Aéronautique - Les forces aériennes américaines au Vietnam - La participation des États-Unis au Salon aéronautique du Bourget - Bilan du programme spatial soviétique
Les Forces aériennes américaines au Viet-Nam
Actuellement, les Forces aériennes américaines basées au Viet-Nam peuvent être estimées globalement à 700 avions de combat et 1 700 hélicoptères de tous types, mis en œuvre par les trois armées, l’Air Force, la Navy et l’Army, ainsi que par le corps des Marines sous la forme d’une escadre totalement indépendante, la 1re Marine Air Wing.
Ces appareils effectuent en moyenne 25 000 sorties par mois dont 12 000 au Sud-Vietnam. Sur ce total, on peut évaluer à une centaine le nombre de sorties effectuées au Laos et à 150 celles effectuées au Sud-Vietnam par l’Armée nationale sud-vietnamienne.
Ces chiffres ne comprennent pas les nombreux avions de transport utilisés pour assurer le support logistique des Forces tant sur le plan local qu’entre le Viet-Nam et les bases extérieures (Japon, Corée, Philippines, etc.).
Les opérations tactiques sont conçues, dirigées et coordonnées pour l’ensemble du territoire du Viet-Nam par un organisme unique, le Centre des opérations tactiques, situé à Saïgon sur l’aérodrome de Tan Son Nhut.
Les unités aériennes sont déployées sur un grand nombre de bases, dont les principales sont Tan Son Nhut, Nha Trang et Da Nang. Il semble que les Américains fassent actuellement un effort particulier pour développer leur infrastructure aéronautique en Thaïlande, particulièrement le long de la frontière laotienne. L’installation de bases dans cette région (Nakhon, Phanom, Uubon…) les rapproche considérablement de leurs objectifs au Nord-Vietnam.
Les pertes. — À ce jour, les Américains ont perdu :
– au Nord-Vietnam, depuis le 7 février 1965 : 448 avions et 4 hélicoptères de sauvetage ;
– au Sud-Vietnam, depuis le 1er janvier 1961 : 141 avions et 242 hélicoptères ;
soit un total de : 589 avions et 246 hélicoptères.
Il faut ajouter à ces chiffres 120 avions et 30 hélicoptères détruits au sol par sabotage ou actions de commandos.
Comparées au nombre total de sorties, ces pertes sont de 4 appareils pour mille sorties. Ce taux est inférieur à celui de la dernière guerre (9 pour 1 000), légèrement supérieur à celui enregistré en Corée (3 pour 1 000). En 1965, ce taux s’est élevé à 7 pour 1 000.
La diminution des pertes comparées au nombre toujours croissant des actions aériennes est due à plusieurs causes :
– tout d’abord, à l’application de certains procédés ou de certaines tactiques, mis au point à la faveur de l’expérience des combats, comme en ce qui concerne le vol à très basse altitude pour éviter l’action des missiles sol-air, l’attaque en piqué et à grande vitesse des objectifs protégés par la DCA, etc. ;
– ensuite, une meilleure efficacité des équipements de détection et de « brouillage » électronique ;
– enfin, la mise en place d’importants moyens de reconnaissance, groupés au sein d’une escadre : la 460e Tactical Reco Wing. Cette escadre comprend aussi bien les avions de reconnaissance classiques équipés pour la photographie aérienne, que des appareils de tous types dotés de matériels de détection et de contre-mesures électroniques. Son quartier général est installé à Tan Son Nhut et ses 8 escadrons sont déployés sur 5 bases dont une en Thaïlande.
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L’arme la plus meurtrière pour les avions américains est sans conteste la DCA classique : canons, mitrailleuses, etc. Sur les 835 appareils détruits à ce jour, 22 avions seulement ont été abattus par les engins sol-air, 11 par la chasse nord-vietnamienne.
La basse altitude nécessaire pour remplir certaines missions est donc relativement dangereuse alors que, pour l’instant, les vols à haute et moyenne altitude semblent assurer à l’aviation US une relative sécurité. Ce fait incite le commandement américain à préférer de plus en plus aux attaques en piqué, les bombardements effectués en altitude par des dispositifs de plusieurs chasseurs-bombardiers larguant leurs bombes « à l’imitation » d’un avion-guide équipé de moyens de navigation et de visée-radar perfectionnés.
