Multiple et ambitieuse Indonésie (I) Inventaire humain et économique
« Perle des colonies tropicales » jusqu’en 1942, l’Insulinde est devenue, après une série de luttes pour l’indépendance extrêmement confuses, un état de 84 millions d’habitants, l’Indonésie. Ainsi placée, par sa population, au 6e rang mondial (après la Chine, l’Inde, l’URSS, les États-Unis et le Japon), l’Indonésie justifie-t-elle la réputation nouvelle qu’elle s’est acquise en abritant la capitale de l’anticolonialisme, Bandoung ? Telle est la question qui se pose après la révolte de Sumatra qui vient de clore l’année 1956 comme l’a reconnu le Président Ahmed Soukarno par une page noire aux conséquences encore mal circonscrites.
L’Indonésie n’a pour l’unité qu’un penchant limité ainsi que l’exprimait en 1884 l’inventeur de ce nom géographique, l’Allemand Adolf Bastian, qui le définissait ainsi : « Ensemble d’îles situées dans la partie sud-ouest de l’océan Pacifique et habitées par des populations apparentées, différant, du point de vue de leurs caractères physiologiques, des races mélanésienne, micronésienne et polynésienne ». La distance et la surface font en effet de ce pays un véritable subcontinent insulaire dont la dorsale — l’arc malais — se développerait sur une carte européenne de Lisbonne à la Caspienne. La surface émergée de l’archipel indonésien est cinq fois plus grande que celle des îles britanniques. En outre des volcans, des fleuves mal ordonnés et marécageux, toutes les formes de relief, font des 3 000 îles de ce subcontinent maritime autant de cantons isolés par la nature plus qu’unis par la mer commune, le climat équatorial et ses moussons.
Même Java, plus longue que la France, mais moins large que la Suisse, championne du grouillement humain avec 55 millions d’habitants, un accroissement annuel de 900 000 personnes, une densité de 416 au km2 (comme Hondo), des districts ruraux dépassant celui de la Ruhr, des villes surpeuplées (Djakarta 2 800 000 habitants, Sourabaja, Sourakarta, Bandoung, Semarang et Djokdjakarta toutes plus populeuses que Lyon), n’est pas sans diversités. À côté du peuplement proprement javanais (62 %), on compte 27 % de Soundanais en Pasoundan à l’Ouest, 11 % de Madourais dans l’île satellite de Java qu’est Madoura et des Tenggenès aborigènes dans les montagnes de l’Est.
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