Le statut des Forces de l’Otan et son application en France
Les modifications en cours dans l’organisation militaire des forces alliées conduisent à parler à nouveau de leur statut juridique, lorsqu’elles se trouvent normalement stationnées sur le territoire d’un État qui n’est pas celui auquel elles appartiennent.
L’ouvrage de Serge Lazareff, dont il faut tout de suite noter que, malgré l’austérité du titre, la lecture est fort attrayante, expose la diversité et la complexité des questions soulevées par la vie courante des unités et des personnes dans un milieu national qui n’est pas le leur. Le lecteur pouvait certes soupçonner que le problème n’était pas simple ; mais il ne se doutait probablement pas, avant d’avoir terminé ce livre, à quel point il était étendu.
Dans une première partie, relativement brève, l’auteur examine les solutions apportées antérieurement à la création de l’Otan ; dans une seconde partie, il étudie le texte de la Convention entre les États parties au Traité de l’Atlantique Nord, sur le statut de leurs forces, convention signée entre les pays alliés le 19 juin 1951, puis, avec de grands détails, l’application qui en a été faite, donc l’exécution de ses dispositions et de la jurisprudence qui s’est établie après plusieurs années de fonctionnement.
À l’origine, deux thèses se trouvaient en présence : celle « du drapeau », soutenue essentiellement par les États-Unis, et celle « de la souveraineté territoriale », à laquelle se ralliaient les États européens dans leur ensemble. La première soutenait que les lois de l’État d’origine devaient s’appliquer aux forces stationnées à l’étranger ; la seconde la solution inverse, sous réserve évidemment d’aménagements adéquats. De même, il convenait de déterminer si le statut devait être réglé par un accord multilatéral, applicable à toutes les forces dans tous les pays, ou au contraire faire l’objet d’accords bilatéraux entre le pays d’origine et le pays hôte. Une autre question était de savoir dans quelle langue devaient être rédigés les accords. On réunit donc au début de 1951 un Groupe de travail qui rédigea un projet de convention multilatérale, dont seuls les textes français et anglais faisaient foi.
Il est impossible d’énumérer ici tous les cas qui doivent être envisagés et réglés ; le statut s’applique aux militaires, mais doit-il s’appliquer aussi au personnel civil qui est employé par les différents organismes, aux personnes dont militaires et civils peuvent avoir la charge, aux individus jouissant d’une double nationalité, aux membres des forces étrangères lorsqu’ils se trouvent en permission, à ceux d’entre eux qui désertent, etc. ? Quelle est la juridiction compétente pour les différentes infractions, délits ou crimes, suivant les conditions dans lesquelles les fautes sont commises ? Un acte qui n’est pas considéré comme donnant matière à poursuite dans l’État d’origine, mais dans l’État hôte – ou réciproquement – doit-il être sanctionné, et de quelle façon ?
De nombreux exemples illustrent le sujet et montrent à l’évidence qu’il est indispensable de prévoir minutieusement les divers aspects du statut. Cependant, comme il est impossible de les prévoir tous, il convient, à partir d’un texte clair, et avec une bonne volonté réciproque, d’en faire une application raisonnable et juste.
Un livre, en résumé, qui présente le plus grand intérêt, et auquel les circonstances présentes donnent une particulière actualité. ♦