Intensification des raids de B-52. — Selon certaines sources, les Américains envisageraient d’utiliser de façon plus intensive leurs bombardiers géants B-52. Le Pentagone aurait décidé de porter à 50 le nombre de ces appareils. Actuellement la flotte des B-52 est stationnée à Guam, île du Pacifique située à plus de 8 500 km du Vietnam ; elle compte une trentaine d’appareils. Ces avions viennent d’être modifiés pour pouvoir être utilisés en bombardement classique ; leur capacité d’emport en bombes explosives est passée de 19 tonnes à 30 tonnes.
Leurs missions consistent à déverser leur tapis de bombes dans les zones présumées d’implantation viet-cong selon un quadrillage systématique. Effectuant leurs vols à haute altitude et par tous temps, les B-52 entretiennent une quasi-permanence du bombardement. Cette action incessante contraint l’ennemi à des déplacements continuels et à l’utilisation systématique d’abris enterrés. Elle a pour résultats, sinon des pertes sérieuses chez l’adversaire, du moins un effet psychologique certain qui altère sensiblement sa combativité.
Or, depuis un certain temps déjà, les Américains se sont aperçus que l’efficacité des bombardements effectués par les B-52 était en diminution. Ils ne trouvaient plus sur le terrain « traité » qu’un nombre négligeable de victimes. Il semble évident que les Vietcong soient parvenus à réaliser un système d’alerte qui leur permet d’avertir les unités occupant le terrain avant l’action des bombardiers. Un certain nombre de « chalutiers » soviétiques croisant au large de Guam ne seraient pas étrangers à ce système d’alerte. Dotés de puissants radars, ils détecteraient les bombardiers dès leur décollage. Or les B-52 n’arrivent sur leurs zones d’action qu’après un vol de 4 heures, ce qui laisse largement le temps aux unités d’être averties et de se protéger.
Pour bénéficier de l’effet de surprise indispensable, le Commandement américain envisagerait d’utiliser comme bases de départ pour ses bombardiers lourds des terrains beaucoup plus proches du Viet-Nam, en particulier les bases de Clark, aux Philippines, et de Sattahip, en Thaïlande.
Ce redéploiement réduirait très sensiblement la durée de vol nécessaire, d’où deux avantages :
– tout d’abord de réduire le volume de carburant à bord des avions, ce qui du même coup augmenterait leurs positions d’emport en bombes ;
– ensuite de diminuer le temps dont disposait le Vietcong pour assurer l’alerte de ses unités.
L’utilisation plus intensive des B-52 à partir de bases rapprochées conduira certainement à un meilleur « rendement » de ces appareils. Mais elle présente aussi un nouveau pas dans l’escalade.
Récupération et sauvetage des pilotes. — Quoiqu’inférieur à celui de la dernière guerre, le taux de perte en appareils, nous l’avons vu, n’est pas toutefois négligeable. Les quelque 880 appareils abattus depuis le début des hostilités au Viet-Nam représentent certes des pertes en matériel, mais aussi des pertes en personnel. Or souvent les équipages tombés en zone adverse sont indemnes ou légèrement blessés. La récupération de ces personnels nécessite le déclenchement d’une véritable opération militaire. De plus la réussite de tels sauvetages nécessite une grande rapidité d’exécution et d’importants moyens. À ce titre, les Américains n’ont rien négligé. Pour réaliser ces récupérations dans les meilleures conditions, ils ont mis sur pied une vaste organisation, dont l’élément principal est le 8e Groupe de récupération et sauvetage.
Disposant de moyens modernes (45 avions et hélicoptères, 650 hommes) ce groupe a son PC installé à Saïgon et ses unités déployées sur la plupart des terrains opérationnels, particulièrement sur ceux situés à proximité du 17e parallèle ou le long de la frontière laotienne. Les hélicoptères sont utilisés pour le sauvetage des équipages tombés au sol. La Navy utilise, pour les pilotes tombés en mer, des hydravions du type Grumman Albatross.
