Aéronautique - Les avions à décollage vertical - Projet d'avion d'entrainement supersonique anglo-australien - L'équipement futur de la Royal Air Force
Les avions à décollage vertical
À en croire la revue américaine Aviation Week, la technique de construction des moteurs et des cellules a atteint maintenant un niveau qui permet d’envisager de nouveau la mise au point d’avions militaires et civils à décollage et atterrissage verticaux. On se souvient que cette formule a suscité il y a quelques années de grands espoirs dans les milieux militaires français, avant de sombrer dans un oubli peut-être provisoire, quand on s’est aperçu que le rapport de 1 à 20, entre le poids et la poussée des réacteurs utilisés pour la sustentation, était encore insuffisant pour que l’avion puisse avoir une autonomie valable en opérations. Sans doute existait-il déjà d’autres formules d’avions à décollage vertical : aile basculante, tuyère orientable. C’est même cette dernière qui, expérimentée par les Britanniques, devait seule aboutir à la construction en série d’un avion de chasse, le Hawker P.1127 Harrier. Néanmoins, depuis cette déception, les utilisateurs éventuels, militaires et à plus forte raison civils, sont restés réticents, et c’est précisément contre cet état d’esprit que la revue américaine se propose maintenant de lutter. Voyons un peu ses arguments.
La guerre israëlo-arabe a montré la vulnérabilité d’avions de combat stationnés sur des terrains aux pistes démesurées, où le desserrement des appareils reste limité et leur camouflage impossible. Cette vulnérabilité est d’autant plus grande que la surface du territoire est faible (cas de l’Europe occidentale).
L’encombrement des aéroports civils dont, tout au moins aux États-Unis, la paralysie est prévisible, exige de trouver une solution nouvelle au problème des transports aériens à courte distance.
Aussi l’éditorialiste de la revue déclare-t-il que la question n’est plus de savoir s’il faut fabriquer des avions à décollage vertical ou très court (VTOL : Vertical Take-Off and Landing ; STOL : Short Take-Off and Landing), mais bel et bien de s’attaquer dès maintenant aux problèmes ardus que la mise en œuvre de tels avions ne manquera pas de poser, surtout dans le domaine civil.
Cette campagne de la revue américaine – il n’est plus de semaine sans qu’on y trouve un article sur le sujet – est peut-être inspirée par les constructeurs d’outre-Atlantique qui ne peuvent ou ne veulent plus assumer seuls les frais de recherche et d’expérimentation de la formule V/STOL ou qui désirent voir s’accroître l’aide du gouvernement et des utilisateurs éventuels. Ceux-ci font la sourde oreille, d’une part parce qu’ils ont d’autres problèmes urgents à résoudre, – cas des militaires aux prises avec la guerre du Vietnam où le besoin d’un VTOL ne se fait pas sentir, – d’autre part parce que la rentabilité de la formule ne leur paraît pas évidente, – cas des compagnies civiles et des collectivités gérant les aéroports.
Mais précisément le transport VTOL ne sera économique que dans la mesure où on aura adapté à son usage les aéroports et les procédures d’approche, ce qui suppose des transformations profondes dans les méthodes actuelles et doit donc faire l’objet d’une étude d’ensemble : c’est, on le voit, un cercle vicieux.
Pour qu’un appareil VTOL commercial ait sa raison d’être il faut qu’il puisse opérer sur des terrains situés à la périphérie immédiate des villes, voire à l’intérieur même des agglomérations. Dans le développement de ces dernières, il faudrait donc d’ores et déjà prévoir l’emplacement de ces aérodromes, alors que leurs caractéristiques n’ont pas encore été définies et qu’on ignore si le bruit des avions sera acceptable.
En revanche, les obstacles paraissent moindres du côté militaire. Aussi bien est-ce dans cette direction que les efforts ont été et sont actuellement poussés le plus loin. Mais les militaires ne veulent pas s’engager avant d’avoir pu évaluer sur le plus grand nombre possible de prototypes l’intérêt opérationnel de la formule. Les civils, pour leur part, préfèrent attendre le résultat des expérimentations militaires.
