Dans un plaidoyer sans concession pour une responsabilité de défense pleinement assurée par l’Europe, l’auteur propose trois avancées décisives : un commandement militaire européen, une armée européenne et un siège européen unique au Conseil de sécurité et estime qu’il y a urgence à les mettre en place.
L’Europe de la défense… Et après ?
European defence... Then what?
The author pleads without concession for fully European defence arrangements, and proposes three decisive moves: a European military command, European forces and a single seat for Europe on the UN Security Council. These should be set in place urgently, he argues.
Au moment où j’écris, celui qui assumera la charge de l’État pour cinq ans n’est pas encore connu. Quel qu’il soit, et par nécessité, il donnera la priorité à l’économie, à la finance, à l’emploi. Il devra cependant se consacrer aussi aux relations extérieures et à la défense ; questions qu’il a, comme ses concurrents malheureux, pratiquement passées sous silence pendant sa campagne. Ces domaines régaliens de l’État s’imposeront à lui dès le 20 mai 2012, ouverture du Sommet de l’Otan à Chicago. De quoi va-t-on parler à Chicago ? De l’Afghanistan et du bouclier antimissile de l’Otan en particulier. On n’évoquera pas explicitement la défense européenne. On constatera cependant sans le dire, pour s’en réjouir ou le regretter, que le retour de la France dans l’Otan ne s’est traduit par aucune relance de la défense européenne, mais par son « hibernation », comme le chef d’état-major des armées vient de le reconnaître. Je veux ici évoquer cette question de la défense européenne que je tiens pour une composante majeure de la construction politique de l’Europe.
De quoi parle-t-on ?
L’Europe de la défense, objet de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC), n’a rien à voir avec la défense de l’Europe, de ses populations, de ses intérêts vitaux. La première s’est développée depuis 1999, cahin-caha, sous la forme de structures politico-militaires calquées en modèle très réduit sur celles de l’Otan, de missions « exotiques » limitées, pour l’essentiel, à la participation aux opérations de maintien de la paix, d’un corps d’armée « fantomatique » de 60 000 hommes avec son environnement naval et aérien, qui n’a jamais été engagé en tant que tel et ne représente que 5 % du total des forces des vingt-sept pays de l’UE. La seconde, appelée aussi défense collective de l’Europe, est la prérogative exclusive de l’Otan, comme pendant toute la guerre froide. Tous les grands traités européens, de Maastricht à Lisbonne, en passant par Amsterdam et Nice, évoquent bien la possibilité d’une évolution de la PSDC vers une défense commune, alternative à l’Otan « si les gouvernements en décidaient ainsi ». On ne saurait être plus prudent !
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