Le mécanisme de récupération d’un pilote se déroule généralement de la façon suivante.
Dès qu’il se trouve au sol, le pilote met en marche un émetteur radio portatif contenu dans sa trousse de survie fixée en permanence au harnais de son parachute. Cet émetteur diffuse automatiquement un signal de détresse sur une fréquence veillée en permanence par des postes d’écoute au sol et par des avions en vol.
Si le pilote abattu effectuait sa mission avec un équipier, celui-ci transmet au centre de sauvetage de Saïgon la position et l’état de santé de son camarade. Il « orbite » ensuite autour de celui-ci pour le protéger éventuellement contre toute intervention ennemie. S’il est à court de carburant, il va se faire ravitailler en vol et revient ensuite continuer sa mission de protection.
Le centre de sauvetage de Saïgon fait décoller de la base la plus proche une patrouille de chasseurs-bombardiers, en général des Skyraiders, avions à hélice relativement lents, mais disposant d’une grande autonomie de carburant, d’un blindage efficace, et d’un armement bien adapté pour l’attaque au sol (4 canons de 20 mm). Ces avions ont pour mission de relayer l’équipier du pilote abattu et d’éliminer toute présence ennemie au sol, afin que l’hélicoptère puisse se poser avec toute la sécurité nécessaire. Cette précaution s’avère souvent inefficace : en effet les Nord-Vietnamiens attendent en général que l’hélicoptère soit posé pour ouvrir le feu.
Si le pilote est tombé dans une zone contrôlée par des chasseurs ennemis, le Centre de Saïgon alerte une ou deux patrouilles de F-4 C Phantom en protection, un KC-135 Strato Tanker pour le ravitaillement en vol des Phantom et un avion de transport C-130 Hercules, spécialement équipé, chargé d’assurer les liaisons radio avec le centre. Cet appareil sert en quelque sorte de PC volant.
Le bilan des activités du 3e Groupe de récupération et sauvetage justifie l’importance des moyens mis en œuvre. En effet, 453 aviateurs ont été sauvés et récupérés depuis le début des hostilités, dont 287 pour le premier semestre 1966 et 81 pour le seul mois de juin.
Deux exemples illustrent les difficultés et les risques rencontrés dans l’exécution de telles missions :
– le 13 mai 1966, un pilote américain est récupéré près de Yen Bay, village situé à 80 km de la frontière sino-vietnamienne et à plus de 800 km de la base américaine la plus proche ;
– le 6 décembre 1966 un avion de reconnaissance est abattu à Dien Bien Phu. L’un des deux pilotes est blessé. Un hélicoptère se porte immédiatement aux secours des deux hommes et pose un médecin. Touché par des tireurs adverses, il est obligé de rejoindre sa base. Un deuxième hélicoptère pose un second médecin. Cet hélicoptère est touché à son tour et le médecin blessé. C’est finalement un troisième appareil qui parvient à repêcher les quatre hommes et regagne sa base criblé de balles.
La participation des États-Unis au Salon aéronautique du Bourget
Le prochain Salon aéronautique du Bourget aura lieu au printemps 1967. Le gouvernement des États-Unis a décidé que sa participation à cette manifestation internationale serait, cette année, massive et spectaculaire.
De nombreuses critiques avaient été faites lors du dernier salon au sujet de la participation américaine ; les États-Unis n’avaient, en effet, présenté en 1965 que quelques avions militaires en service et un nombre réduit d’engins spatiaux de modèle déjà ancien. Les Soviétiques, par contre, avaient fait un sérieux effort pour montrer au public les derniers modèles de leur production aéronautique : avions de transport et hélicoptères.
Le thème général de la présentation américaine sera l’histoire de l’aviation depuis la traversée de l’Atlantique par Charles Lindbergh, il y a 40 ans. Rappelons que Lindbergh se posa au Bourget, à l’endroit même où se tiendra le Salon. Une reproduction exacte de son avion, le Spirit of St Louis, sera transportée depuis les États-Unis à bord d’un Jet de transport C-141 et atterrira au Bourget le 21 mai, 40e anniversaire du fameux vol.
