Outre-mer - Le barrage d'Akosombo et le complexe VALCO : sérieux atouts pour le développement du Ghana - La mise en valeur du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire et les projets de construction du port de San-Pedro - La mise en service de l'oléoduc Tanzanie-Zambie
Le barrage d’Akossombo et le complexe VALCO : sérieux atout pour le développement du Ghana
Le gouvernement du général Ankrah a défini en mai 1968, le calendrier suivant lequel il entendait remettre le pouvoir à un régime civil. Un an à peine nous sépare de l’échéance qui a été fixée.
Presque simultanément, un nouveau plan de développement est entré en vigueur. Il fait suite au plan intérimaire de stabilisation de deux ans, lequel s’est achevé en juin. L’un et l’autre de ces plans s’appuient sur les atouts sérieux qu’offre au Ghana l’exploitation de l’important potentiel dont dispose déjà le pays et que représente le complexe hyydro-électrique de la Volta.
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Depuis 1938, de nombreuses études préliminaires avaient envisagé l’utilisation de l’énergie électrique qui pourrait être fournie par un barrage de la Volta au profit notamment d’un complexe industriel de l’aluminium, alimenté par les gisements de bauxite découverts dans l’Est et le Centre du Ghana.
Ces études, reprises en 1953 par la Volta River Project Preparatory Commission, avaient abouti en 1959, sous l’instigation du groupe américain Kaiser, à recommander l’implantation d’un barrage à Akossombo à environ 100 km au Nord-Est d’Accra, la construction d’un réseau de transport de l’électricité dans le Sud du Ghana et la création, dans une première phase et pour des raisons d’économies, d’une usine de traitement d’alumine importée à Tema, le port à l’Est d’Accra.
En 1961, un organisme d’État, la Volta River Authority fut créé pour réaliser ces projets. Les investissements à prévoir se montaient à quelque 70 millions de livres.
Le projet de financement alors établi dut faire ; largement appel à l’étranger. À côté d’une participation de l’État fixée à 35 M£, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement intervenait pour 16 785 000 £, l’USAID pour 9 643 000 £, l’Exim Bank pour 3 752 000 £ et l’Export Crédits Guarantee Department pour 5 000 000 £. Les crédits accordés étaient étalés sur 25 ou 30 ans et des contrats souscrits avec diverses sociétés étrangères permettaient de mener à bien la première tranche des travaux d’aménagement du barrage, lequel fut inauguré en janvier 1966. Sa capacité totale est de 768 000 kW. Il fournit aujourd’hui à l’économie ghanéenne une puissance d’environ 512 000 kW.
Dans le même temps, des prêts américains ont permis à la VALCO (Volta Aluminium Company Limited) de financer la construction de l’usine de Tema. Particularité intéressante à noter : si l’électricité provient d’Akossombo, le minerai par contre provient de l’étranger. Quoi qu’il en soit, la production d’alumine s’élève aujourd’hui à un peu plus de 100 000 t par an.
Parallèlement, le réseau de transport d’électricité s’est développé. Il relie aujourd’hui Akossombo à Accra, alimente Tema, Kamusa et Takoradi. D’une manière générale, il s’étend pratiquement à tout le Sud du Ghana.
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C’est évidemment l’investissement le plus important réalisé dans ce pays et les conséquences sur l’économie ghanéenne ne peuvent être que considérables.
La création d’un lac artificiel couvrant plus de 80 000 km2 et atteignant 400 km dans sa plus grande longueur, a entraîné le déplacement de plus de 80 000 personnes relogées dans des villages, créés ou en cours de création, aux environs du lac.
Dans le cadre d’un plan régional de modernisation de l’agriculture, 10 000 nouvelles exploitations agricoles réparties sur plus de 20 000 hectares, ont été lancées. Les rives du lac s’étendent sur plus de 700 km. Leur aménagement a permis d’entreprendre de nouvelles cultures et notamment du riz. À plus lointaine échéance, l’irrigation de la plaine d’Accra pourrait même être envisagée.
