Union française - Le voyage de M. Guy Mollet à Alger - Désignation de M. Robert Lacoste comme ministre-résident - Les projets gouvernementaux - Ouverture de nouvelles négociations franco-tunisiennes - Les difficultés des négociations franco-marocaines - La situation en Indochine
Afrique du Nord
Algérie
Les voyages de M. Guy Mollet, chef du gouvernement, et de ses ministres, les déclarations officielles, les projets gouvernementaux et les violentes réactions de la partie européenne de la population ont fait régner en Algérie une intense activité politique au cours du mois de février. Les milieux politiques musulmans ont de leur côté observé une attitude de réserve, soutenant que les interlocuteurs valables devaient désormais être recherchés parmi les chefs de la rébellion ; ceux-ci ont cherché à consolider leur position en multipliant dans tous les secteurs, attaques, embuscades et assassinats.
La manifestation de sympathie qui avait entouré M. Soustelle à son départ, et qui, dépassant sa personne, avait pris catégoriquement parti contre la nomination du général Catroux, laissait présager de violentes réactions à l’arrivée de M. Guy Mollet et du ministre-résidant. M. Guy Mollet était accueilli à Alger le 6 février 1956 dans une atmosphère d’émeute qui ne s’apaisa qu’avec l’annonce, le 8, de la démission du général Catroux. M. Robert Lacoste lui succédait deux jours après.
Dans une allocution prononcée à Alger le 9 février 1956, M. Guy Mollet, tout en affirmant que des réformes politiques reconnaîtraient « la personnalité algérienne », affirmait avec force : « La France se battra pour rester en Algérie ». M. Robert Lacoste a fait sur place un premier examen de la situation, avant de rendre compte au Conseil des ministres le 24 février 1956, tandis que M. Max Lejeune, secrétaire d’État aux Forces armées, effectuait une longue et minutieuse tournée d’inspection dans les zones d’opération. Après avoir entendu leur rapport, le gouvernement est arrivé aux conclusions suivantes : nécessité d’une reconversion des moyens militaires mis en place, en vue d’une meilleure utilisation et peut-être renforcement des effectifs, appel au retour de l’ordre conditionnant des élections libres, mise en application d’un plan considérable de développement social et économique. M. Guy Mollet a lancé le 29 février 1956 un appel radiodiffusé, dans lequel il disait notamment : « Il faut que les armes se taisent… (sinon) la France serait contrainte de mobiliser toutes ses ressources, pour assurer par tous les moyens la sécurité des populations ». Le même jour, le Gouvernement déposait à la Chambre le projet de loi, accordant les pouvoirs spéciaux qui lui permettront d’agir en Algérie, et nommait le général Ely chef d’état-major des forces armées en remplacement du général Guillaume.
Les rebelles ont développé au cours du mois leurs attaques contre les forces de l’ordre ; les désertions qui se sont produites dans les rangs des soldats musulmans ont fait apparaître un nouvel élément inquiétant. L’insécurité s’est étendue dans les secteurs du Constantinois et de l’Est-Oranais, et l’assassinat le 16 de trois Européens à 37 kilomètres d’Alger, et de sept Européens le 24 à 57 km de cette même ville, a provoqué une très vive émotion parmi la population européenne.
Tunisie
À la suite d’un voyage à Paris de M. Bourguiba, qui venait demander au gouvernement français d’accorder à la Tunisie une armée et une diplomatie nationale, Sa Majesté le Bey a habilité le chef du gouvernement tunisien à ouvrir de nouvelles négociations avec le gouvernement français. Les conversations se sont engagées à Paris le 28 février 1956 : menées dans le cadre des conventions franco-tunisiennes, elles marqueront une nouvelle étape de la marche de la Tunisie vers son indépendance, tout en laissant subsister les liens d’interdépendance qui ont été définis.
M. Salah ben Youssef se trouve en Libye, où il a été reçu en qualité de « réfugié politique ». Ses partisans continuent en Tunisie à se livrer à des actes de terrorisme et d’anciens chefs fellaga ont repris le maquis. La constitution d’une armée nationale, permettra sans doute au Gouvernement tunisien de lutter avec efficacité contre cette résurgence du terrorisme.
Maroc
Un protocole déterminant les pouvoirs respectifs de la Résidence générale et du Gouvernement marocain a été signé le 7 à Rabat, entre MM. Dubois et Si Bekkaï : la France conserve provisoirement les prérogatives qu’elle détenait, en vertu du traité de Fez.
Le Sultan ben Youssef est arrivé à Paris le 14, accompagné du chef du gouvernement marocain et de cinq ministres. Les négociations franco-marocaines se sont ouvert le 15 ; elles se sont heurtées à de profondes divergences de vues sur l’objet même des discussions, les délégués marocains prétendant partir de la notion d’indépendance, alors que le Gouvernement français estimait impossible d’abroger le traité de Fez sans un vote du Parlement. Après deux semaines de pourparlers, il semble que les deux délégations soient tombées d’accord sur le principe d’une déclaration préliminaire, qui reconnaîtra que le traité de Fez est dépassé et qui permettra aux négociations de s’engager sur l’indépendance et l’interdépendance.
Indochine
Vietnam
Les troupes gouvernementales ont occupé le Saint-Siège caodaïste ; le pape Pham Cong Tac a disparu. On annonce le ralliement probable du général Tran Van Soi, commandant en chef des Hou-Hao.
Le gouvernement vietnamien a fait savoir au gouvernement français, qu’il désirait l’application des Accords de Genève, en ce qui concerne le retrait du corps expéditionnaire français.
De son côté le chef du gouvernement du Nord-Vietnam, M. Pham Van Dong, a réclamé la réunion d’une nouvelle conférence sur l’Indochine.
Laos
La crise gouvernementale n’a pas pu encore être résolue malgré les tentatives de deux personnalités chargées de former le gouvernement.
Cambodge
À la suite d’un vote unanime de l’Assemblée nationale khmère, le prince Norodom Sihanouk a repris la tête du gouvernement cambodgien. ♦