De 2013 à 2022, les opérations Serval puis Barkhane ont constitué une période particulièrement exigeante pour les armées françaises. Emblématiques de nos engagements récents, ces deux missions réalisées dans la Bande sahélo-saharienne (BSS) ont mis en valeur le savoir-faire de nos militaires. L’Armée de l’Air et de l’Espace a contribué à l’effort collectif, par bien des facettes, que cette contribution souligne sans pour autant revendiquer l’exhaustivité.
Regards sur l'action de l'Armée de l'Air et de l'Espace au Sahel
Note préliminaire : Général de corps aérien, l’auteur a occupé de juillet à novembre 2013 les fonctions de conseiller air du Comanfor de l’opération Serval, assumant en même temps le commandement du Détachement Air et du site de Bamako (Comsite). De mai à novembre 2015, il est le Chef d’état-major (CEM) du Poste de commandement interarmées de théâtre (PCIAT) Barkhane. Enfin, de juin 2018 à septembre 2019, en tant que général adjoint opérations du Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA), il commande le JFAC AFCO (Joint Force Air Component Afrique centrale et de l’Ouest).
15 août 2022 : sur la Plateforme opérationnelle désert (PFOD) de Gao au Mali, deux soldats amènent les couleurs françaises pour la dernière fois. Quelques heures plus tard, un soldat français casqué ferme symboliquement les portes de la PFOD. Ces soldats et leurs camarades seront dans la nuit les derniers à quitter le Mali pour se redéployer au Niger, conformément à la décision du président de la République annoncée le 17 février 2022.
Au cours de Serval et Barkhane, les forces armées françaises stoppent les Groupes armés terroristes (GAT), investissent le sanctuaire de l’Adrar des Ifoghas, créent les conditions du retour à la vie démocratique et étendent la lutte à cinq pays de la Bande sahélo-saharienne (BSS) de la Mauritanie jusqu’aux portes de la Libye. Présente avant même le déclenchement des opérations le 11 janvier 2013, actrice décisive, avec les forces spéciales, du coup d’arrêt porté aux GAT dans leur tentative de fondre sur Bamako, l’Armée de l’Air et de l’Espace (AAE) a contribué à l’ensemble de ces actions, tant dans les cieux africains qu’au sol.
Les lignes suivantes retracent, sans exigence d’exhaustivité, l’action de l’AAE au cours de ces neuf années. Elles reviennent sur la contribution des aviateurs, femmes et hommes, aux opérations en Afrique centrale et de l’Ouest (AFCO), et mettent en exergue quelques points saillants.
Une intervention militaire non privilégiée mais envisagée
Les travaux d’anticipation de l’État-major des armées (EMA) l’ont conduit à rédiger en 2009 un plan stratégique Sahel et, dans la continuité, des planifications opérationnelles.
Ces travaux s’appuient sur des éléments régulièrement actualisés par différents moyens, dont ceux de l’Armée de l’Air (AA), qui à l’époque n’était pas encore « et de l’Espace ». Au cours des années 2011 et 2012, des missions sont programmées au départ de la métropole, déclenchées en accord avec le Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO), planifiées, programmées et conduites par le CDAOA. Par ailleurs, l’activité régulière des appareils de transport dans la partie occidentale de l’Afrique enrichit la connaissance des aérodromes de la région, de leur état et de leurs capacités d’accueil. Enfin, l’activité aérienne menée avec les Mirage F1 dans le cadre de l’opération Épervier (Tchad, de 1986 à 2014) permet une bonne connaissance de la zone orientale de la BSS, mais aussi des autres zones d’intérêts possibles.
Au cours de l’année 2012, le Mali s’enfonce dans l’obscurité, menaçant directement l’équilibre de la sous-région, et indirectement la sécurité de l’Europe. Face à cette situation, la France est très active sur le front diplomatique, auprès de ses partenaires européens pour la création de l’European Union Training Mission (EUTM) et de l’ONU. Le 20 décembre 2012, la Résolution 2085 est adoptée, qui prévoit le déploiement pour un an de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma) sous conduite africaine.
