Aéronautique - Le 27e Salon international de l'Aéronautique et de l'Espace - Transport civil : le parc aérien mondial - Royal Flush XII
Le 27e Salon international de l’aéronautique et de l’Espace
Ce Salon a connu un succès sans précédent. Plus d’un million et demi de visiteurs ont été dénombrés. 522 exposants, une centaine de plus que l’année dernière, occupaient, avec leurs stands ou leurs pavillons, plus de 53 000 m2 de surfaces couvertes. Sur les parkings s’entassaient, ailes contre ailes, cent cinquante avions. Les présentations en vol, ainsi que les démonstrations des patrouilles acrobatiques ont constitué une véritable « fête de l’air », malheureusement endeuillée par un accident qui coûta la vie à un pilote de la Patrouille de France.
Une fois de plus, ce Salon a confirmé son titre de « plus grandiose manifestation de l’aéronautique internationale ». Il constitue de plus un véritable panorama de l’industrie aérospatiale. Il n’est certes pas question de présenter dans cette courte rubrique tout ce qui y a été exposé. Il est possible, par contre, de dégager les grandes lignes de l’évolution des techniques et des matériels qui préfigurent l’Aéronautique de la prochaine décennie.
Cette évolution se caractérise dans les principaux domaines suivants :
I. – Les avions à géométrie variable.
Le procédé adopté sur ces avions consiste à faire pivoter chaque demi-aile sur un axe, de façon à leur faire prendre « la flèche » correspondant au meilleur profil de vol. Dans la phase « croisière », ou « basses vitesses », les ailes sont largement déployées. Elles se replient contre le fuselage et forment une aile delta unique pour les vitesses supersoniques.
Le General Dynamics F-111 Aardvark américain a été construit sur ce principe. Sa présentation en vol a été un des plus grands succès du salon. C’est un biréacteur pouvant voler à plus de Mach 2,5, avec ses ailes repliées à 72° de flèche. 500 de ces avions sont déjà commandés par les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Australie. Un des prototypes a établi un record de distance en volant de son terrain de stationnement situé aux États-Unis jusqu’au Bourget sans ravitaillement en vol, ni réservoirs supplémentaires. Il a franchi ainsi plus de 5 400 km en 5 heures 54.
La présentation « hors salon » du Mirage IIIG mérite toutefois d’être notée. La firme Marcel Dassault a réalisé une véritable prouesse en « sortant » cet avion en moins de 18 mois. C’est également un avion à géométrie variable, dont le premier vol est prévu avant la fin de l’année. Il doit servir de banc d’essais pour la mise au point d’un futur avion d’armes éventuellement développé suivant un programme franco-britannique.
II. – Les avions STOL (Short take-off and Landing, décollage et atterrissage court).
Ces avions font l’objet d’études très poussées depuis quelques années. Le problème consiste à réaliser un appareil disposant de bonnes performances, que ce soit en capacité d’emport ou en vitesse, capable d’utiliser des pistes très courtes ou des terrains sommairement aménagés. Diverses solutions ont été présentées au Salon :
– le Ling-Temco-Vought (LTV) XC-142 américain à aile basculante équipée de 4 moteurs à hélice. C’est un avion classique en vol de croisière, et un hélicoptère pour l’atterrissage ;
– le Bréguet 941, déjà présenté au Salon de 1965, l’a été cette année dans sa version de série, très améliorée par rapport au prototype en ce qui concerne la puissance des moteurs et l’accessibilité de la soute. Quatre exemplaires ont été commandés par l’Armée de l’air ;
– le Nord 500, avion expérimental à hélices carénées basculantes ;
– le Hawker Siddeley P.1127 Harrier britannique, monoplace d’attaque dont 60 exemplaires doivent être livrés en 1968 ;
– le prototype allemand Dornier 31 E, qui a effectué son premier vol le 10 février 1967.
III. – Les avions de transport civils.
Dans ce domaine, les constructeurs s’orientent nettement vers l’accroissement des performances, que ce soit en charge utile ou en vitesse, comme le prouvent les maquettes et les projets exposés :
• Le Concorde, avion de transport supersonique franco-britannique, dont la maquette à l’échelle 1 a été le clou de l’exposition statique. Sa mise en service sur ligne est prévue en 1971.
