Après les opérations du Koweït en 1990, la RMA a mobilisé l’appareil de défense américain. Les mutations technologiques apparues alors ont été au cœur du débat stratégique tant chez les alliés et partenaires que parmi les adversaires supposés des États-Unis.
Que reste-t-il du discours de la Révolution dans les affaires militaires ?
What is left of the revolution in military affairs?
In the wake of the Kuwait operations, the revolution in military affairs touched every aspect of the American defence structure throughout the nineteen-nineties. The technological changes that appeared were at the heart of debate among allies and partners, as well as among the supposed adversaries of the United States. The ability of American strategy to create a noise and cause debate attracts both support and rejection.
La RMA est un débat aux origines complexes et aux contours imprécis (1). Elle bénéficia sans doute de la confusion – entretenue à dessein ? – qui put exister entre le concept (champ doctrinal) et l’objet d’étude historiographique qu’est la notion de révolution militaire (2). Au final, l’analyste se voit confronté à un concept mal stabilisé, évolutif au point d’en être volatile, voire « fourre-tout » (3).
Dans un article paru dans la revue Politique étrangère, Bruno Tertrais, en s’employant à décrypter les logiques sous-jacentes de la RMA, posait une interrogation pertinente : fallait-il « croire » à la révolution dans les affaires militaires ? Car, à bien y regarder, et bien que l’on ne puisse contester le fait qu’elle se fonda sur un certain nombre de ruptures ou d’avancées technologiques, elles-mêmes à la source de nouveaux concepts d’emploi des forces, il convient également d’admettre que le « discours » de la RMA fut tout autant, sinon davantage, une question de croyance, d’adhésion que le constat d’une évolution du champ militaire. C’est là, au demeurant, une approche caractéristique d’une culture scientifique et stratégique américaine dont on sait l’importance qu’elle accorde à l’innovation et à la technologie.
Cette foi excessive dans la technique, comme put le souligner Joseph Henrotin, favorisa une « technologisation » du discours stratégique sur trois plans : au niveau de l’appréhension des questions stratégiques par une focalisation sur les options de nature technique ; dans la pratique stratégique par un déterminisme technologique tel que les résultats et les effets d’une opération militaire sont perçus comme dépendant de la technologie ; au plan politique par une confiance démesurée accordée aux capacités opérationnelles (4).
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