Même si elle n’est pas privilégiée politiquement, l’intervention militaire est étudiée. Dès le début 2012 le déploiement de l’un des quatre drones Harfang de l’AA sur la plateforme de Niamey est décidé. À N’Djamena, 3 Mirage 2000D (attaque conventionnelle) s’ajoutent désormais aux 2 Mirage F1CR (reconnaissance), au C-160 Transall (transport) et aux 8 hélicoptères de manœuvre Puma habituellement déployés. Deux ATL2 (surveillance) de l’aéronavale sont envoyés à Dakar. Et bien évidemment, les modules d’alerte des armées françaises, en l’occurrence la cellule Rapace pour l’Armée de l’Air, sont prêts à renforcer le dispositif si besoin. Ces forces ont une bonne idée des missions qui vont leur être demandées – les Mirage 2000D se sont entraînés à plusieurs reprises à stopper et neutraliser des colonnes de pick-up – et une très bonne compréhension du théâtre dans lequel elles vont se dérouler. Elles savent de plus qu’elles peuvent compter avec un préavis extrêmement court sur les forces prépositionnées, spéciales et conventionnelles.
Finalement, le 11 janvier, sollicitée par le président malien Dioncounda Traoré qui réclame « une intervention aérienne immédiate » et, ayant obtenu le blanc-seing du Conseil de sécurité réuni en urgence la veille au soir, la France décide d’intervenir militairement pour stopper l’incursion des terroristes. Les armées et en particulier l’AA ne sont pas prises au dépourvu. Les chasseurs déployés au Tchad sont en alerte depuis le 9 janvier. Ils sont 6 Mirage 2000D et non plus 3, car la relève prévue le 9 a été interrompue pour conserver au Tchad les avions et les équipages.
L’Armée de l’Air frappe en quelques heures… y compris depuis la métropole
Le 11 janvier, les hélicoptères du Commandement des opérations spéciales (COS) interviennent très rapidement en milieu d’après-midi, dans la région de Konna, et parviennent à stopper les djihadistes, mais au prix de la perte de l’un des leurs.
Les aviateurs, au pied de leurs avions armés depuis le matin, décollent à 20 h 15, les suivant une heure plus tard. Après deux ravitaillements en vol, indispensables compte tenu des distances à franchir, la première vague détruit un peu avant minuit le quartier général d’Ansar Dine à Konna. La seconde vague poursuit l’effort en rayant de la carte des centres logistiques djihadistes. À l’effet cinétique s’ajoute l’effet psychologique de la frappe sur les arrières, indétectable avant l’impact des munitions, de nuit.
Ce même vendredi, en terre bragarde, au moment où leurs camarades des M2000D marchent vers leurs avions, les aviateurs de la Base aérienne 113 de Saint-Dizier reçoivent l’ordre de se tenir prêts. Ils doivent rallier le Tchad au cours d’une mission qui survolera le Mali. Quatre Rafale s’envolent le dimanche 14 à l’aube, pour un raid de près de 10 heures, contournant l’Algérie par l’Ouest. Ils détruisent une vingtaine d’objectifs (1) avant de se poser sur la base de N’Djamena. Cette mission implique les bases aériennes de Saint-Dizier, Mont-de-Marsan et Istres, qui passent de façon quasi instantanée d’une logique de temps de paix à celle de temps de guerre. Une nouvelle fois, le modèle de la base aérienne outil de combat permanent démontre sa pertinence.
Dès le lendemain, et pendant deux nuits, les hélicoptères du COS et les avions de l’AA interviennent de façon conjointe pour neutraliser une deuxième colonne djihadiste au niveau de Diabaly. L’offensive des terroristes est brisée, l’initiative bascule dans le camp des forces régulières maliennes appuyées par des hommes des forces spéciales et les avions français.
Au début du mois de février, les chasseurs interviennent à nouveau dans le nord du Mali, en appui des forces terrestres françaises en provenance du Tchad, de Côte d’Ivoire et de métropole, accompagnées de soldats maliens et tchadiens. Ils réduisent le sanctuaire djihadiste de l’Adrar des Ifoghas. La coordination des feux entre aviation et artillerie, la détermination et le professionnalisme des troupes engagées au sol permettent, au terme de combats très durs, de venir à bout de ce bastion terroriste.
L’efficacité de la Chasse ne se dément pas tout au long des opérations en BSS. Les Rafale et les M2000 assurent l’appui aérien sur alerte ou programmé au profit des forces en BSS, africaines et françaises, spéciales et conventionnelles, mais aussi en périphérie au profit de nos troupes ou de nos alliés si besoin.
Le transport aérien militaire dans toutes ses dimensions
Si les forces françaises ne sont pas prises au dépourvu, il n’en demeure pas moins que les moyens instantanément disponibles sur le théâtre sont insuffisants pour répondre à la mission confiée par le niveau politique. Les plans prévoient donc le déploiement de plus de 4 000 hommes et de 20 000 tonnes de fret vers Bamako en quelques semaines (2). 60 % de cet effort logistique sont réalisés par des moyens aériens, militaires et affrétés. Les avions de transport de l’AA acheminent quasiment la moitié du fret nécessaire (3).