C’est justement un programme militaire qui aurait pu donner le plus de chance à une formule VTOL : celui d’un avion de transport tactique léger, le Light Intratheater Transport (LIT). Mais le XC-142 n’a pas répondu aux espoirs initiaux et on s’oriente vers un appareil STOL.
L’Armée de l’air américaine et la NASA (National Aeronautics and Space Administration) reconnaissent volontiers qu’il faudrait construire un avion expérimental d’un type nouveau pour pousser plus loin les recherches, mais elles n’en ont pas les moyens pour le moment. Les seules expérimentations prévues dans l’année à venir portent donc sur les appareils suivants :
Le Ryan XV-5B a été donné par l’Armée de terre à la NASA après un accident ; celle-ci l’a réparé et modifié et se propose de le faire voler cette année. Il utilise une formule originale de turboventilateurs noyés dans l’aile et actionnés par l’échappement des deux réacteurs de croisière pendant les phases de décollage et d’atterrissage, grâce à un système de conduits et de vannes. Un autre ventilateur, situé dans le nez, sert à assurer la stabilité longitudinale. L’avion est destiné à des expérimentations de stabilité et de maniabilité pendant la phase de transition entre le vol vertical et le vol horizontal, ainsi qu’à l’étude de procédures d’atterrissage adaptées. Bien que l’avion expérimental ait plutôt l’aspect d’un appareil de combat, la formule paraît susceptible d’applications civiles dans le domaine des liaisons à courte distance (500 kilomètres). Elle semble s’accommoder de surfaces sommairement aménagées.
Le Lockheed XV-4B, dérivé du XV-4A Hummingbird, utilise une formule voisine de celle du Mirage III V français, mais il n’a que 4 réacteurs de sustentation (au lieu de 8) et la poussée des deux réacteurs de croisière peut être orientée pour les faire participer au décollage et à l’atterrissage.
Le programme d’expérimentations par l’aviation militaire américaine concerne le système de commandes pour le vol vertical et les problèmes d’érosion du sol et de recyclage des gaz brûlés.
Le Bell X-14A, avion expérimental déjà ancien à poussée orientable, et le Bell X-22A, qui utilise la formule des turboventilateurs basculants, mais avec une disposition en tandem qui lui donne un aspect extravagant, seront également employés à des expérimentations diverses.
Quant au XC-142A, quadriturbopropulseur à aile basculante, le dernier survivant des cinq prototypes construits a été donné à la NASA par l’US Air Force. Celle-ci a renoncé à en faire un avion opérationnel pour le programme LIT et la NASA compte utiliser l’appareil en même temps que son Hawker P.1127 (le second a été accidenté) pour des essais d’approche et d’atterrissage par mauvaise visibilité. La NASA voudrait aussi acheter des Canadair CL-84, biturbopropulseurs à ailes basculantes, pour s’en servir ultérieurement comme bancs d’essai des techniques et équipements particuliers aux avions VTOL, ce qui serait trop coûteux avec le XC-142, qui pèse 20 tonnes et fut proclamé en son temps le plus gros avion à décollage vertical du monde. Notons au passage qu’en utilisation VTOL, avec ses 4 turbopropulseurs de 3 080 chevaux, le CL-84 emporte seulement 3,6 t à 600 km.
La formule de l’aile basculante paraît avoir conduit à d’assez sérieux déboires (mauvais rendement des hélices en vol vertical, sensibilité aux rafales, perturbations aérodynamiques dues à l’effet de sol, entretien coûteux).
Il faut enfin signaler que les États-Unis poursuivent leur évaluation du Hawker P.1127 Harrier. L’aviation américaine en a 4, et la NASA 2 (dont un a été endommagé dans un accident).
Les divers essais, expérimentations, évaluations, ne donnent pas l’impression d’un travail coordonné. Les avions existent ; pour les faire voler, on leur fixe un programme de recherches, mais manifestement les autorités civiles et militaires ne croient pas qu’un appareil VTOL soit susceptible, au stade d’évolution actuelle, d’une utilisation pratique quelconque.
