La trajectoire de l’Europe de la défense depuis le Sommet de SaintMalo en 1998 est contrastée. Bien des facteurs ont contribué à l’infléchir et l’heure est au doute. Le relatif désengagement européen et les multiples initiatives bilatérales observées récemment pourraient créer un climat favorable à une approche plus pragmatique que l’institutionnelle en vigueur.
L’Europe de la défense… en « hibernation » ?
European defence—in hibernation?
Europe’s road to common defence since the St Malo Summit of 1998 has seen great contrasts. Many factors have contributed to its ups and downs and today everything is in doubt. The reducing European commitment to the project and the multiple bilateral initiatives we have seen recently could create a favourable climate for a more pragmatic approach than the institutionalised, official one.
« Des Américains qui se désengagent, des États européens militairement de plus en plus faibles, une Union européenne à l’avenir mal défini mettent en évidence la nécessité de redéfinir les bases d’une défense européenne apte à relever les défis imposés par le nouveau contexte sécuritaire mondial » (1). Cette phrase nous semble synthétiser de façon lapidaire la situation actuelle. Les Européens se trouvent désormais à la croisée des chemins. Soit, ils renoncent au projet d’une véritable Europe de la défense et continuent à se réfugier sous le parapluie de l’Otan, avec l’espoir d’y constituer un hypothétique « pilier européen » avec le risque fort important d’être définitivement marginalisés. Soit, ils continuent de manière autonome à développer leurs moyens propres, civils et militaires, mais avec une politique étrangère clairement définie. La coopération avec l’Otan se poursuivrait, mais c’est avec les États-Unis que devrait être conclu un partenariat stratégique global.
Cette deuxième option permettrait à l’Union européenne de s’affirmer progressivement sur le plan de la défense comme acteur influent du concert international. Elle nécessiterait, outre l’affirmation d’une ambition commune qui semble actuellement faire cruellement défaut, la mise en œuvre de synergies plus vigoureuses, une mutualisation des moyens ainsi que le renforcement des coopérations militaires.
Après avoir exposé les principales étapes de la montée en puissance de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD), nous verrons que les divergences ont rapidement pris le pas sur les visions communes et affirmerons l’impérieuse nécessité pour les États membres de mutualiser leurs capacités dans un contexte budgétaire particulièrement contraint. Le développement en cours de certaines coopérations et les nouvelles orientations stratégiques américaines paraissent de nature à offrir des occasions favorables à l’émergence progressive de l’Europe comme un « acteur global » sur le plan de la défense.
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