C’est en prenant la mesure de la crise économique et des abstentions récentes des pays européens en matière de sécurité et de défense et en relevant que les institutions de l’Union peuvent être, soit mieux utilisées, soit complétées, que les auteurs appellent à un nouvel effort d’intégration militaire des Européens.
Conflit libyen et crise de l’euro : conséquences sur l’Europe de la défense
The Libyan conflict and the euro-crisis: the consequences to European defence
Through examination of both the economic crisis and recent reluctance of European countries to commit themselves in security and defence matters, together with a close look at how European institutions might be better used, the authors call for renewed European effort towards military integration.
L’épisode libyen ne fut pas favorable à une bonne visibilité de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC), quand bien même l’intervention franco-britannique soutenue par les Américains mit en lumière des capacités intra-européennes sous forme coopérative, dans le champ très contrôlé de la « coalition des volontaires ». Face aux enjeux diplomatiques et géopolitiques, devant les tergiversations et l’argumentaire prudentissime allemand (le ministre des Affaires étrangères avait mis en avant la puissance de feu de Kadhafi et ses moyens aériens considérables), argument non crédible au vu de la connaissance que nous pouvons avoir des capacités réelles des forces libyennes, le processus de visibilité de la PSDC déjà grippé, est assez vite mort-né. Cette PSDC subit plusieurs gifles.
D’un côté, la musculation franco-britannique associée à des objectifs clairs et des agendas nationaux spécifiques. De l’autre, les Allemands, sur-prudents, entre le verrou constitutionnel, refus de donner une impression de nouvelle croisade, opinion publique défavorable à un engagement « pacifiste » du ministre des Affaires étrangères libéral, Guido Westerwelle, et élections dans certains Länder. Et entre les deux, le panachage des petits pays, dont certains ne s’engagèrent que dans la configuration otanienne pour des raisons procédurales et normatives (Belgique, Portugal, Danemark...) (1). Quant à la thématique du contrôle de l’embargo et celle de la « récupération de ressortissants », elles ne furent pas satisfaisantes, en totalité ou en partie, du point de vue des institutions européennes.
La réduction des ambitions stratégiques de l’Union européenne fut corroborée par la déclaration que Catherine Ashton aurait faite le 22 novembre 2011 devant le Comité militaire de l’UE, à savoir que « la principale utilité de la force militaire consiste dans des opérations militaires humanitaires, comme l’a été la présence d’un navire-hôpital à Haïti ». Le principe de réalité des capitales qui comptent est réaffirmé. Pour le président Sarkozy, « Ce n’est pas la Haute Représentante qui a la main opérationnelle sur les forces armées, ce sont les États-membres. Puisqu’il n’y a pas d’armée européenne, ce n’est pas la Haute Représentante qui peut gérer l’intervention des armées, des forces européennes de la coalition ». Et de poursuivre : « M. Van Rompuy s’occupe de tout le volet politique pour s’assurer de l’unité. La Haute Représentante s’occupe de tout le volet humanitaire. Et un certain nombre d’États-membres – notamment la Grande-Bretagne et la France – mettent à la disposition leurs forces armées » (2).
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