• Le Boeing 2707 américain, à géométrie variable, capable d’emporter 300 passagers à Mach 2,7. Le premier vol du prototype doit être effectué en 1970 et sa mise en service en 1974-1975.
• Le Tu-144 soviétique, encore en projet, sensiblement identique au Concorde.
• Le Boeing 747, avion subsonique, mais capable d’emporter quatre fois plus de passagers et de fret que le Boeing 707 ; il commencera ses essais en vol fin 1968.
• La maquette du A-300, ou Air Bus, dont la réalisation est liée à un accord de coopération, en cours de discussion, entre les principaux pays d’Europe.
IV. – Les avions « d’affaires » à réaction.
Cette formule connaît un développement très important depuis le succès remporté sur le marché international par le Mystère 20 – dénommé Fan Jet Falcon aux États-Unis – construit par la firme Marcel Dassault.
Cet avion répond aux besoins d’une certaine classe d’utilisateurs, constituée de petits groupes ou d’hommes d’affaires désirant se déplacer dans les mêmes conditions de rapidité et de confort que sur avions de transport commerciaux, tout en choisissant leurs horaires et leurs escales.
La formule adoptée par les constructeurs est sensiblement identique à celle du Mystère 20 : petits biréacteurs capables de transporter une dizaine de passagers sur des trajets de plus de 3 000 km à une vitesse de 450 à 500 nœuds (900 km/h). Tous sont évidemment climatisés, pressurisés et dotés des équipements les plus modernes.
Cinq pays présentent leurs modèles :
– les États-Unis, le Jet Commander (Aero Commander Inc) et le Lear Jet (Lear Jet) ;
– la Grande-Bretagne, le HS-125 (Hawker-Siddeley) dont 122 exemplaires sont déjà vendus ;
– l’Italie, le Piaggio PD-808 construit en collaboration avec la firme américaine
Douglas.
Précisons que le Mystère 20 est construit à la cadence de 7 avions/mois. Le centième est sorti des usines Dassault en juillet. Deux cents avions de ce type sont déjà en commande ferme et seront livrés pour la plupart à la Pan American Airways.
V. – Les avions de chasse tactiques.
Une certaine tendance semble se dessiner actuellement pour développer la formule de l’avion d’assaut spécialisé dans l’attaque au sol, comme le démontrent certains modèles présentés :
• Le Vought A7A Corsair américain, dont les essais viennent de se terminer. C’est un monoréacteur subsonique « polyvalent », fortement blindé, pouvant emporter 7 tonnes d’armement en charges extérieures. Les deux Corsairs présentés au salon avaient rejoint Le Bourget en partant directement de leur base de Patuxent River, États-Unis ; ils ont ainsi parcouru plus de 7 200 km en 7 heures de vol sans ravitaillement intermédiaire.
• Le Jaguar, dont la maquette à l’échelle 1 était présentée. Cet avion, réalisé conjointement par Bréguet et British Aircraft Corporation, sera construit en plusieurs versions. Sa version tactique pourra emporter à basse altitude une tonne d’armement à 600 km, et utiliser des pistes en herbe de moins de 1 000 m.
• Le Mirage M-5, version tactique du Mirage III, pouvant emporter 14 bombes sous les plans, avec une autonomie accrue.
• Le Fiat G91Y, nouveau chasseur monoplace italien d’appui tactique et de reconnaissance, biréacteur.
VI. – Les hélicoptères.
Dans ce domaine, deux nouveautés peuvent être notées :
• L’adoption du rotor rigide, d’une conception plus simple en théorie que celle du rotor classique, mais dont la réalisation nécessite une technologie plus évoluée. Sud-Aviation présente sa dernière création dotée de ce nouveau rotor, le SA-340 Gazelle, hélicoptère d’observation équipé d’une turbine Turbomeca Astazou de 530 CV. Il faut aussi noter le XH-51A, de Lockheed, le plus rapide du monde (850 km/h) et capable d’effectuer des acrobaties comme un avion classique.