Lors des opérations dans les Ifoghas, onze avions (4) de transport tactique sont utilisés chaque jour, dont deux uniquement pour l’eau.
Tout au long des opérations en BSS, la logistique aérienne joue un rôle central dans le soutien de nos emprises, îlots éparpillés dans un océan de sable. Pour faire face au défi des élongations, aux pièges de la saison des pluies, à la faiblesse des infrastructures routières, à la menace terroriste, l’avion demeure la solution incontournable. L’A400M Atlas ouvre à ce titre de nouvelles perspectives en conciliant transport inter- et intra-théâtre. De même, la polyvalence de nos appareils permet au Multi Role Tanker Transport (MRTT) Phénix de couvrir les capacités en ravitaillement et en transport stratégiques, au cours du même vol si besoin. Ces appareils sont particulièrement sollicités lors du redéploiement final qui voit les forces françaises quitter le Mali. Un peu plus de 300 rotations aériennes sont nécessaires (soit 12 % de l’effort total, le reste ayant été transporté par voie terrestre) dont les deux tiers assurés par l’AAE.
Cependant, au cours des premiers jours, les avions de transport sont aussi utilisés dans le cadre de missions interarmées particulièrement exigeantes.
Le 25 janvier, une opération combinée de chasseurs, d’hélicoptères, d’avions de transport, de forces spéciales et conventionnelles permet la prise de l’aéroport de Gao. Après que les membres du Commando parachutiste de l’air n° 10 (CPA10) aient évalué l’état de la piste et identifié une portion permettant aux avions de se poser, deux vagues d’appareils effectuant des poser d’assaut déposent des forces spéciales qui saisissent l’aéroport, puis les hommes du 1er Régiment de chasseurs parachutistes (RCP).
Le 28 janvier, un dispositif aérien complexe comportant un AWACS (Système de détection et de commandement aéroporté), un drone Harfang, des chasseurs, un C-135 ravitailleur et un ATL2 se met en place au-dessus du Mali. Il soutient une opération de largage nocturne de près de 250 soldats qui vont être parachutés de nuit, sans marquage au sol, par 5 avions de transport C-160 Transall et C-130 Hercule en provenance d’Abidjan. Leur action et celle des troupes au sol qui ont saisi l’aéroport quelques minutes avant le saut des parachutistes permettent la libération de Tombouctou le lendemain.
Les Opérations aéroportées (OAP) sont utilisées tout au long des opérations en BSS. Un A400M procède à un Largage par air (LPA) au nord du Niger au départ de France en mars 2019, puis effectue deux LPA au cours du même vol au-dessus de Kidal puis Tessalit au mois de mai 2020. Des largages de parachutistes sont réalisés de nuit, aux confins du Niger, à la frontière avec l’Algérie, ou encore depuis la métropole grâce à l’A400M. Ces opérations bénéficient en particulier d’un « blanchiment de zone » (5) effectué par un drone de l’AA.
Ces OAP permettent de renouer au cours de missions réelles avec un savoir-faire, celui du largage de nuit sans référence au sol, que la France est une des rares nations à maîtriser.
Enfin, tout au long des opérations en BSS, les avions mais aussi les hélicoptères du transport aérien militaires permettent à nos soldats et ceux de nos partenaires de compter sur un moyen d’évacuation sanitaire vers les postes médicaux les plus proches, mais aussi vers la métropole.
Des drones en pleine maturité
Lorsque les opérations se déclenchent, l’AA cumule quinze ans d’expérience dans l’emploi en opérations des drones. Elle sait à quel point ils peuvent être déterminants dans ce type d’engagement asymétrique. Le 17 janvier, le plot Harfang déployé à Niamey (6) effectue son premier vol. En plus des missions ISR (Intelligence, Surveillance and Reconnaissance), il effectue la première illumination laser en opération le 29 janvier, guidant une GBU12 larguée par un ATL2. Il permet également de faire évoluer nos doctrines, en installant par exemple un Joint Terminal Attack Controller (JTAC ou Contrôleur tactique avancé) en cabine avec les opérateurs, avec des prérogatives similaires à celles d’un Airborne FAC (Forward Air Controller : un contrôleur tactique avancé présent à bord d’un aéronef). S’appuyant sur l’expertise et la crédibilité de ses personnels, le plot Harfang a effectué 7 000 heures de vol jusqu’au mois de juillet 2016.
