www.geo.fr/environnement/en-russie-des-iles-revelees-a-cause-de-la-fonte-des-glaces-198277).
(6) Garcin Thierry, op. cit., p. 50.
(7) Sol glacé durant au moins deux ans – permafrost en anglais.
(8) Les États-Unis ont réintégré le traité de Paris en 2021, sous la présidence Biden.
(9) Garcin Thierry, op. cit., p. 113.
(10) Pic Pauline, « Naviguer en Arctique », Géoconfluences, 14 février 2020 (http://geoconfluences.ens-lyon.fr/).
(11) En 2018, 18 M de tonnes de fret transporté par la RMN, contre un maximum à 4 M jusqu’en 2014. Mais seulement 491 000 t de fret ont été transportés par des navires en transit (27 passages en 2018). Gosset Nicolas, « Ressources et enjeux stratégiques dans l’Arctique. Un retour de la géopolitique ? », Institut Royal supérieur de Défense de Belgique, février 2021 (https://www.defence-institute.be/wp-content/uploads/2021/02/ss-145.pdf).
(12) Garcin Thierry, op. cit., p. 131.
(13) Houdassine Ismaël, « Un nouveau câble sous-marin de communication passera bientôt par l’Arctique canadien pour relier l’Europe à l’Asie », Regard sur l’Arctique, 16 février 2022 (https://www.rcinet.ca/).
(14) Marineau Sophie, « La doctrine maritime russe : l’accès aux mers chaudes, toujours une priorité ? » Horizons stratégiques, 6 janvier 2020 (https://horizonsstrategiques.com/).
(15) Ricqlès (de) Robin « Les nouvelles routes de la soie chinoises au prisme des théories du Heartland/Rimland », École de guerre économique, 29 octobre 2020 (https://www.ege.fr/).
(16) Zajec Olivier : Introduction à l’analyse géopolitique ; Éditions du Rocher, 19 septembre 2018.
(17) Gosset Nicolas, op. cit.
(18) Sept prévus, deux déjà en service et trois en construction.
(19) Gosset Nicolas, op. cit.
(20) Cf. discours Poutine-Xi Jinping du 4 février 2022 : « partenariat stratégique », « l’amitié entre nos deux pays ne connaît pas de limite ». « Xi Jinping et Vladimir Poutine affichent leur opposition commune à l’élargissement de l’Otan », France 24, 4 février 2022 (https://www.france24.com/).
(21) Brzezinski Zbigniew, Le Grand échiquier : L’Amérique et le reste du monde, Bayard, 1997, 273 pages. « La priorité géostratégique est donc de gérer l’émergence de nouvelles puissances mondiales de façon qu’elles ne mettent pas en péril la suprématie américaine. » « L’Europe de l’Ouest reste dans une large mesure un protectorat américain et ses États rappellent ce qu’étaient jadis les vassaux et les tributaires des anciens empires. »
(22) Department of Defense, Arctic Strategy, Report to Congress, juin 2019, 19 pages (https://media.defense.gov/).
(23) Système de surveillance et de contrôle de l’espace aérien polaire dans le cadre du NORAD, bases radar et missiles de Thulé au Groenland et de Fort Greely en Alaska.
(24) Commission des Affaires étrangères, La problématique des pôles : Arctique et Antarctique (Rapport d’information n° 4082), Assemblée nationale, 14 avril 2021 (https://www.assemblee-nationale.fr/). Commission des Affaires européennes, La politique de l’Union européenne pour l’Arctique (Rapport d’information n° 499), Sénat, 5 avril 2017 (https://www.senat.fr/rap/r16-499/r16-4991.pdf).
(25) Le ministère des Armées a publié en 2019 une plaquette d’information sur « la France et les nouveaux enjeux stratégiques en Arctique », décrivant les actions menées par les armées en Arctique.
(26) Navire construit et exploité en partenariat entre la collectivité des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), l’IPEV et la Marine nationale pour assurer les rotations de ravitaillement des bases françaises en Antarctique.
(27) En septembre 2018, le BSAM Rhône est le premier navire militaire non-russe à emprunter la RMN sans l’aide de brise-glace.