La situation en Europe n’est pas sans analogie. Il existe un avion construit en petite série, le P.1127 Harrier (60 monoplaces, 10 biplaces, commandés par la Royal Air Force (RAF), le premier escadron étant opérationnel en 1969-1970) et des prototypes, surtout en Allemagne fédérale (RFA). Mais bien que ce pays, de par sa situation géographique, soit le plus intéressé par les avions militaires VTOL, il est peu probable que les programmes Dornier 31 et VFW-Fokker Vak 191B conduisent à des constructions en série, la Bundeswehr ayant renoncé pour le moment à acquérir des avions de ce type. Deux prototypes du Do 31 sont construits : c’est un avion de transport utilisant 8 réacteurs de sustentation Rolls Royce RB 162 dans des nacelles de bouts d’ailes et deux Pegasus à tuyères orientables pour la propulsion et l’aide au décollage.
Son rayon d’action est de 500 km avec 3 t de fret. Encore le décollage à pleine charge est-il oblique et non absolument vertical. Quant au Vak 191B, dont six prototypes seront construits, c’est un projet germano-italien d’avion de combat et de reconnaissance tactique qui utilise la même formule mixte, chère à nos voisins : deux réacteurs de sustentation dont le jet, dévié, peut servir à la propulsion, et un réacteur de propulsion, le Rolls Royce RB 193, à tuyère orientable, donc fournissant le complément de poussée en décollage vertical. Le premier prototype doit sortir d’usine vers la fin de 1969. Dans tous les programmes utilisant des réacteurs de sustentation ou des réacteurs à tuyères orientables, on se heurte au même obstacle : le décollage et l’atterrissage verticaux « pèsent » si lourd que l’avion est pénalisé à la fois en rayon d’action et en capacité d’emport d’armement.
C’est ce dernier aspect qui confère de l’intérêt aux études menées par Nord Aviation depuis dix ans. Ces études se sont concrétisées dans la construction d’un avion expérimental, le Nord 500, utilisant la technique des « ventilateurs carénés » et basculants, qui a effectué récemment ses premiers vols « attachés ». Cette formule, comme l’expose M. Soulez-Larivière dans un document de présentation, permet d’utiliser, outre la poussée de l’hélice, les forces qui s’exercent sur le carénage et qui dépendent de la forme de la sortie. En faisant varier cette dernière, on peut assurer la régulation du ventilateur et son adaptation aux conditions diverses de fonctionnement. Le ventilateur caréné ou « turboventilateur » constituerait le meilleur compromis pour des avions à décollage vertical prévus pour des vitesses entre 600 et 1 000 km/h ; il offre des possibilités d’insonorisation non négligeables ; il conviendrait donc aux missions de transport, à la reconnaissance et à l’appui tactique.
On sait peu de chose des avions russes VTOL, sinon que les recherches des ingénieurs soviétiques se sont orientées vers les mêmes formules qu’en Occident : tuyères orientables et réacteurs de sustentation notamment. Des avions de combat VTOL ou STOL utilisant ces techniques ont été vus dans les manifestations aériennes, mais il est impossible de savoir s’ils sont réellement construits en série.
Ainsi, malgré l’enthousiasme pour les avions VTOL qui a brusquement saisi les revues aéronautiques, il semble bien que la technique du décollage et de l’atterrissage verticaux ne soit pas encore sortie du domaine expérimental. Il est significatif que le Pentagone s’oriente vers une formule STOL pour le programme LIT (remplacement du Fairchild C-123 Provider) ; ce n’est pas surprenant quand on songe que le décollage vertical, à puissance installée égale, se paie dans les modèles actuels par une perte de la moitié de la charge utile. Il est non moins intéressant de savoir que McDonnell Douglas et les Eastern Airlines vont expérimenter un Breguet 941, modifié et baptisé « McDonnell Douglas model 188 » en transport STOL à courte distance entre New York, Boston et Washington, à partir d’aéroports existants, mais sans interférer avec le trafic normal. Les Eastern Airlines envisagent, si cet essai est concluant, d’exploiter dans cette zone encombrée, vers 1973, une flotte de 40 avions STOL, d’une capacité de 100 passagers chacun (le McDonnell Douglas 210E). Notons enfin que le coût d’exploitation par passager et par unité de distance est estimé pour un avion VTOL au double de celui d’un avion classique, pour un avion STOL à une fois et demie cette valeur.