• Le ravitaillement en vol, utilisé pour la première fois en vue d’établir un record. Ce procédé, mis au point par les Américains pour les opérations du Vietnam, a permis en effet à deux hélicoptères Sikorsky HH-3E de franchir d’une seule traite l’Atlantique de New York au Bourget en 30 heures 40 de vol après 9 opérations de transfert de carburant effectuées par des Lockheed HC-130 Hercules.
VII. – Les fusées et les engins spatiaux.
La fusée soviétique géante, lanceur du Vostock, a eu le succès spectaculaire qu’elle méritait. Cette fusée de 300 t et de 38 m de long, conçue en 1958-1960, avait permis de lancer Gagarine dans son vol spatial le 12 avril 1961.
Parmi les autres réalisations présentées au Salon et qui sont innombrables, il convient de noter plus particulièrement :
1) les énormes satellites soviétiques, comme les Proton, pesant une douzaine de tonnes ;
2) la fusée américaine Nerva, dont la poussée, à base d’énergie nucléaire, pourra développer 100 tonnes pendant une heure ;
3) le planeur spatial américain SVJ5, capable d’effectuer sa « rentrée » dans l’atmosphère, non en chute libre, mais après un plané contrôlé par le pilote ;
4) les lanceurs de construction française :
– le Diamant B, ou Super Diamant, qui doit être tiré en Guyane en 1969, avec le satellite D2 du CNES (Centre national d’études spatiales),
– les maquettes de 8 lanceurs constitués par l’assemblage de fusées déjà construites, le Vulcain, l’Hyper Diamant et le Diogène 2, ce dernier devant permettre de satelliser 2 tonnes sur orbite basse.
Conclusion. – Ce Salon, véritable vitrine du monde aérospatial, a été l’enjeu d’une confrontation sans précédent entre les deux grands, États-Unis et URSS. Certes, la dimension de leurs industries leur octroie une supériorité de masse incontestable sur les autres pays.
Le visiteur n’a pu manquer toutefois d’être frappé par la diversité et l’ampleur de la participation française, la plus importante de toutes les représentations européennes. Par sa vitalité, son dynamisme et par la qualité de sa production qui est une de ses marques traditionnelles, l’industrie aérospatiale française s’est élevée au rang international.
De plus, on peut remarquer l’ampleur des programmes réalisés en coopération entre les principales nations européennes. Il est certain que la coopération est une des solutions les plus efficaces permettant d’affronter la concurrence sur le marché mondial. Dans cette perspective, la France constitue la base matérielle la plus solide de la puissance aérospatiale de l’Europe de demain.
Transport civil : le parc aérien mondial
Cette étude ne concerne pas les avions appartenant aux pays non-membres de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), en particulier, l’URSS et la République populaire de Chine.
À la fin de 1966, les avions à réaction – qui, numériquement, ne représentaient pourtant qu’un peu moins de 30 % du parc mondial – comptaient, en raison de l’effet combiné de leur vitesse et de leur capacité, pour près de 80 % de la capacité totale offerte, en tonnes/kilomètres disponibles. Ces avions occupent donc, après huit ans seulement, une situation très nettement prépondérante dans le transport aérien. Les facteurs les plus intéressants qui se dégagent d’une analyse de l’année 1966 sont le très grand nombre de commandes et de livraisons d’avions à réaction, la place de choix qu’occupent les avions à rayon d’action moyen ou court dans ces totaux, et l’apparition, sur les carnets de commandes, du Boeing 747, avion géant qui pourra transporter près de 500 passagers et des avions de transport supersoniques (Concorde et Boeing 2707).
Pendant l’année 1966, 854 avions à réaction ont été livrés, soit un nombre beaucoup plus élevé que les années précédentes. Ce total comprend 129 biréacteurs – BAC-111, DC-9 et Sud-Aviation Caravelle – et 116 triréacteurs – surtout des Boeing 727 – ; c’est dire que près de 70 % des avions livrés ont été des avions à rayon d’action moyen ou court pour le transport des passagers. En plus de ces 354 avions à réaction, 144 avions à turbohélices ont été livrés, tous bimoteurs à court rayon d’action, à l’exception de 11 avions-cargos Lockheed L-382. En 1966, le nombre des commandes d’avions à réaction a été de 640, soit un peu moins qu’en 1965, mais plusieurs fois plus que les années précédentes. Près de la moitié de ces commandes portait sur des biréacteurs et triréacteurs, les plus grosses commandes intéressant les DC-9 et les Boeing 727, mais il y eut aussi 61 commandes pour le Boeing 747 et 61 pour la version allongée du DC-8, de la série DC-8-60, Il n’a été commandé que 74 avions à turbohélices.