À l’été 2016, le MQ-9 Reaper lui succède à Niamey. L’Armée de l’Air franchit le pas de l’armement des drones à la mi-décembre 2019. Capable d’engager des cibles d’opportunité comme des objectifs préparés, il est un complément de la Chasse. Acteur incontournable de l’action aérienne, les équipages Reaper font à leur tour bouger les lignes doctrinales, en assumant au besoin le commandement tactique des moyens engagés.
Le renseignement
L’AA est présente aussi bien en matière de renseignement d’origine image, électronique voire humaine (à l’instar du CPA20 qui effectue les patrouilles en périphérie de l’Aerial Point of Debarkation ou APOD de Bamako). Aussi bien pour comprendre la situation que pour obtenir du renseignement à fins d’action, les moyens aériens s’avèrent indispensables. Les drones sont évidemment des pépites en la matière. Leurs capteurs, leur discrétion et leur endurance les rendent particulièrement adaptés à l’ISR dans un environnement aussi permissif. De façon similaire, les Avions légers de surveillance et de reconnaissance (ALSR (7)) se sont avérés singulièrement intéressants, grâce en particulier à la présence d’opérateurs embarqués. L’AAE met en œuvre en fin de campagne ses propres aéronefs.
En complément de ces vecteurs, l’AA déploie de façon régulière le C-160G Gabriel (8). Utilisé initialement pour caractériser le théâtre avec ses capteurs champ large, il a aussi été utilisé dans la recherche de renseignement à fins d’action, avec un réel succès. Le Rafale, quant à lui, a périodiquement été déployé avec la nacelle Reco NG.
En marge de ces vecteurs spécialisés, l’AAE fait aussi preuve d’imagination dans la recherche du renseignement. Les équipages des appareils de transport tactique qui sillonnent le théâtre d’opérations sont ainsi dotés de capteurs performants pour pourvoir, en opportunité, photographier des sites, des regroupements ou des mouvements d’intérêts. Cette initiative a permis, à moindres frais, d’obtenir des résultats très intéressants.
Un C2 Air innovant et performant, né de l’exigence opérationnelle
Dès l’automne 2012, tant à Lyon – avec sa structure C2 (Commandement et contrôle) permanente JFAC (Joint Force Air Component) – qu’à Paris – avec l’État-major opérationnel (EMO) – le Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA) prend part aux travaux d’anticipation déjà évoqués. À la fin de cette même année, l’AA crée au Tchad une structure destinée à coordonner l’activité à venir des moyens de transport aérien, avant que le Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) n’autorise la mise en place d’une structure C2 Air ad hoc dénommée JFAC AFCO (Afrique centrale et de l’Ouest) placée sous l’autorité du Comanfor Épervier (un colonel Air). Dès lors, JFAC permanent et JFAC AFCO vont travailler de concert, sous l’autorité du CPCO jusqu’à la prise en charge de l’opération par le Poste de commandement interarmées de théâtre (PCIAT) courant février.
Au cours de cette période initiale, ce C2 Air planifie et conduit l’activité de transport inter- et intra-théâtre des avions patrimoniaux, affrétés ou encore d’armées partenaires. Plus de 70 appareils sont ainsi placés sous la responsabilité de l’AA. Le C2 Air conçoit également l’action des chasseurs déployés sur le théâtre, d’abord au Tchad puis à Bamako, mais aussi la mission de près de 10 heures ou encore les opérations aéroportées déjà évoquées.
Jusqu’au printemps 2014, la structure de commandement de l’AA repose donc sur deux emprises, une tchadienne et une lyonnaise. Celle-ci est installée dans les locaux enterrés du Centre national des opérations aériennes (CNOA) d’où est également commandée la Posture permanente de sûreté Air (PPSA). Elle y sera rejointe à compter de 2014 par les moyens du Tchad. L’ensemble est ensuite regroupé en 2017 dans des locaux dédiés avant de rejoindre en janvier 2022 les moyens de commandement dédiés aux zones Europe et Monde pour former le Centre air de planification et de conduite des opérations (CAPCO).