Dans le domaine militaire, si on se place dans le cadre de l’Europe occidentale, il paraît bien que l’avion VTOL soulève des problèmes insolubles pour le moment : à quoi sert de disperser des avions si on ne parvient ni à les entretenir, ni à les ravitailler, ni à transmettre les ordres à leurs pilotes, ni à les protéger efficacement ? À quoi bon leur donner une telle capacité de décollage, s’ils ne peuvent la faire valoir que sur des surfaces bétonnées et soigneusement balayées, et au prix d’une énorme pénalisation en rayon d’action et en armement ?
En revanche, le nombre élevé de terrains d’aéro-clubs qu’on trouve en Europe occidentale incline à penser qu’un avion de combat capable de se poser sur tous ces terrains constituerait déjà un progrès remarquable. Peut-être les constructeurs européens devraient-ils pendant quelques années encore se limiter à un tel objectif, plus modeste mais sans doute plus raisonnable, s’ils désirent vraiment voir leurs projets aboutir à des séries d’avions utilisables en opérations.
Projet d’avion d’entraînement supersonique anglo-australien
Sur la foi d’informations officieuses, la revue britannique Flight révèle que des ingénieurs appartenant aux bureaux d’études des Usines nationales de construction aéronautique australiennes (GAF : Government Aircraft Factories) et de la Commonwealth Aircraft Corporation travaillent depuis quelques mois, au siège de la British Aircraft Corporation à Preston, sur un projet d’avion d’entraînement supersonique susceptible d’être utilisé pour l’attaque d’objectifs au sol. Il s’agirait de déterminer si un tel appareil, qui serait plus petit, meilleur marché, mais d’une technique plus évoluée que le Jaguar, tout en répondant aux exigences d’emploi en climat tropical, est réalisable et capable d’intéresser d’éventuels acheteurs en Asie du Sud-Est, voire en Amérique du Sud.
L’avion serait polyvalent, en mesure de recevoir des équipements et des armements divers, répondant à des missions très différentes. Mais la raison profonde de ce projet est la crise qui menace l’industrie aéronautique australienne. En effet, la construction de Mirage III sous licence va être arrêtée à la fin de l’année puisque la Nouvelle-Zélande a choisi d’acheter, pour remplacer ses English Electric Canberra, 14 McDonnell Douglas Skyhawk destinés à la mission d’assaut, et les autres commandes en cours de réalisation ne comprennent aucun programme important.
Parallèlement, le retrait britannique de ses bases à l’Est de Suez donne à l’Australie de nouvelles responsabilités militaires en Asie du Sud-Est.
Enfin, le gouvernement australien n’est pas décidé à s’engager dans le financement de projets purement nationaux, tandis que la Grande-Bretagne est sans doute très désireuse de matérialiser par un projet d’avion commun les liens traditionnels qui l’unissent aux pays du Commonwealth. L’ancien ministre britannique de la Défense, M. Roy Mason, s’était d’ailleurs déclaré disposé à favoriser cette collaboration pour satisfaire des besoins mutuels et réaliser des ventes à l’étranger.
En l’occurrence, les besoins de la Royal Air Force n’entrent pas en ligne de compte puisqu’elle doit être équipée de Jaguars ; on semble donc s’acheminer vers un programme conçu en commun, mais réalisé en Australie avec l’aide d’experts de la British Aircraft Corporation.
Sans même parler des difficultés de son industrie aéronautique, l’Australie paraît répugner actuellement à l’achat pur et simple d’avions étrangers. Selon la revue britannique, cet état d’esprit est dû à plusieurs causes : les augmentations de prix du F-111C américain, le refus de la Suède de fournir de nouveaux engins Carl Gustav de peur qu’ils ne soient utilisés au Vietnam, la crainte enfin que la France ne vienne aussi pour la même raison à refuser des équipements essentiels pour les Mirage.
