L’École et la formation morale et civique en France
Sur l’École, comme sur l’Armée, et plus encore que sur l’Armée puisque tout le monde passe par l’École tandis que quelques-uns ne font pas l’expérience de l’Armée, tout Français adulte a ses idées, voire ses griefs ou ses projets de réforme. Le Français moyen sentirait la difficulté de disserter sur le fonctionnement de grands corps comme la Magistrature ou les Ponts et Chaussées, qui lui sont assez étrangers ; mais n’a-t-il pas une connaissance personnelle et des souvenirs, vivants comme les souvenirs de jeunesse bien ressassés, de la vie scolaire, des professeurs, des programmes et des examens ? Et pourquoi, père de famille et citoyen, n’aurait-il pas son idée de ce que l’École devrait être, de ce qu’elle devrait faire, de ses méthodes de formation de la personne, de son rôle dans la nation ?
Je dirai tout de suite que je ne trouve à cela aucun inconvénient. Sans doute, je ne suis pas sûr que les grands débats périodiques autour de l’École — de ses structures, de l’éducation civique, du surmenage, du tronc commun… ou des vacances — apportent toujours beaucoup de lumière à ceux qui ont le souci quotidien de la faire fonctionner et de l’améliorer. Pour ma part, ayant grandi auprès d’un père qui était le modèle exemplaire du professeur entièrement dévoué à sa tâche, ayant donné ma vie à l’enseignement et étant parvenu à la trente-cinquième année de service tant dans le secondaire que dans le supérieur, voyant s’épanouir chez mes enfants de nouvelles vocations d’enseignants, on voudra bien supposer que j’ai souvent eu l’occasion de réfléchir à ces problèmes. On admettra que je n’aie pas toutes les sévérités faciles des juges du dehors pour ce grand corps de l’Université, où j’ai vu, à tous les degrés et en nombre, les plus beaux exemples de désintéressement, d’honnêteté inflexible, de dévouement, de passion pour les causes élevées… On ne s’étonnera pas, j’espère, si, convenant du bien-fondé de certaines critiques, je rappelle que les problèmes humains ne comportent pas toujours de solutions évidentes et décisives, mais présentent toujours une diversité d’aspects qui ne permet que des ajustements plus ou moins insuffisants.
La question que je me propose d’examiner est celle de la place et du rôle de l’École dans l’Éducation nationale, morale et civique.
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