L’immense plan d’eau artificiel constitue déjà une excellente voie de communication entre le Nord et le Sud du pays et ne peut qu’être amélioré. Il offre en outre de belles possibilités en matière de pêche.
Enfin, dès aujourd’hui, une quantité d’énergie électrique, de loin supérieure aux besoins actuels, est disponible.
En attendant la création de tout un complexe de nouvelles industries qui pourront bénéficier de l’apport de cette énergie à bon marché, il a été décidé que l’énergie excédentaire pourrait être exportée vers les pays voisins ; des études sont en cours au Togo et au Dahomey intéressés par cette offre et le Canada doit financer la construction des lignes de transport.
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En bref, le Ghana est en convalescence. Il lui faut avant tout assainir ses finances et redresser son économie. Il a pour cela de sérieux atouts en mains.
Nul doute que s’il sait maintenir sa stabilité interne, réaliser sans heurts le calendrier politique et économique qu’il s’est fixé et conserver ainsi l’aide étrangère, il puisse reprendre progressivement la voie de son expansion.
La mise en valeur du Sud-Ouest de la Côte d’Ivoire et les projets de construction du port de San-Pedro
Encouragé par les résultats déjà acquis dans le reste du territoire et décidé à poursuivre sa remarquable politique de développement, le gouvernement de la Côte d’Ivoire s’est résolu à mettre en valeur le Sud-Ouest du pays. Cette région est difficilement pénétrable et sa seule ressource est l’exploitation du bois.
Mal desservie, comprise entre le Cavally à l’Ouest, le Sassandra à l’Est et limitée sensiblement au Nord par le 6° parallèle, elle est en effet essentiellement forestière ; elle couvre près de deux millions d’hectares dont plus de 1 200 000 hectares ont fait l’objet de permis d’exploiter. Une dizaine de scieries et deux usines de placage permettent d’exporter quelque 200 000 m3 de bois ronds par an. Cependant, l’étude des possibilités de développement de cette zone a fait apparaître comme rentable le développement des exploitations actuelles du bois, l’implantation de cultures nouvelles, hévéas, palmiers à huile, cocotiers… l’extension des autres cultures existantes, bananes, café, cacao…, l’exploitation de gisements de fer et de manganèse reconnus dans la région de Man dans le Nord-Ouest du pays.
Mais ces projets ne peuvent évidemment prendre corps que si une infrastructure routière plus étoffée débouche sur un port adapté aux nouveaux courants d’échanges qui ne manqueront pas de se créer.
C’est dans cette perspective qu’ont été étudiés des projets visant à :
– la construction d’un port à San-Pedro à environ 300 km à l’Ouest d’Abidjan ;
– la construction d’un chemin de fer reliant le nouveau port à Man, région des futures exploitations minières ;
– le développement des principaux axes routiers autour de San-Pedro et, notamment les axes de San-Pedro à Sassandra (100 km à l’Est), de San-Pedro à Tabou (100 km à l’Ouest), de San-Pedro à Sorbie-Issia (200 km au Nord), de San-Pedro à Diroutou-Duekoué (240 km au Nord-Ouest).
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L’estuaire de la rivière de San-Pedro s’est révélé le meilleur site possible pour y construire un port. Un éperon rocheux met les futurs bassins à l’abri de la houle et des vents. Des dépôts de vase, sable et argile permettent des excavations faciles jusqu’à des cotes suffisantes pour l’aménagement des bassins. L’ensablement éventuel n’est pas à craindre, de sorte que les travaux divers à prévoir pourront l’être aux meilleures conditions et aux moindres frais.
L’avant-projet actuel, qui porte sur plus de deux milliards et demi de francs CFA définit une première tranche de travaux qui sont sur le point de démarrer.
