Pour être sérieuse, l’étude des problèmes posés par la réalisation d’une force atomique française doit pouvoir se fonder sur une juste appréciation de toutes les données : à la fois stratégiques, financières et politiques. C’est seulement depuis quelques années que le public français commence à prendre connaissance des données stratégiques. On peut les résumer comme suit :

L’existence des armes nucléaires a créé dans le monde du point de vue de la puissance militaire et de l’autorité politique qui en découle deux catégories de pays : ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent pas l’arme atomique. Il est en effet indéniable que ceux qui possèdent des armes nucléaires disposent dans les relations internationales d’une autorité et d’un poids dont ne disposent pas les autres.

Cette relation entre la possession nationale de l’armement nucléaire et « l’autorité politique » est évidente dans le cas de l’U.R.S.S. ou des États-Unis. Elle est moins évidente dans le cas de la Grande-Bretagne. Cette relation fut néanmoins invoquée tout récemment encore au Congrès Conservateur par M. MacMillan pour justifier les efforts financiers, industriels et scientifiques qu’implique l’armement nucléaire de la Grande-Bretagne. Et l’on peut admettre en effet que la production et la possession en propre d’armes nucléaires contribuent, avec d’autres éléments, à fixer le « poids international » de la Grande-Bretagne.