Interview du secrétaire général de l'Otan.
« Nous devons passer de l'alliance à la communauté atlantique »
Le 28 septembre 1948, de la tribune des Nations Unies, M. Paul-Henri Spaak, alors premier ministre et ministre des Affaires étrangères de Belgique, lançait à M. Vichinsky, délégué de l’Union Soviétique : « Savez-vous quelle est la base de notre politique ? C’est la peur. La peur de vous, la peur de votre gouvernement, la peur de votre politique. Et si j’ose employer ces mots, c’est parce que la peur que j’évoque n’est pas la peur d’un lâche, n’est pas la peur d’un ministre qui représente un pays qui tremble, un pays qui est prêt à demander pitié ou à demander merci. Non, c’est la peur que peut avoir, c’est la peur que doit avoir un homme quand il regarde vers l’avenir, et qui considère tout ce qu’il y a peut-être d’horreur et de tragédie, et de terribles responsabilités dans cet avenir. » Quelques mois avant, le « coup de Prague » avait consacré l’effondrement des illusions nées de l’alliance russo-américaine. Quelques mois après le Pacte Atlantique concrétisait, outre un renversement des alliances, la volonté de l’Occident de dominer sa peur et d’édifier un barrage contre l’impérialisme soviétique.
M. Spaak est aujourd’hui secrétaire général de l’O.T.A.N. où il s’efforce d’étendre hors du domaine strictement militaire les préoccupations, les tâches, les objectifs de l’alliance atlantique, pour faire de celle-ci l’expression non seulement d’un réflexe collectif de défense, mais des réalités historiques, géographiques et politiques de ce « monde atlantique » dont l’affirmation représente un des grands faits géopolitiques du XXe siècle.
Outre les responsabilités qu’il assume en sa qualité de secrétaire général de l’OTAN — expression institutionnelle de la solidarité occidentale — la position qu’il avait prise en 1948, la caution qu’il donne aujourd’hui aux propositions de MM. Pearson, Lange et Martino, le qualifiaient particulièrement pour esquisser, à l’intention des lecteurs de la « Revue de Défense Nationale », quelques-uns des problèmes en fonction desquels se présente l’avenir de l’alliance atlantique.
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