Le C2 de l’AA permet au général placé à sa tête d’assumer des responsabilités opératives en matière de gestion de l’espace aérien au-dessus de la zone des combats, mais également en termes de défense aérienne. Dans le premier cas, le JFAC a la responsabilité de la circulation aérienne au Nord Mali et doit coordonner les vols des appareils français, mais aussi alliés – y compris américains – ou encore de la Minusma. L’AA a aussi la responsabilité d’optimiser l’emploi de l’espace aérien au-dessus de la zone des combats. Elle permet une cohabitation efficace entre l’activité de l’artillerie et celle des appareils militaires et civils. Concernant la défense aérienne, le Dispositif particulier de sûreté aérienne (DPSA) mis en place au-dessus de Bamako lors de l’élection de septembre 2013 en coopération avec les forces maliennes est coordonné par le conseiller air du Comanfor.
Au-delà de l’infrastructure et des systèmes d’information et de communication essentiels au fonctionnement d’un C2, les aviateurs ont acquis un savoir-faire en termes de planification – enrichi par un historique lié à la permanence de la structure de commandement – qui leur a permis de proposer au Comanfor des opérations en appui des forces terrestres pertinentes, mais aussi des opérations efficaces pour lesquelles l’AA était menante.
Une Armée de l’Air également présente au sol
On ne peut conclure ce survol de l’action de l’Armée de l’Air et de l’Espace en BSS sans évoquer son action au sol, parfois ignorée.
L’AAE assure l’emploi (contrôleurs aériens, responsables du transit aérien) et la protection (commandos de l’air) de plateformes essentielles à l’action de l’ensemble des forces françaises, les bases aériennes projetées. Ainsi, elle est en charge de la gestion mais aussi de la protection de l’APOD situé sur l’aéroport de Bamako pendant toute la durée de l’opération Serval. Le chef du détachement Air assure alors les fonctions de chef de site – Comsite – et les personnels du CPA20 assurent la protection au large de la plateforme au cours de Patrouilles extérieures (Patex). Les CPA sont également déployés sur les sites éloignés comme Tessalit et patrouillent dans le Nord du Mali, ou s’assurent en permanence sur les sites isolés que les conditions sont réunies pour permettre l’atterrissage des avions de transport.
Les aviateurs sont aussi présents dans les structures de commandement des forces spéciales ou conventionnelles, déployés sur le terrain aux côtés de leurs camarades, pour un emploi optimal de l’arme aérienne.
Enfin, ils sont également fortement impliqués dans le partenariat militaire opérationnel, et forment par exemple des soldats maliens aux rudiments du guidage avancé des chasseurs, ou encore au fonctionnement d’une structure C2.
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Les neuf années couvertes par les opérations Serval et Barkhane ont indéniablement contribué à développer la performance opérationnelle de l’Armée de l’Air et de l’Espace. Ses matériels et ses personnels ont connu, comme leurs camarades déployés en BSS, des conditions d’emploi extrêmes auxquelles elle a parfaitement su faire face. À des matériels anciens ont succédé des matériels plus récents qui ont fait leurs preuves, et les doctrines se sont adaptées.
Le développement le plus spectaculaire concerne sans doute la capacité de l’AAE à planifier, programmer et conduire depuis la métropole les opérations dans lesquelles elle est engagée. Elle contribue largement à la dimension opérative des opérations. Il convient de garder à l’esprit qu’aux opérations en BSS se sont juxtaposées celles au Levant, en République centrafricaine (RCA), en Europe au-dessus des pays baltes ou encore sur le territoire national lors de la crise de la Covid-19. Sans oublier les activités de signalement stratégique et de diplomatie aérienne, telles que Pégase ou Heifara-Wakea (9). ♦
(1) Dépôts de munitions et logistiques.
(2) 10 000 t sont transportées en 3 semaines, soit l’équivalent de ce qui a été retiré d’Afghanistan en un an.
(3) 53 % du fret sont transportés par nos partenaires.
(4) Dont 47 % sont fournis par nos alliés.
(5) S’assurer qu’il n’y a ni population civile à proximité et ni menaces.
(6) Comme précisé précédemment, la décision avait été prise au début du mois de janvier 2012.
(7) NDLR : Des bi-turbopropulseurs Beechcraft King Air 350 spécialement modifiés.
(8) NDLR : Les 2 avions de transport spécialement modifiés pour la guerre électronique et le renseignement ont été retirés du service en 2022.
(9) NDLR : Pégase 2022 est le déploiement de moyens aériens (combat, ravitailleur et transport) français en moins de 72 heures vers la Nouvelle-Calédonie puis dans les jours suivants le retour en passant par l’Australie, l’Indonésie, Singapour et les Émirats arabes unis. Heifara-Wakea a eu lieu un an plus tôt sur le même principe, mais vers la Polynésie française puis vers Hawaï.