Outre-mer - La politique de coopération avec les pays en voie de développement - Visite du Président de la République du Congo - Visite du Chef de gouvernement du Dahomey
La politique de coopération avec les pays en voie de développement
La politique de coopération avec les pays en voie de développement a fait l’objet à l’Assemblée nationale, le mercredi 10 juin 1964, d’un important débat qui a occupé deux séances.
La discussion a trouvé son point de départ dans plusieurs « questions orales avec débat ». Il a été marqué par des discours de M. Raymond Triboulet, ministre délégué chargé de la Coopération, de M. Michel Habib-Deloncle, secrétaire d’État aux Affaires étrangères et, surtout, de M. Georges Pompidou, Premier ministre.
Cette question fait l’objet de controverses multiples. Au cours de l’année 1963 une Commission a étudié les divers éléments d’une politique de coopération avec les pays en voie de développement, appartenant ou non à la zone franc, ainsi que l’organisation administrative et financière nécessaire à la mise en œuvre de cette politique. Cette Commission, présidée par M. Jean-Marcel Jeanneney, a déposé un rapport, qui a été rendu public et a fourni un nouvel argument aux discussions : celles-ci ne sont pas restées le fait des seuls spécialistes, mais ont trouvé un large écho au sein de l’opinion publique.
Le Premier ministre a développé longuement les principaux mobiles de la politique française.
La coopération, conséquence de l’expansion européenne du XIXe siècle, a des raisons politiques, morales et humaines, historiques, économiques et culturelles. « Plus que la coupure dont on parle si fréquemment entre le monde communiste et le monde libre et qui est en train de se modifier, a déclaré le Premier ministre, la coupure entre les pays riches et les pays pauvres, entre les pays industriels et les pays où le développement industriel n’a pas eu lieu, devient le fait majeur du XXe siècle ». Et il a ajouté : « Il y a une partie du monde où les hommes meurent en moyenne à 70 ans et une autre partie où ils meurent en moyenne à 30 ans. Dans l’Inde, on peut prévoir que, dans les dix années qui viennent, 50 millions d’enfants mourront de misère et de faim ».
Au titre de la coopération technique, environ 46 000 fonctionnaires ou experts français, dont plus de 70 % sont des enseignants, œuvrent dans le monde : « Nous scolarisons en français près de 3 000 000 d’enfants en Afrique du Nord, 2 500 000 en Afrique noire, 2 500 000 dans l’enseignement privé un peu partout dans cent pays du monde. Enfin, 250 000 enfants étudient dans des établissements secondaires ou supérieurs français installés dans différents pays du monde ». Il s’agit des pays où l’enseignement national n’est pas donné en français.
Le Premier ministre se prononce en faveur de l’aide bilatérale. Si, intellectuellement, l’aide multilatérale a des avantages considérables, elle est forcément plus rigide, plus abstraite, plus technocratique et plus ambitieuse que la forme bilatérale. Telle qu’elle est maniée dans les grandes organisations internationales, elle aboutit à renforcer la langue anglaise.
La meilleure façon de « multilatéraliser » l’aide serait un accord international sur les matières premières dont la revalorisation est fondamentale pour l’aide aux pays sous-développés.
L’aide européenne présente un intérêt particulier, car elle repose sur une base solide et se fait de façon pratique, efficace et profitable à tous. « Nous y trouvons le grand intérêt de lier l’Europe et l’Afrique. Tout ce qui concerne l’Europe intéresse la France et tout ce qui concerne la France intéresse l’Europe ».
À propos des structures, « un peu d’incohérence apparente et de diversité est préférable à une espèce de fusion brutale et arbitraire ». Le choix entre deux formules – ministère des Affaires étrangères avec l’aide d’un certain nombre d’organismes ou création d’un grand ministère de la Coopération – sera dicté par la considération suivante : « Faut-il attacher une importance prépondérante à la liaison entre la coopération et la politique étrangère de la France ? La coopération est-elle vraiment liée à notre politique étrangère ? Fait-elle partie de l’action normale de nos ambassadeurs ? Au contraire, la technique particulière et les méthodes de la coopération sont-elles si spécifiques qu’il vaut mieux être coopérateur de métier ? En conséquence, le ministère de la Coopération doit-il répondre seul aux exigences de la Coopération ? C’est ce que nous pensons à l’égard de certains pays avec lesquels nos relations s’effectueraient sur des bases autres que celles d’affaires d’État à État, caractérisant le domaine propre des affaires étrangères ».
Et le Premier ministre a conclu notamment : « De la coopération dépendent, en grande partie, sans aucun doute, la prospérité, le rayonnement et l’avenir de la France. De la coopération à l’échelle européenne dépendent en grande partie la prospérité, le rayonnement et l’avenir de l’Europe ainsi que sa sécurité et de la coopération à l’échelle mondiale dépendent, à coup sûr, la paix du monde et la paix de nos consciences ».
Visite du président de la République du Congo
Le président de la République du Congo, M. Alphonse Massamba-Debat, a séjourné à Paris le samedi 27 juin 1964. Il a été reçu en audience par le président de la République. C’était la première visite du chef de l’État congolais en France depuis son accession au pouvoir en août 1963.
Rentré à Brazzaville, il a présidé le lundi 29 juin à l’ouverture du congrès constitutif du « Mouvement national révolutionnaire », le nouveau parti gouvernemental.
Visite du chef du Gouvernement du Dahomey
Le vice-président de la République du Dahomey [NDLR 2023 : futur Bénin], M. Justin Ahomadegbé-Tometin, Président du Conseil des ministres, a quitté le Dahomey le 18 juin pour un long périple qui doit le conduire successivement en France, en Allemagne, en Belgique, en Israël et en Suisse. À Paris, il a été l’hôte officiel du gouvernement.
Les aspects de la coopération entre la France et le Dahomey ont été examinés au cours de séances de travail qui se sont déroulées au ministère des Affaires étrangères les 22, 23, 24 et 25 juin.
Le mardi 23 juin, le Général de Gaulle a reçu en audience le Chef du gouvernement dahoméen. À l’issue de l’entretien, ce dernier a déclaré : « Ma conversation avec le Général de Gaulle a porté sur la situation politique, sociale, et surtout financière et économique de mon pays ». ♦