Introduction à l’histoire des relations internationales
L’histoire des relations internationales est essentiellement celle de la paix et de la guerre. Elle est le résultat de décisions prises par des hommes d’État, en fonction de facteurs multiples et divers. Étudier ces facteurs dans leur nature et leurs aspects, chercher à percevoir dans quelle mesure chacun d’eux agit dans l’élaboration de la décision, juger s’il est possible de déterminer une méthode pour prendre celle-ci en fonction de ceux-là, tel est l’objet de ce livre.
Il y a longtemps que les militaires ont étudié les « facteurs de la décision », sans être d’accord sur la façon dont il convenait de les envisager et de les étudier. À l’analyse de ces facteurs succède la synthèse, dont la conclusion doit être la décision cherchée. À cette méthode, plus ou moins modifiée dans ses procédures, les militaires sont habitués ; mais ils savent mieux que personne à quel point elle est précaire, tout en restant indispensable. Ils ne seront donc pas surpris de lire dans l’ouvrage de Pierre Renouvin et Jean-Baptiste Duroselle, combien ces auteurs estiment encore trop peu assurés les principes et les connaissances pour qu’une véritable méthode puisse être dégagée.
Pierre Renouvin s’est chargé de la première partie de cette étude. Elle traite des « forces profondes », c’est-à-dire de l’influence des facteurs géographiques, des conditions démographiques, des forces économiques et financières, des sentiments nationaux et de leur aspect extrême, le nationalisme, ainsi que des sentiments opposés groupés dans les théories pacifistes. Si tous ces facteurs jouent indiscutablement dans le comportement général ou momentané des peuples et des États, il est impossible de donner à chacun d’eux une sorte de représentation mathématique, qui en fixerait l’effet d’une façon indiscutable.
La seconde partie a été écrite par Jean-Baptiste Duroselle. Elle est plus nouvelle que la première, parce qu’elle porte sur des sujets que la science moderne s’efforce de renouveler. La question essentielle est la suivante : dans quelle mesure l’homme d’État est-il influencé par son environnement, et dans quelle mesure l’influence-t-il ? C’est une question vieille comme le monde, que les acquisitions des sciences humaines permettent d’étudier d’une façon plus précise. Cependant, en ce domaine encore, on est loin de pouvoir aboutir à des conclusions fermes ; on doit se contenter d’indiquer des directions, des possibilités, rarement des probabilités, sans pouvoir jamais arriver à poser des équations. Des exemples sont fournis, comme autant de « cas concrets » à partir desquels l’expérience peut s’enrichir et d’utiles réflexions peuvent être faites.
On pourrait croire qu’en fin de compte, les conclusions de ce livre sont assez décevantes, puisqu’elles n’aboutissent point à des règles. Au contraire, elles montrent bien la complexité des choses, et éveillent la méfiance vers les systèmes tout faits et les explications qui ne retiennent que le jeu de certains facteurs. Il faut donc les connaître tous, pour apprécier, dans chaque cas particulier, dans quelle mesure chacun d’eux a joué. La dernière phrase du livre contient son enseignement principal : « Dans l’étude des relations internationales, le seul moyen d’éviter les erreurs majeures, c’est, pour l’historien, de conserver une constante disponibilité de l’esprit ».
Une très abondante bibliographie complète cet ouvrage. ♦