Ils portent sur :
– les aménagements permettant l’accès à la mer, le dégagement du bassin d’évolutions, les défenses contre la houle. Les caractéristiques choisies à cet effet permettent d’escompter que le futur port, comme celui d’Abidjan d’ailleurs, ne sera inaccessible aux navires de haute mer qu’un seul jour par an ;
– les aménagements d’exploitations correspondant au trafic prévu en 1975 et estimé à 175 000 t de marchandises diverses import-export et 560 000 t de bois flottables, embarqués sur sept embossages après stockage en bassin flottant d’une superficie de 22 hectares.
Il est ainsi prévu deux postes à quai, l’un de 160 m de long permettant l’accostage de navires jaugeant jusqu’à neuf mètres, l’autre de 175 m permettant l’accostage de navires calant onze mètres. Un quai de servitude de 130 m en eaux profondes de quatre mètres est également envisagé.
Ultérieurement, la pleine utilisation du site permettra de dégager 60 hectares de plan d’eau, 85 hectares de terre-pleins, comprenant 14 postes à quai ainsi que 450 m de quais pour la pêche, indépendamment des installations de servitude ou de réparation.
La profondeur du chenal d’accès, fixée à 12 m, celle du bassin d’évolution à 11 m, celle des quais variant de 9 à 11 m, permettront l’accès des bâtiments les plus lourds de la côte d’Afrique. Le trafic escompté devrait atteindre 2 500 000 t par an pour l’import-export dont en particulier plus de 50 000 t de produits de pêche maritime.
L’ensemble pourrait être facilement complété par un port de plaisance et un appontement minéralier.
On prévoit que quatre ans seront nécessaires à l’exécution des travaux de la première tranche. Mais on espère que d’ici trois ans les accès du nouveau port et les sept mouillages destinés à l’exportation des grumes pourront être ouverts au trafic.
Un premier pas, mais un pas important, vient d’être fait pour la mise en valeur du Sud-Ouest de la Côte d’Ivoire et le port de San-Pedro est bien parti.
La mise en service de l’oléoduc Tanzanie-Zambie
L’application à la Rhodésie des sanctions économiques décidées par l’ONU n’a pas entraîné une asphyxie mortelle pour l’économie de ce pays. Mais il en est résulté par contre de graves répercussions sur l’économie zambienne, dont une bonne partie des approvisionnements en produits énergétiques notamment, provenait traditionnellement d’Afrique Australe.
L’un des problèmes les plus difficiles à résoudre a été celui du ravitaillement en essence. La solution de fortune d’un approvisionnement par pont aérien grâce à l’aide anglo-américaine et canadienne, se révéla trop onéreuse et dut être très rapidement abandonnée. On se contenta alors du ravitaillement par route ou par chemin de fer à partir de la Tanzanie et l’on admit aussi par nécessité le transit à travers le Mozambique ou l’Angola.
Soucieuse de rechercher une solution africaine du problème et d’assurer en même temps son indépendance dans ce domaine, tant à l’égard de la Rhodésie que des provinces portugaises ses voisines, la Zambie, en accord avec la Tanzanie, s’est adressée à une société italienne, filiale de l’ENI, laquelle agissant sous la surveillance d’une société américaine représentant les intérêts des deux gouvernements africains, a construit dans des délais relativement courts un oléoduc reliant Dar Es Salam à N’dola.
Cet oléoduc, terminé avec deux mois d’avance sur les prévisions, a été mis en service au début du mois de juillet. L’ouvrage, d’une longueur d’environ 1 600 km, est entièrement enterré. Il comprend six stations de pompage et a coûté un peu plus de 16 millions de livres sterling. Le financement a été assuré par une banque italienne et le remboursement des prêts accordés s’étalera sur 15 ans. Le débit est actuellement limité à environ 450 000 t par an, mais il pourra être porté à 640 000 t, ce qui couvrira suffisamment les besoins zambiens.
Ainsi, la Zambie, en se tournant vers la Tanzanie, vient-elle de s’affranchir des voies traditionnelles de son ravitaillement en essence. L’oléoduc actuel pourrait même, par la suite, être transformé pour transporter du pétrole brut si les investissements nécessaires à la construction d’une raffinerie à N’Dola pouvaient être dégagés.