Les organisateurs américains espèrent présenter à ce salon :
– un véhicule spatial North American Apollo récupéré après son vol ;
– une fusée Titan II, dont l’ogive sera un planeur supersonique du modèle le plus récent ;
– la partie avant du fuselage du transport supersonique (SST) ;
– divers systèmes de contrôle automatique de circulation aérienne ;
– un satellite Nimbus et un laboratoire spécialement mis en place à cette occasion qui présentera aux visiteurs les photos obtenues par les satellites météorologiques lors de leurs passages au voisinage de Paris ;
– des maquettes de propulseurs nucléaires ainsi que des moteurs utilisant l’énergie nucléaire.
En outre, une société privée présentera un historique des techniques de télécommunications et mettra à la disposition des visiteurs une ligne téléphonique directe utilisant comme relais le satellite Early Bird.
L’US Air Force a proposé que soient montrés au Bourget la plupart de ses avions les plus récents, en particulier le F-111 A, chasseur à géométrie variable, le SR-71, avion de reconnaissance stratégique, et le XB-70 A, prototype de bombardement à long rayon d’action et à grande vitesse (Mach 3). Ce projet toutefois semble avoir peu de chances d’être agréé par le département de la Défense.
Les plus importantes firmes industrielles seront représentées. Au total 58 sociétés sont déjà retenues. Stands et pavillons occuperont 3 000 m2 de surfaces couvertes tandis que 2 000 m2 de parking sont déjà réservés pour l’exposition statique des matériels.
Bilan du programme spatial soviétique
Le dernier vol d’un véhicule spatial habité effectué par les Soviétiques fut celui de Voskhod 2, en mars 1965. Depuis cette date, les Russes n’ont réalisé qu’un certain nombre de lancements à des fins scientifiques ou militaires :
1° Expériences scientifiques :
– deux vols autour de la Lune ;
– deux « atterrissages » lunaires, dont le dernier, celui de Luna 13 a été effectué le 21 décembre 1966 ;
– quatre satellites de communications de type commercial, dont un au moins sert aussi pour l’observation météorologique ;
– un lancement vers Vénus ;
– une fusée-sonde conçue pour intercepter la planète Mars ;
– trois satellites terrestres Proton de 12 tonnes, dont l’un au moins a été récupéré ;
– un vol de 22 jours sur orbite terrestre d’un satellite contenant deux chiens.
2° Réalisations d’intérêt militaire :
– Une soixantaine de satellites de reconnaissance ont été lancés et récupérés. Certains de ces satellites circulent sur des orbites leur permettant de survoler les installations radars du Canada et du Groenland.
– Un système de satellites de télécommunications placés sur orbites basses.
– Une série de satellites de navigation destinés à leurs sous-marins.
Le simple examen de ce « bilan » conduirait à penser que les Russes ont abandonné leur programme de vols humains en vue de la conquête de la Lune et qu’ils se limitent maintenant à des expériences scientifiques et à la réalisation d’un programme purement militaire. Ce serait vite conclure. Les Soviétiques ont peut-être déjà résolu les problèmes concernant la vie de l’homme dans l’Espace ; leur programme d’expériences se trouve de ce fait dans une phase où le lancement de capsules pilotées n’est plus nécessaire.
De plus, ils ont commencé le 20 novembre une série de tirs de lanceurs lourds capables de mettre sur orbite des charges de plus de 12 tonnes. Ces essais semblent confirmer les déclarations de l’Agence Tass selon lesquelles aurait lieu, au printemps prochain, le lancement d’un véhicule spatial contenant plus de cinq cosmonautes pour un vol de plus d’un mois.
Il semble donc prudent d’attendre encore quelque temps avant de conclure à un abandon par l’URSS du projet de conquête de la Lune. Il est toujours hasardeux de faire des hypothèses sur ce qui se passe de l’autre côté du Rideau de fer. Les Soviétiques ne font pas de publicité. Par contre, leurs exploits dans le domaine spatial, quoique toujours inattendus, n’ont jusqu’à présent jamais été décevants. ♦