Il est probable que les deux gouvernements apportent déjà leur appui à ce projet et que la British Aircraft Corporation y participera financièrement dans l’espoir d’y gagner des clients étrangers. Des déclarations officielles sont attendues à ce sujet au début d’octobre.
L’équipement futur de la Royal Air Force
1. Le Buccaneer
Le supplément au Livre blanc britannique sur la Défense, publié en juillet, a annoncé que 26 Blackburn Buccaneers seraient commandés pour la RAF. Livrables entre 1969 et 1970, ils s’ajouteront aux soixante que la Marine va céder à la RAF, pour constituer trois unités. Ces avions sont destinés à la mission d’assaut et de reconnaissance initialement dévolue au BAC TSR-2 puis au General Dynamics F-111 Aardvark. La RAF bénéficiera dans leur utilisation de l’expérience acquise depuis 1968 par la Marine sur ce type d’appareils, ainsi que des nombreuses modifications qui depuis lors ont accru ses performances et la puissance de son armement. Il s’agit d’un avion de dimensions et de poids assez considérables mais qui, n’étant pas supersonique, ne constitue qu’un remplaçant peu prestigieux du F-111.
Le Buccaneer est un bimoteur, biplace en tandem. Il est propulsé par deux turboréacteurs à double flux Rolls Royce Spey dont la version civile équipe le Trident et le Bac 1-11 et dont la version militaire a été choisie pour certains types de Phantom. La poussée unitaire est de 5 t au décollage. Le poids de l’appareil peut atteindre près de 31 t au décollage (en utilisation normale : 25,5 t) et ses performances sont accrues par un dispositif de contrôle de couche limite et une fusée d’appoint à propergol liquide.
Son autonomie exacte n’est pas divulguée, mais un Buccaneer de la Marine a parcouru 3 600 km sans plein intermédiaire. Il peut d’autre part être ravitaillé en vol, et un autre exemplaire a déjà volé plus de neuf heures sans escale avec deux ravitaillements.
Il peut emporter un armement et des équipements importants : 4 bombes de 1 000 livres en soute ou un ensemble de reconnaissance photographique entre autres ; en charge extérieure un engin Martel, des bombes, ou des paquets de roquettes, pour n’en citer que quelques-uns. Il peut enfin être utilisé comme ravitailleur en vol.
L’équipage dispose d’un système de navigation à base de radar Doppler et d’un radar de recherche et de contrôle de tir qui permet aussi d’éviter les obstacles. Un calculateur fournit au pilote les données nécessaires à l’exécution du tir. En mission de reconnaissance, l’équipement inclus dans les soutes comprend des caméras pour les prises de vue de jour (verticale et oblique), une caméra pour les photographies verticales de nuit et 198 cartouches de flash.
La flèche de l’aile varie de 40 à 30° de l’emplanture à l’extrémité, l’empennage est en T. Son envergure est de 15 m, pour une longueur de 19 m. Pour l’atterrissage, le calage des ailerons est modifié en même temps que les volets s’abaissent, de façon à prolonger l’action de ces derniers sur toute l’envergure. Un mécanisme solidaire des volets de courbure déplace vers le haut un volet fixé sur le plan fixe arrière de façon à neutraliser le couple piqueur. Le soufflage de couche limite est obtenu par prélèvement d’air sur le compresseur haute pression. Cet air sous pression est diffusé sur l’extrados de l’aile et sur l’intrados du plan fixe arrière par des fentes situées sur les bords d’attaque.
Dans les conditions standards au niveau de la mer, avec la fusée en marche, l’appareil décolle en 750 m au poids de 25,5 t. Il se pose en 900 m au poids de 16 t. Sur un terrain situé à 1 500 m d’altitude, avec 35° de température extérieure, les longueurs ci-dessus deviennent respectivement 1 100 et 1 150 m.
L’avion est muni d’un train tricycle de type classique qui recevra sans doute, dans la version destinée à la RAF, des pneumatiques à basse pression. Il sera équipé de sièges éjectables Martin Baker type 4MS, permettant l’éjection à travers le cockpit à vitesse et altitude nulles.