Le nombre total des avions à réaction livrés aux entreprises de transport aérien des États contractants de l’OACI, en 1966 et auparavant, est de 1 712 : un peu plus de 50 % sont des quadriréacteurs long-courriers pour le transport des passagers ; environ 42 % des biréacteurs et triréacteurs à rayon d’action moyen ou court ; les autres des avions-cargos. Quand les 1 160 avions qui étaient en commande à la fin de 1966 seront livrés, le nombre total des avions à réaction livrés sera de 2 872, dont 40 % environ de quadriréacteurs, 29 % de biréacteurs et 18 % de triréacteurs pour le transport de passagers, 18 % d’avions-cargos. On peut aussi remarquer que sur ces 2 872 avions à réaction, 52 % auront été construits par Boeing, 28 % par Douglas et 20 % par Sud-Aviation, British Aircraft Corporation, Hawker Siddeley et Convair.
Le parc aérien total des entreprises de transport aérien des États-membres de l’OACI comprenait, à la fin de 1966, près de 5 900 avions de transport de tous genres d’un poids maximum au décollage supérieur à 9 000 kilos (20 000 livres). Enfin, 28 % de ces avions étaient à réaction, 20 % à turbobélices et 52 % à moteurs à piston ; il est intéressant de noter que les bimoteurs à pistons (dont la moitié environ sont des DC-3) représentent encore un tiers du parc aérien mondial. Cependant, les quelque 3 000 avions conventionnels en service ne constituent qu’environ 9 % de la capacité totale offerte.
Royal Flush XII
Le douzième concours de reconnaissance Royal Flush organisé par l’État-major des Forces alliées Centre-Europe, s’est déroulé cette année les 22, 23 et 24 mai.
Il mettait en compétition, pour les exercices de jour, 12 escadrons appartenant aux 2e et 4e ATAF (Forces aériennes tactiques alliées). L’escadron 2/33 de la 83e Escadre de reconnaissance de l’Armée de l’air française a participé au concours comme invité et n’était classé que pour les coupes individuelles. Depuis le retrait de la France de l’Otan, en effet, les formations de l’Armée de l’air n’étant plus affectées aux Forces alliées en Europe ne peuvent figurer dans un classement officiel.
Comme l’année dernière, la formule adoptée a permis de faire de ce concours une compétition de masse intéressant le nombre maximum d’équipages ainsi que l’environnement opérationnel et technique des unités, jusqu’à l’échelon base aérienne.
Les escadrons de reconnaissance ont engagé dans leur compétition l’ensemble de leurs avions. 80 % de leurs pilotes opérationnels ont effectué, à partir de leurs terrains de stationnement, un nombre minimum de missions fixé par le règlement.
Sur le plan de la sécurité des vols, les pilotes devaient observer, sous peine de pénalisations sévères, des règles de sécurité éliminant tout risque inutile. En particulier, à la notion de vitesse maximum était substituée celle de « vitesse standard opérationnelle ».
Durant les trois jours d’exercice, l’Escadron 2/33 a effectué, avec ses Mirages IIIR, 72 missions, représentant 105 heures de vol, au cours desquelles 216 objectifs ont été localisés et photographiés.
Le classement.
Les deux premières places au classement individuel par équipage ont été remportées par les Français. La première coupe revient au lieutenant Godie avec 2 164 points et la seconde au lieutenant Chrétien avec 2 077 points.
De plus, l’Escadron 2/33 a obtenu au décompte global des points, un score de 82 % soit 3 % de plus que l’Escadron classé premier au palmarès officiel, le 18e Escadron de l’US Air Force équipé de McDonnell RF-101 Voodoo.
La remise des coupes a eu lieu le 22 juin sur la base aérienne de Twenthe au cours d’une cérémonie officielle présidée par le Prince Bernhard des Pays-Bas.