Les interventions au RAID sont, pour la plupart, des crises de haute intensité. Le négociateur, quand sa spécialité est utilisée afin de résoudre la situation, doit être prêt et en aucun cas ne doit subir de stress. Ce stress doit être mobilisateur et contrôlé pour être positif. Tout est fait au RAID, du recrutement à la formation, pour que le négociateur ne subisse pas ce stress lors des interventions. Il doit en effet être en pleine possession de ses moyens, car un mauvais choix de sujet évoqué, de mots ou de ton employés, peut faire rapidement déraper la situation.
Le stress lors des négociations au RAID
Lorsque la crise survient, il n’y a pas de place pour l’improvisation ou l’à-peu-près. Le négociateur, véritable clé de voûte dans la résolution de certaines crises, doit être en capacité d’absorber la pression et de se mobiliser, rapidement et sans faille, dans sa négociation. Cela se traduit par un recrutement rigoureux et une formation intense ainsi qu’un dispositif d’intervention spécialisée calibré pour que le négociateur puisse travailler sereinement.
Recrutement et formation
Le recrutement est un processus très complet pendant lequel le candidat est évalué sur ses prédispositions pour occuper le métier de négociateur, sur sa confrontation passée à des situations de police stressantes et sur des tests poussés pour évaluer sa capacité de résistance au stress. De même, une part belle est donnée à la capacité de vivre et travailler en groupe.
Ne peuvent postuler au métier de négociateur au RAID que des policiers expérimentés. Un long entretien individuel avec les membres de la cellule négociation, dont le psychologue, permet de vérifier le passé du postulant ainsi que son vécu face à des situations de police compliquées. Seuls seront convoqués aux tests de sélections, soit des policiers ayant déjà affronté des interventions complexes et y ayant fait face avec brio, soit les candidats présentant d’excellentes qualités de stabilité émotionnelle.
Lors de ces tests, une part importante est laissée aux tests psychotechniques et entretiens avec des psychologues chargés du recrutement afin de faire un état, le plus fidèle possible, du profil du candidat.
Ce dernier va enfin être confronté, sur plusieurs jours et nuits, à différentes épreuves et mises en situation pendant lesquelles sa résistance au stress va être scrutée de manière approfondie. Seuls les candidats ne rencontrant aucune difficulté pourront éventuellement faire partie du vivier.
Le fonctionnaire qui intégrera par la suite le groupe négociation du RAID bénéficiera d’une formation de négociateur de crise d’une durée de quatre semaines mêlant formation théorique et surtout, exercices pratiques.
Toutes les situations qu’un négociateur pourrait être amené à rencontrer dans le cadre de ses fonctions sont jouées afin que celui-ci ait des repères, quelles que soient les crises sur lesquelles il interviendra par la suite. Ces situations sont toutes tirées de situations réelles que les négociateurs ont eues à traiter afin de coller au plus près à la réalité.
Une période probatoire de six mois est prévue pendant laquelle le RAID pourra se séparer de sa nouvelle recrue.
Tout au long de sa carrière au RAID, le négociateur sera confronté à des exercices toujours plus réalistes et qui collent au mieux aux nouvelles menaces.
L’intervention
Une fois préparé, le négociateur doit être capable de se mobiliser en quelques minutes et rentrer efficacement dans sa négociation.
Le négociateur n’interviendra jamais seul. Lorsque cela est possible dans les antennes RAID et de manière systématique pour l’échelon central du RAID, les négociateurs interviendront, a minima, au nombre de deux. Ce ou ces négociateurs seront également épaulés par une équipe en base arrière constituée de deux négociateurs et d’un psychologue. Le rôle de cette équipe en back-up est de fournir le plus de renseignements possibles sur l’individu (profil psychologique, éléments de personnalité, de vie, antécédents judiciaires) et sur la crise dans son ensemble. Pendant tout le temps de leur projection sur la crise, les fonctionnaires chargés de la négociation recevront ces éléments de personnalité, des débriefings de tiers, des éléments d’ambiance sur place.
Cette phase de projection est donc mise à profit pour une préparation mentale du négociateur afin qu’il soit prêt, une fois sur place, à entamer sa négociation dans les meilleures conditions.
Dès le début de la crise, le négociateur aura acquis des réflexes afin de démarrer sa négociation du mieux possible et pour ne pas laisser le stress l’envahir et interférer dans sa prise de contact avec la personne en crise. Ce moment dit du « premier contact » est réellement un instant critique pour la négociation. Cette phase demande une grande concentration, car elle déterminera une grande partie de la suite des échanges. Elle est très souvent répétée, analysée et débriefée. Ainsi, le négociateur est censé la maîtriser parfaitement afin d’être serein au moment de sa prise de contact, quelle que soit la tournure que va prendre l’affaire et malgré toute la pression qu’il peut ressentir sur ses épaules à ce moment précis.
Durant le déroulement de la négociation, qui pourrait être comparée à un processus en « escalier », un lien va se créer entre la personne en crise et le négociateur. Une relation va s’instaurer et le négociateur va gagner en confiance à chaque « marche » franchie.
Tout au long de la crise, le négociateur pourra s’appuyer si besoin sur ses pairs et le psychologue. Cette réflexion groupale a également pour rôle de diluer le stress au maximum. En effet, le négociateur n° 1 (N1 : celui au contact de la personne en crise) pourra compter sur le négociateur n° 2 (N2). Ce dernier aura pour rôle d’aider son collègue dans les stratégies, les idées, les phrases à employer et veillera également à ce que son partenaire évite de tomber dans un effet tunnel, trop pris par la compréhension de la situation de son interlocuteur. Ce travail en binôme a également l’avantage de pouvoir changer de négociateur au contact si, avant ou au cours de la crise, cela s’avérait nécessaire. À tout moment de la négociation, une phrase d’encouragement, un geste ou un regard du N2 sont des éléments susceptibles de conforter le N1 et de faire baisser son stress.
Le choix du « poste de commandement négociation » est crucial. Il devra en effet répondre à un cahier des charges précis comme le silence, le contrôle des accès afin que les négociateurs puissent travailler dans le calme, la sérénité et se concentrent sur leur négociation.
Tout sera fait durant la crise pour que le négociateur puisse évoluer en toute sécurité. Il sera pris en compte par la colonne d’intervention s’il doit prendre contact à la voix ou en face-à-face, et ses déplacements seront couverts par les tireurs d’élite en place. Le dispositif est ainsi élaboré pour que le négociateur ne subisse aucun élément perturbateur et puisse travailler sans contrainte, donc sans stress.
Enfin, en dehors des crises, l’ambiance du groupe, les moments partagés ensemble et les liens tissés, permettent aussi de mettre chacun en confiance vis-à-vis des autres et d’appréhender la crise de façon plus sereine. L’état de stress peut être atténué ou retardé grâce à cette dynamique de groupe. ♦