Les performances exactes concernant l’autonomie dans les diverses conditions de vol (altitude et vitesse) ne sont pas publiées. On admet que l’avion peut atteindre un objectif situé à 1 600 kilomètres, en volant près de 200 kilomètres à basse altitude.
2. – Le projet de chasseur polyvalent européen
Après l’abandon du projet franco-britannique d’avion à géométrie variable, les Britanniques se sont tournés vers d’autres partenaires européens pour tenter de construire avec eux l’avion de combat de 1975. L’Allemagne fédérale, l’Italie, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne sont convenues d’établir individuellement les caractéristiques et les performances que chacune d’elles désire trouver dans cet avion et de mettre au point un compromis entre leurs diverses exigences avant la fin de l’année. Certains points de friction peuvent en tout cas être déjà pressentis.
Bien que le maître d’œuvre de l’avion ne soit pas encore désigné, la revue Flight s’élève violemment contre l’idée qu’une fois de plus la Grande-Bretagne pourrait abandonner la maîtrise d’œuvre de la cellule en échange de celle du moteur, alors qu’elle a en ce domaine une expérience plus grande que l’Allemagne qui, on le lui dit sans ménagements, n’a pas mis au point depuis la fin de la guerre un seul avion de combat.
De son côté, la RFA ferait ressortir que ses prétentions à la maîtrise d’œuvre sont parfaitement justifiées par le fait qu’elle est la première intéressée par cet avion, dont elle envisage d’acheter au moins 500 exemplaires pour remplacer les Lockeheed F-104G Starfighter. Le groupe de travail dont il sera parlé plus loin tient d’ailleurs ses réunions à Munich et on pense pour la maîtrise d’œuvre de la cellule à la Société Entwitcklungsring Sud.
Toujours est-il que cet avion encore hypothétique porte actuellement trois noms :
– Advanced Combat Aircraft (ACA) en Grande-Bretagne ;
– Neue Kampfflugzeug (NKF) en Allemagne ;
– Multi Role Aircraft for 1975 (MRA 75) dans les autres pays.
Ce projet, comme souvent en Europe, répond à la fois à des nécessités militaires et politiques : remplacement du F-104 et du Fiat G.91, maintien d’une industrie aéronautique européenne.
Par le protocole signé à la mi-juillet, les quatre pays se sont mis d’accord sur les points suivants :
– chaque Nation financera les études initiales destinées à définir les caractéristiques souhaitées par chacune d’entre elles ;
– un groupe de travail sera constitué avec des représentants des gouvernements et des constructeurs de chaque pays pour former une sorte d’autorité de direction (« Consortium ») ;
– un autre groupe de travail sera chargé de concilier les desiderata des diverses nations et de définir un programme commun.
On semble déjà s’être mis d’accord sur le principe d’un avion de caractéristiques STOL (Short Take-Off and Landing), mais il reste à définir le sens exact de ce terme ; d’autres points feront l’objet de discussions : nombre de membres d’équipages, de moteurs, dimensions de l’avion, prix de revient, etc. De plus, les performances réclamées par les Britanniques et les Allemands sont jusqu’à présent incompatibles : les premiers voudraient un rayon d’action à basse altitude de 500 km dont près de 300 à 0,9 Mach, les seconds s’en tiennent à 400 km dont 200 à 0,82 Mach, ce qui entraîne une différence de poids d’une tonne et demie. Enfin, bien que la plupart des partenaires semblent s’orienter vers un bimoteur, la revue Flight insinue que le projet d’avion Hawker P.1154 aurait pu répondre à la plupart des performances demandées pour l’ACA avec son moteur Pegasus à post-combustion de 13,6 t de poussée.
Il est probable que la participation financière de chaque pays sera proportionnelle à ses commandes ; Rolls Royce dirigerait la construction du moteur ; Fiat en Italie, Fokker en Hollande, la British Aircraft Corporation auront sans doute une part importante dans la réalisation de l’appareil. On s’attend enfin à ce que le Canada et la Belgique entrent à leur tour dans le consortium dans les mois à venir.
Le marché attendu porterait au moins sur 1 000 exemplaires. Le rival de cet avion en Europe sera évidemment le Dassault Mirage G.