Histoire de la Première Guerre mondiale. T. I : Crépuscule sur l’Europe
La guerre de 1914-1918 se place dans un vaste ensemble dont la continuité historique est flagrante de 1815 à 1939.
La Première Guerre mondiale – qui devait être la « dernière guerre » – n’est pas un conflit que l’on peut isoler chronologiquement. Elle s’explique au travers des facteurs constants qui modèlent l’histoire, en particulier la rivalité permanente du maître des mers et du maître des terres qui joue souvent le rôle de perturbateur ; sans omettre les faits accidentels qui modifient plus ou moins les aspects fondamentaux de cette lutte.
Le livre du général Gambiez et du colonel Suire : Histoire de la Première Guerre mondiale, qui paraît chez Fayard dans la collection « Les grandes études historiques » ne néglige en rien ces données stratégiques et intellectuelles nécessaires à la bonne compréhension des événements.
Ce livre met en relief l’évolution de l’art militaire et des aspects diversifiés du style direct et du style indirect au cours de la « Grande Guerre » et l’importance de la grande mutation qui, à travers les progrès de la science et de la technique, a affecté la stratégie et la technique, en particulier par l’intervention massive et décisive des chars et de l’aviation dans la bataille finale.
Le tome I, Crépuscule sur l’Europe, qui va de 1914 à 1916, vient de paraître. Le tome II, Grandeur et Servitudes d’une victoire sera, sous peu, en librairie.
Le tome I s’arrête au « hachoir » de Verdun et de la Somme à l’instant où, après le « grignotage » de 1915, la guerre, sur le front ouest, s’enlise dans un affrontement sanglant, linéaire et impuissant.
Auparavant, nous aurons été conduits de Waterloo à Sarajevo, depuis la paix de la Sainte-Alliance jusqu’au IIe Reich aux ambitions démesurées ; Guillaume II aura beau s’écrier : « Je n’ai pas voulu cela ! », la guerre était là et les principales puissances européennes se ruaient aux frontières, conscientes de leur bon droit et de leur valeur.
Conscientes de leur valeur, car elles avaient préparé avec conviction ce que la France appellera « la Revanche ». À partir d’août 1914, les dés de fer sont lancés ; les états-majors ont soigneusement élaboré la doctrine et précisé leur pensée militaire nationale. C’est l’affrontement non seulement des doctrines, des règlements et des forces morales, mais aussi, pour la première fois, des masses armées et d’une technique nouvelle. La guerre sera une guerre de coalition avec des théâtres d’opérations multiples.
Dès le début des opérations, le premier choc bouleverse les plans d’opérations et, à la guerre de mouvement, se substitue la guerre inattendue de position et de front continu. Alors débute la grande mutation de l’armement et de la technique avec toutes ses répercussions tactiques.
Mais la guerre ne se déroule pas seulement en style direct, sur le front occidental, elle existe aussi sur les fronts lointains ou périphériques, première esquisse du style indirect dans le domaine terrestre. Les auteurs insistent aussi sur la guerre navale et son importance dans ce conflit aux dimensions qui s’annoncent planétaires ; les adversaires tenteront de s’y nuire et c’est là que s’affirmera la puissance incontestable du maître des mers qui est capable d’encaisser de multiples coups durs en préparant patiemment la victoire future inéluctable.
Nous attendons avec curiosité Grandeur et Servitudes d’une Victoire.
Ouvrage simple et sérieusement documenté, d’une lecture agréable, d’autant plus qu’il est accompagné de tableaux suggestifs qui analysent, autant que de besoin, une phase particulière du conflit ou un phénomène spécifique à mettre en relief : procédé dont les auteurs usent avec bonheur pour « objectiver » alors de façon saisissante la structure historique nécessaire à la compréhension profonde.
C’est aussi un ouvrage puisé aux meilleures sources, les auteurs ayant pu accéder aux archives du Service historique des armées.
Il sera particulièrement apprécié de tous les lecteurs des écoles militaires et des établissements de l’enseignement militaire supérieur que leurs études conduisent à approfondir l’histoire militaire et à porter leur réflexion sur l’évolution de l’art militaire. Les auteurs sont maîtres incontestés en ces disciplines ; qu’il suffise de rappeler que le général Gambiez a dirigé jadis l’Enseignement militaire supérieur et qu’il est aujourd’hui président de la Commission française d’histoire militaire : on ne peut trouver meilleure référence. ♦