Crise du service militaire : les chemins de l'Algérie
Je n’entends point participer ici aux discussions idéologiques et politiques du moment, mais plutôt replacer les choses dans une meilleure perspective, fût-ce au prix d’une simplification excessive. Si j’ai manqué, chemin faisant, à l’objectivité, je demande qu’on m’en excuse en songeant que je vis, avec tous mes contemporains, les incertitudes de la conjoncture actuelle.
Tibor Mende (Exergue à « Regards sur l’Histoire de demain », 1954.)
Le retour des premiers contingents de « libérés » d’Afrique du Nord est un événement qui intéresse, au premier chef, le sociologue et le citoyen. Une page est définitivement tournée, qui marque peut-être la fin de l’après-guerre et annonce, à coup sûr, l’avènement de nouvelles « couches » démographiques et politiques : à travers l’Algérie et le transfert du gros du contingent en Afrique du Nord, c’est à la fois l’avenir de l’Union Française et la refonte d’un code de valeurs liées à l’obligation militaire qui se trouvent simultanément posés dans les faits et devant l’opinion. Il vaut qu’on s’arrête sur ces aspects et ces conséquences multiples du « fait algérien ».
L’Algérie a été projetée, d’une année sur l’autre, de l’arrière-plan des habitudes nationales, où elle végétait, à la croisée des options historiques. Toute une tradition trop confortable sur laquelle nous vivions, a subi son ébranlement et chacun veut bien admettre qu’elle nous oblige à prendre la mesure d’une crise de structure de la Nation française qui dépasse la crise même, quasi endémique, de son régime. On n’insistera donc jamais assez sur la primauté politique de l’enjeu, quels que soient, par ailleurs, les solutions techniques susceptibles d’être, un jour, définitivement arrêtées.
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